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[Prix de Lausanne 2025] Rencontre avec la candidate française Camille Couton

Continuons notre tour de présentations des candidats et candidates françaises sélectionnées pour le Prix de Lausanne 2025. Après Charlie Keffert, place à Camille Couton (318). Cette jeune danseuse de 18 ans, en dernière année (DNSP3) au Conservatoire National Supérieur de Musique et de Danse de Paris, nous raconte son parcours et son travail au Prix de Lausanne.

 

Camille Couton (318), candidate au Prix de Lausanne 2025

 

Comment avez-vous démarré la danse ?

Personne dans ma famille ne danse ou ne vient d’un milieu artistique. Mais quand nous étions enfants, ma grand-tante nous poussait à faire des spectacles, à réfléchir sur des costumes, elle mettait de la musique et on dansait. Je prenais ça comme un jeu mais c’est elle qui a nourri ce goût du spectacle. J’ai commencé la danse classique à 10 ans, en loisir, à l’école Danse en Corps ! de Brigitte Lipari à Arles. Pendant deux ans, j’ai pris goût à la danse. Cet art est très précis, il nécessite beaucoup de travail. Je voulais me concentrer dessus et l’explorer. Je suis rentrée en danse-études dans cette même école pour m’améliorer. Au bout de trois ans, j’ai eu le besoin d’aller voir autre chose, d’apprendre plus, cela m’a conduit au CNSMDP. Je suis rentrée en AP, puis suis passée en DNSP1 au bout d’un mois.

 

Comment se sont passées vos trois années au CNSMDP ?

Ma première professeure a été Nolwenn Daniel. Elle m’a permis de commencer à travailler l’affinement du bas de jambe, les petits pas rapides. Puis Anne Salmon a vraiment insisté sur l’aspect technique. Avec Isabelle Ciaravola en DNSP3, c’est l’épanouissement. Elle englobe beaucoup d’aspects : on travaille la technique française de Christiane Vaussard, la grande technique, et toujours dans une recherche artistique et une exploration de soi. C’est très individuel, elle nous pousse à trouver notre propre singularité, notre propre énergie. C’est une professeure incroyable qui me fait un peu revivre dans ma danse. Lors de mes deux premières années au CNSMDP, j’ai eu des moments où je ne ressentais pas forcément de plaisir et j’ai plusieurs fois songé à changer de cursus et à passer en contemporain. Cette année, c’est un ensoleillement, je m’épanouis.

 

Comment est arrivé le Prix de Lausanne dans votre cursus ?

Petite, dès que j’ai démarré la danse, je regardais tout le temps le Prix de Lausanne. Je trouvais les candidates tellement belles ! A l’époque, c’était pour moi l’accomplissement de la danseuse que de participer au Prix de Lausanne. Je pense particulièrement à Carolyne Galvao, qui avait remporté une bourse d’étude en 2018, avec la variation de Grand pas classique. Elle était l’idole de mes 11 ans (sourire). Alors quand j’ai appris que j’étais sélectionnée, j’étais folle de joie, ce Prix a nourri mon imaginaire depuis longtemps. D’y être à mon tour est une expérience dingue : on vit plein de choses nouvelles, on a des cours avec beaucoup de nouvelles personnes, avec toujours ce truc de la compétition qui ne nous quitte pas. Même si finalement, je me dis que j’ai juste à affirmer ma personnalité et faire ce que je dois faire, plutôt que d’être dans un esprit de compétition par rapport aux autres.

 

Vous êtes au Prix depuis deux jours (ndlr : l’interview a eu lieu lundi 3 février au soir). Comment se passent vos cours de danse ?

Je me sens bien dans les cours de classique d’Élisabeth Platel, ils ressemblent aux cours d’Anne Salmon au CNSMDP. J’ai de la chance par rapport aux autres candidates d’être familière de cette technique. Même si, avec ce format du Prix de Lausanne, on est beaucoup plus en conscience et la pression se ressent pendant le cours, même sur des pas dans lesquels je suis à l’aise. J’ai beaucoup aimé les cours de danse contemporaine de Sarawanee Tanatanit, j’y ai retrouvé beaucoup de liens avec ce que l’on fait au Conservatoire. Il y a quelque chose d’assez organique dans son cours, tout est dans le délié, le poids du corps. Cela permet de faire descendre un peu le stress après le cours de danse classique.

 

Comment avez-vous choisi votre variation classique ?

J’avais très envie de faire Grand pas classique, forcément. Je l’avais déjà travaillé mais elle ne fait plus partie de la liste des variations possibles. Il y a quelques mois, j’ai abordé avec ma professeure particulière Christa Charmolu la variation de Paquita Étoile. J’en suis tombée amoureuse en la travaillant, par ce qu’elle dégageait et ce qu’elle me permettait d’explorer. Je l’ai donc choisie.

 

Comment l’avez-vous travaillée ?

Cela recoupe le travail que je fais quotidiennement avec Isabelle Ciaravola : comment me mettre en avant. On a essayé artistiquement plusieurs choses, certaines qui m’allaient mieux que d’autres. Isabelle Ciaravola m’a transmis cette variation comme elle l’a reçue de Ghislaine Thesmar. Elle m’a donné plein d’images pour nourrir mon imagination. Cette variation, c’est comme une rétrospective de la vie de Paquita. Au début, elle cueille avec innocence des fleurs, comme une enfant. Puis elle devient adolescente, elle commence à se regarder dans un miroir. Et elle atteint une certaine maturité, le port de bras est différent. C’est un peu comme si elle contemplait tous les bijoux accumulés sur son bras. J’aime beaucoup la diagonale assez lente, entièrement sur pointes, avec un très grand travail du haut du corps, des épaulés, des torsions. Et puis j’adore sur la fin le port de bras en suspension, juste avant qu’elle ne s’affirme vraiment, c’est pour moi le moment le plus magique de la variation.

 

Camille Couton (318), candidate au Prix de Lausanne 2025

 

Et pour la variation contemporaine ?

J’ai choisi Groovin de Quinn Bates, qui avait remporté le Young Creation Award l’année dernière. C’est un peu un challenge car cette variation a été faite sur un danseur, avec donc pas mal de technique masculine. Je trouvais ça intéressant de retranscrire le mouvement sur une danseuse. C’est une manière de bouger très différente et c’est justement ce qui m’attire. La musique est électro, presque du beat boxing. J’aime l’idée de passer d’une variation très classique à quelque chose de plus sauvage.

 

Au Prix de Lausanne, il y a des candidates habituées des grands concours de danse, ce qui n’est pas votre cas. Comment compenser cela ?

Dans ma première école, j’ai eu beaucoup d’expériences de concours et c’est sûr que cela apporte beaucoup. Les filles qui font beaucoup de concours, on le ressent dans leur attitude. Elles savent faire de l’effet, elles ont une très grande confiance en elles, de l’aisance. Nous, au CNSMDP, nous avons moins l’habitude de la scène. Mais nous pratiquons la technique française, qui nous donne une élégance que je trouve très belle. Si on montre ce que l’on sait faire, nous les danseurs et danseuses françaises, on sait se mettre en valeur, se mettre en avant, sans en faire trop comme peuvent le faire parfois les « bêtes à concours ». Et puis le CNSMDP forme des artistes polyvalents, on a pu expérimenter beaucoup de techniques différentes, on sait faire plein de choses. Pendant trois ans, je suis allée vers plein d’enseignements qui me nourrissent constamment.

 

Quels sont vos objectifs à Lausanne ?

Je pense que le rêve de tout le monde est d’aller en finale. Et j’ai envie de garder cette détermination. En même temps, je ne peux pas aller en cours en me disant « Il faut que cela soit parfait pour la finale« . Cela ne pourra pas marcher comme ça. « Danse comme une finaliste », je ne sais pas ce que ça veut dire. Mon plan est de danser comme je sais le faire, avec ma personnalité, d’affirmer sa singularité.

 

Quelles sont vos envies pour votre carrière ?

Aujourd’hui, j’aimerais vraiment entrer dans une compagnie ou un Junior Ballet. Je rêve de l’ABT Studio Company à New York et du Junior Ballet du Ballet de Bavière. Laurent Hilaire, le directeur de cette troupe, est président du jury d’ailleurs ! Je rêve ensuite de danser à Munich ou à l’Opéra de Paris, deux compagnies qui me font rêver. Et du rôle-titre de La Dame aux camélias de John Neumeier. J’aime beaucoup ce travail de pas de deux, l’ambiance et l’esthétique de ce ballet me touchent énormément.

 

Qu’aimeriez-vous retenir de cette semaine, quel que soit le résultat ?

Que j’ai progressé ! Que je me prouve à moi-même que je peux faire ce genre de chose, que j’ai les capacités mentales et physiques de tenir cette semaine, que je sais “me vendre” en quelque sorte. Ce Prix de Lausanne, c’est la semaine de notre vie : on vit des choses incroyables au milieu de danseurs et danseuses incroyables. J’ai des paillettes plein les yeux.

 

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Commentaires (2)

  • Bellafiore

    Très bon article qui met en valeur l’interview et l’interviewer

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  • YOUMA

    Excellent tant pour l’artiste que pour nous lecteurs. Je suis admirative face à ce travail éprouvant que réalisent ces danseurs, garçons et filles. Un immense bravo ! Persévérez, la victoire est au bout du chemin !

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