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Le Temps d’Aimer la Danse 2016 – GigaBarre et Ballet du Rhin sur pointes

Le Temps d’Aimer la Danse se tient à Biarritz jusqu’au 18 septembre. Danses avec la plume est allé se poser quelques jours au bord de l’océan pour ce festival qui mélange les genres et le public. Récit de notre première journée, dimanche 11 septembre (deux jours après l’ouverture).

Tout commence à la barre, à Biarritz aussi. La GigaBarre, grande “open barre” où tous les niveaux sont conviés, fait le plein au bord de la plage, aussi bien côté danseur.se.s que côté public. D’autant plus que le soleil est là. Et que Richard Coudray, maître de ballet du Malandain Ballet Biarritz, sait y faire pour animer cette barre géante tout en dynamisme et humour. Des professionnel.le.s, des élèves en formation pro, de simples amateur.rice.s ou des petites filles en tutu se concentrent au son du piano et des vagues. Certain.e.s. étaient à l’atelier de la Hofesh Shechter Company la veille, beaucoup sont des habitué.e.s, ça parle des spectacles passés (Barbarians de Hofesh Shechter donc, les avis sont partagés). Des surfeurs passent d’un oeil amusé. Des footballeurs, plus courageux, s’alignent pour les pliés (et ne s’en tirent pas si mal que ça). Richard Coudray explique clairement les enchaînements en multipliant les petites blagues, il démarre par un échauffement tout doux de la tête et finit par une arabesque penchée et des grands battements avec épaulements, c’est que ça bosse.

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Après la barre… le milieu bien sûr, c’est qu’il s’agit de faire un petit spectacle en 10 minutes. Le thème ? La Belle et la Bête évidemment, en référence au nouveau ballet de Thierry Malandain qui vient de partir pour la Biennale de la Danse. Les danseur.se.s du jour prennent les rôles des solistes (tous ensemble, rassurez-vous), le public est enrôlé pour faire le corps de ballet et la Bête dans un final qui provoque de joyeux fous rires. La prochaine Gigabarre, le dimanche 19 septembre, sera menée par Nicolas Le Riche et Clairemarie Osta en personne, cela ne se manque pas.

Place aux spectacles ensuite. Les lauréats du concours UPPA (concours amateur pour les étudiant.e.s) ont droit à une scène ouverte devant le Casino, dans des chorégraphies faites pour eux par la Compagnie Androphyne et la Compagnie Hors Série. Un peu répétitif pou le premier groupe, trop cliché pour le deuxième, c’est le troisième groupe qui m’emporte avec une reprise de La Mort du Cygne de Thierry Malandain par neuf danseuses. Les interprètes ont une belle énergie et une certaine technique, le ballet est toujours efficace et va bien à la jeunesse. Toute autre ambiance près du phare avec Container d’Africa Manso Asensio & Damiano Bigi. Le duo démarre à l’extérieur, avant d’entraîner le public dans un container. 20 personnes maximum, portes fermées, chaleur étouffante (dehors, c’est bien l’été), nous sommes le nez collé aux artistes. Il y a forcément la recherche de la sortie, un chemin à trouver, mais aussi une sorte d’espoir dans ce duo qui se porte l’un l’autre. Si la première partie à l’extérieur semble un peu vaine, le duo renfermé fait naître une ambiance particulière. Suite de l’après-midi, la création Alter Ego du duo Kepa Aguirre et Zam Ebale réunit le public sur la place Bellevue. Danse basque d’un côté, danse afro-contemporaine de l’autre, deux hommes aux parcours si différents qui veulent mélanger les genres. La complicité qui porte le projet est visible dans chaque mouvement, mais c’est un peu tout ce qu’il en ressort.

Container d'Africa Manso Asensio & Damiano Bigi

Container d’Africa Manso Asensio & Damiano Bigi

La soirée démarre au Casino avec Assassins de la compagnie Samuel Mathieu. Il est ici question de pouvoir, de ce que l’on est capable de faire à l’autre pour l’avoir et le garder, de ce que cette lutte change en nous. Le propos se perd régulièrement (la première partie, toute en lenteur et en danseurs.se.s qui bougent des tables, reste obscure). Mais certaines scènes fortes sont implacables et soulèvent le rapport de la personne au groupe aujourd’hui, et l’individualisme féroce qui semble dépasser la nature humaine.

La superbe La Création – Die schopfung d’Uwe Scholz, dansée par le Ballet de l’Opéra du Rhin à la Gare du Midi, finit sur une note solaire et puissante cette journée. Peu connu car peu dansé en France, Uwe Scholz était l’un des maîtres du néo-classique en Europe. Ce ballet, créé en 1985, n’a pas pris une ride (sauf les académiques si typés années 80, il faudra un jour qu’un.e costumier.ère inspiré.e trouve une solution aux académiques). Le formidable oratorio La Création de Joseph Haydn est la base et l’inspiration de la danse. La musique est une élévation vers Dieu, quoi de mieux que la danse classique, qui ne cherche que l’élévation, pour se mélanger à cette partition ?

La Création - Die schopfung d'Uwe Scholz, dansée par le Ballet de l'Opéra du Rhin

La Création – Die schopfung d’Uwe Scholz par le Ballet de l’Opéra du Rhin

Là aussi, tout démarre à la barre et en chauffe. Les interprètes reviennent en tenue de scène, en une grande ronde, le regard tourné vers le ciel. Puis la danse explose pendant deux heures. Le geste est pur, sans chichi, allant à l’essentiel et d’une puissante musicalité. Sur cet oratorio, Uwe Scholz mélange duos, solos et passages d’ensemble – spécialement réussis – rendant hommage à la technique classique et à sa force quand elle sait rebondir sur la musique. Le Ballet de l’Opéra du Rhin, qui n’est pas forcément souvent dans cette façon de danser, semble un poil juste techniquement pour rendre à sa juste valeur toute l’explosivité de l’oeuvre. Cela se ressent parfois un peu trop dans les solos masculins, certains pas de deux un peu périlleux, la technique de pointe pas toujours tout à fait naturelle. Mais d’autres choses prennent aussi le dessus, comme la force collective, la musicalité, une grande unité et écoute entre les interprètes, un geste solaire assez irrésistible.

 

Demain, place à une relecture séduisante des Forains !

 

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