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Le délicieux Petit Psaume du matin créé par Josef Nadj pour Dominique Mercy

De Montpellier à Marseille ou Avignon, la danse se vit traditionnellement dans le sud de la France en période estivale. Pourtant, grâce à Paris Quartier d’été, qui investit comme chaque année cours et jardins de la région parisienne, le train ou l’avion ne sont pas des véhicules indispensables pour qui désire se transformer en heureux festivalier. Au cœur d’une alléchante programmation est notamment présenté, au Centre Culturel Irlandais, le délicieux Petit Psaume du matin que Josef Nadj créa pour Dominique Mercy dans la cité des Papes il y a déjà 17 ans.

Petit Psaume du matin de Josef Nadj

Petit Psaume du matin de Josef Nadj

À la tête du CCN d’Orléans depuis sa création en 1995, Josef Nadj a annoncé qu’il ne serait pas candidat à sa propre succession. Cet originaire de l’ex-Yougoslavie de culture hongroise souhaite entamer un nouveau cycle, reprendre son indépendance et s’installer, pourquoi pas à Paris, avec une structure plus réduite. En attendant la fin de son mandat, celui qui étudia les Beaux-arts à Budapest avant de s’initier au mime, à la danse contemporaine, au tai-chi et au butô dans la capitale française, y fait escale avec Inhancutilitatem, une exposition de cyanotypes au Collège des Bernardins. Il y présente également Petit Psaume du matin.

Une partie de cette pièce lui fut commandée par Dominique Mercy en 1999, dans le cadre du Vif du Sujet organisé au Festival d’Avignon par la SACD. Prévue pour être un solo, Joseph Nadj ne résista pas à son envie de partager la scène avec l’emblématique et magnifique danseur de Pina Bausch. Jouant de leurs similitudes et de leurs différences, il créa une chorégraphie pour deux jumeaux dissemblables. Étendue par la suite à un format d’une heure, elle trouva sa forme définitive deux ans plus tard à la Biennale de Venise.

Tables, chaises, et longs ballets de bois sont posés sur le plateau qui se dresse dans la cours du Centre Culturel Irlandais. Si l’on ne connaissait le goût de Joseph Nadj pour cette matière, héritage d’un père charpentier, et son amour des tables qui lui rappellent celle sur laquelle son grand-père posait ses lectures successives, ouverture sur le monde, on penserait volontiers à Café Müller. Les deux hommes aux beaux cheveux blancs entrent en scène, vêtus de la même chemise blanche, du même costume gris, du même pardessus kaki. Leur regard est grave, comme perdu en eux, leur démarche et leurs gestes sont lents, minutieux, assurés.

Durant une heure qui passe en un battement de cils, ils nous convient à un voyage mélancolique où les gestes du quotidien côtoient des inventions plastiques aussi absurdes que drôles. Où l’amitié : un verre que l’on partage, l’autre recroquevillé sur sa chaise que l’on porte dans ses bras, sentiment précieux et fragile, triomphe des différences. Si Dominique Mercy, droit, aérien, s’élève pour mieux retomber alors que Joseph Nadj, lui, marche accroupi au ras du sol, tous deux ne cessent de se retrouver pour effectuer les mêmes mouvements ou se grimer de la même manière, en silence ou au son de musiques traditionnelles slaves, cambodgiennes, égyptiennes.

Petit Psaume du matin est un spectacle sensible, délicat, qui sait garder dans le charme qu’il distille – n’est-ce pas le cas de toute œuvre poétique ? – un soupçon de mystère. Comme le déclarait déjà à sa création Josef Nadj, c’est une pièce de maturité, qui met en scène la fragilité plus que la virtuosité. Ses deux interprètes y sont étincelants de grâce.

 

Petit Psaume du matin de Josef Nadj au Centre Culturel Irlandais dans le cadre du festival Paris Quartier d’été. Avec Dominique Mercy et Josef Nadj. Lundi 18 juillet 2016.

 

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