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En répétition – Un avant-goût de Renaissance de Sébastien Bertaud

Sébastien Bertaud fait partie des quatre danseurs-chorégraphes à qui est confiée une Carte Blanche du 13 au 18 juin au palais Garnier. Pour être à la hauteur de cette opportunité, le trentenaire a choisi de créer Renaissance, un “ballet classique d’aujourd’hui” pour 16 danseur.se.s avec comme “ambition d’amener de nouveaux publics vers le ballet, et l’inscrire dans notre époque“. Danses avec la plume a pu assister à une répétition une semaine avant la première.

Renaissance de Sébastien Bertaud en répétition

Studio Noureev. Ambiance studieuse en cet après-midi de juin. La pluie fait des claquettes sur les toits de zinc du Palais Garnier au gré des averses, mais ne parvient pas à perturber la concentration des danseur.se.s. Avant-dernière répétition en studio. Face aux interprètes, Sébastien Bertaud, pantalon et t-shirt noir, règle les derniers détails. “Allez, on reprend ce passage encore un fois, juste pour en avoir le cœur net et ne pas avoir de regrets.” Tout le monde s’exécute, certains marquent les pas pour s’économiser avant le filage total. “Le canon, plus vite et plus net“, renchérit-il.

Danseur à l’Opéra de Paris depuis dix-sept saisons, celui qui se sent “autant danseur que chorégraphe” n’en est pas à sa première chorégraphie. Sébastien Bertaud a ainsi signé plusieurs formes courtes dans le cadre des soirées Danseurs-Chorégraphes. Mais là, le challenge est d’une autre envergure. Un ballet de 27 minutes pour 16 danseur.se.s dont quatre Étoiles (Amandine Albisson, Dorothée Gilbert, Hugo Marchand et Mathias Heymann) sur un concerto  pour violon de Mendelssohn. “J’ai longtemps cherché une musique qui n’avait jamais été chorégraphiée, explique-t-il. Je voulais une partition à la hauteur du lieu qui permette un dialogue sensible entre musique et danse.

Absent des répétitions, Mickaël Lafon, Coryphée, fait son entrée dans le studio. Chuchotements avec ses camarades. Le danseur sort de chez le médecin. Entorse d’un orteil, il ne pourra pas prendre part à la création. Sébastien Bertaud s’enquiert de sa santé, le rassure et réfléchit immédiatement aux implications du forfait du danseur. Être chorégraphe, c’est comme être capitaine à bord. Se retrouver face à des imprévus et trouver la bonne voie pour s’en sortir sans inquiéter le reste du groupe. Mais les répétitions reprennent. D’une voix douce mais ferme, Sébastien Bertaud rectifie les placements et demande à revoir certains mouvements. S’il “passe par son propre instinct corporel de danseur pour créer” et est arrivé en studio avec une chorégraphie très écrite, il laisse la place aux remarques des danseur.se;s, y compris à quelques jours de la première. De son compagnonnage avec William Forsythe qui l’a choisi comme assistant-chorégraphe lors de la recréation d’Approximate Sonata, il a gardé des conseils avisés. “Sois dans le moment, prévois tout mais reste à l’écoute de l’énergie du studio“, lui a répété l’ancien directeur du Ballet de Francfort.

Soudain, Aurélie Dupont fait son entrée dans le studio. Elle s’assoit un instant, en silence. La pression devient palpable. Quelques danseur.se.s viennent la saluer, Dorothée Gilbert se glisse à ses côtés pour échanger quelques mots, les autres s’appliquent à donner le meilleur d’eux mêmes devant la directrice de la danse. Elle repart comme elle était venue. Sébastien Bertaud continue ses ajustements. Avec son smartphone, il filme certains passages qu’il enverra après la répétition aux interprètes pour peaufiner encore les derniers détails.  “Merci pour votre patience. C’est bien de serrer tous les boulons.

Le filage complet peut commencer. Le concerto pour violon N°2, op.64 de Mendelssohn s’élève dans le studio. La pertinence du choix saisit comme un évidence. Les danseur.se.s enchaînent la totalité des pas avec un bel investissement. J’ai hâte de voir ce que cela donnera avec les costumes dessinés par Olivier Rousteing directeur artistique  de la maison Balmain choisi par Sébastien Bertaud pour “poursuivre cette longue tradition de collaboration entre la danse et la haute-couture.”

 

Dernières recommandations aux solistes, reprises de quelques pas toute en bienveillance – “les filles , vous n’êtes pas obligées de le faire sur pointes” – la répétition touche à sa fin. Épuisé.e.s, les danseur.se.s apparaissent toutefois heureux.ses de participer à cette création. Comme si ce ballet leur avait permis de découvrir Sébastien Bertaud, qu’ils côtoient au sein du Ballet depuis des années, sous un autre jour. “J’ai intitulé ma création Renaissance pour faire écho à toutes ces rencontres artistiques qui jalonnent nos carrières de danseurs et qui permettent  de renaître, de se réinventer avec patience et détermination, évoque encore le danseur-chorégrapheEt de citer Pina Bausch à la fin de sa vie qui disait : “Longtemps, j’ai pensé que le rôle de l’artiste était de secouer le public. Aujourd’hui, je veux lui offrir sur scène ce que le monde, devenu trop dur, ne lui donne plus : des moments d’amour pur.”

 

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