La Belle au bois dormant de Rudolf Noureev par le Ballet de l’Opéra de Paris – Qui voir danser sur scène
La Belle au bois dormant de Rudolf Noureev d’après Marius Petipa est de retour au Ballet de l’Opéra de Paris ! Plus de dix ans après sa dernière représentation, cette reprise du « ballet des ballets », comme on a l’habitude de surnommer ce classique du répertoire académique, est comme un événement, à voir jusqu’au 23 avril à l’Opéra Bastille avant une reprise en fin de saison. Attendu, peut-être avec un peu d’appréhension. Car lors de cette dernière décennie, les productions Noureev ont plutôt montré leurs faiblesses et le besoin parfois assez urgent de les retravailler. Sa Belle au bois dormant, opulente et portée par une magnifique production, comme seul peut-être l’Opéra de Paris peut en proposer, est une avalanche de variations et d’ensemble qui perd parfois un peu le fil narratif. Élément pourtant indispensable pour ne pas frôler l’indigestion. Les distributions ont toute leur importance, vue la difficulté des rôles principaux, où il faut à la fois une technique superlative, une véritable fraîcheur et la maturité de faire de tous ces pas une ode à la sublime musique de Tchaïkovski. Malgré quelques incohérences – Guillaume Diop assure presque la moitié des représentations, décidément la compagnie est en manque de solistes masculins – les distributions de cette première série sont alléchantes. Petit tour d’horizon.
La distribution qui envoie du rêve
Sae Eun Park (Aurore) et Paul Marque (le Prince Désiré) : le 28 mars, les 2, 5, 8 et 11 avril.
On ne va pas se mentir : le duo Sae Eun Park/Paul Marque semble vraiment le couple idéal pour cette reprise de cette Belle au bois dormant, tant ils portent haut la beauté de la danse académique, dans toute sa virtuosité et sa musicalité. Ils forment un duo de scène sincère et partageant beaucoup, sont à l’aise ensemble aussi bien dans Le Lac des cygnes que dans Don Quichotte. Elle ne cesse d’éblouir depuis sa nomination il y a trois ans, lui étonne à chaque nouvelle prise de rôle. Une distribution vraiment brillante.

La Belle au bois dormant de Rudolf Noureev – Paul Marque et Sae Eun Park en répétition
La distribution Prise de rôle que l’on n’attendait plus
Dorothée Gilbert (Aurore) et Guillaume Diop (le Prince Désiré) : les 18, 21 et 23 avril.
Pendant longtemps, les Étoiles de l’Opéra de Paris abandonnaient le classique passées 35 ans. Dorothée Gilbert n’est pas de cette trempe. Et à deux ans de la retraite, fait sa prise de rôle dans l’un des ballets les plus longs et difficiles. Et c’est génial ! Divine en scène dans des rôles très différents, Dorothée Gilbert aura pour elle la maturité pour proposer une Aurore plus accomplie. C’est un vrai cadeau qu’elle offre au public et ça sera à ne pas manquer. On cherche encore son alchimie avec Guillaume Diop en scène – quand on est habitué à celle qu’elle a avec Hugo Marchand, la comparaison est forcément difficile – mais la Danseuse Étoile apprécie ce danseur et lui fait confiance. On attend ce duo avec enthousiasme.

La Belle au bois dormant de Rudolf Noureev – Dorothée Gilbert en répétition
La distribution Jeunes Étoiles
Bleuenn Battistoni (Aurore) et Guillaume Diop (le Prince Désiré) : les 8 et 13 mars, les 3, 7 et 10 avril.
Ils ont le même âge, se sont suivis à l’École de Danse et dans leur parcours au sein de la compagnie, ont été nommés Étoile à un an d’écart. Ils n’ont pourtant pas dansé ensemble, plutôt associés jusqu’à présent à des artistes plus âgés. Les faire danser ensemble est pourtant une bonne idée : ils sont bien assortis, ont tous les deux une belle danse affûtée et musicale, il y a beaucoup d’éléments pour qu’ils forment ensemble un duo incontournable. Si Bleuenn Battistoni n’a pas encore dansé beaucoup de grands rôles, elle a pour elle une grande intelligence dans sa danse, propose un travail toujours réfléchi, même s’il lui manque encore comme un peu moins de discrétion. Guillaume Diop pourrait lui apporter. Lui qui a déjà découvert pas mal de rôles malgré son jeune âge semble avoir franchi une nouvelle étape avec Lenski dans Onéguine récemment, prenant un nouveau poids en scène. Un duo prometteur.

La Belle au bois dormant de Rudolf Noureev – Guillaume Diop et Bleuenn Battistoni en répétition
Les distributions Jeunes talents
Inès McIntosh (Aurore) et Thomas Docquir (le Prince Désiré) : le 11 mars.
Hohyun Kang (Aurore) et Lorenzo Lelli (le Prince Désiré) : le 14 mars.
Clara Mousseigne (Aurore) et Lorenzo Lelli (le Prince Désiré) : le 23 mars.
Est-ce que Aurore et Désiré est vraiment un cadeau pour de jeunes solistes ? Oui et non. C’est évidemment une chance extraordinaire de se frotter à de tels rôles et montrer de quoi l’on est capable. Mais, comme dit plus haut, La Belle au bois dormant demande aussi une véritable maturité. Inès McIntosh et Thomas Docquir en ont, déjà habitués aux prises de rôle. Leur unique date, s’il est réussi, pourrait rapprocher une nomination sur un prochain ballet.
À l’inverse, Lorenzo Lelli n’a quasiment aucune expérience, si ce n’est le Pas de deux des paysans dans Giselle et une prestation remarquée lors de son seul Concours de promotion. Nouvellement Sujet, il est indéniablement la prise de rôle de cette série que la sphère balletomane va suivre avec curiosité. Il est associé à deux ballerines. Hohyun Kang est absolument irrésistible depuis ce début de saison et on attend avec impatience sa prise de rôle. Dotée d’une technique fabuleuse, Clara Mousseigne a de nouveau droit à sa chance dans un rôle de premier plan, avec quelques mois un peu plus en retrait. Deux dates à suivre avec intérêt.

La Belle au bois dormant de Rudolf Noureev – Lorenzo Lelli et Hohyun Kang en répétition
La distribution Cadeau
Héloïse Bourdon (Aurore) et Thomas Docquir (le Prince Désiré) : les 22 et 31 mars.
La Belle au bois dormant fut absente si longtemps que, sur cette série, Héloïse Bourdon est la seule soliste principale à avoir déjà dansé son personnage. C’était en 2013 et à l’époque la danseuse était une Sujet prometteuse. Les années ont passé, les directions aussi. Aujourd’hui, Héloïse Bourdon ne semble plus forcément être dans les voies d’une nomination – même si ces voies sont impénétrables. Mais José Martinez continue de lui donner de temps en temps des premiers rôles, récompense aussi de tous les seconds qu’elle assure avec panache tout au long de l’année. Avec Thomas Docquir, ils forment ensemble un joli duo, qui avait fait mouche sur Don Quichotte alors qu’ils avaient eu peu de temps de répétition, ainsi que dans Casse-Noisette la saison dernière. Deux dates qui devraient réunir de nombreux balletomanes.

La Belle au bois dormant de Rudolf Noureev – Héloïse Bourdon en répétition
Les nombreux autres rôles
Plusieurs Fées, un divertissement, des personnages de caractère, l’Oiseau bleu et Florine… La Belle au bois dormant est vraiment le ballet qui permet à chacun de s’exprimer, avec de nombreux rôles secondaires brillants. Les distributions semblant toutefois un peu instables, nous n’allons pas faire un point précis date par date. Mais focus cependant sur quelques-uns.
L’Oiseau bleu est le plus emblématique de ces pas de deux, parfois dansés par des Étoiles. Et de belles distributions vont s’y succéder. Ne manquez pas le 28 mars et 2 avril Shale Wagman, danseur absolument fabuleux entré dans la compagnie en septembre, associé à Inès McIntosh, avec qui il danse régulièrement en gala. On se réjouit aussi d’y voir la jeune Hortense Millet-Maurin avec Aurélien Gay, les Solistes Marine Ganio et Antoine Kirscher, Chun-Wing Lam, Luna Peigné… C’est sur chaque date diablement séduisant.
Dans le rôle joué de Carabosse, Sarah Kora Dayanova fait son grand retour en scène, et on n’y manquera pas non plus Katherine Higgins, toujours très douée pour ces rôles de caractère. Éléonore Guérineau devrait être irrésistible en Chatte blanche, on y suivra aussi Enzo Saugar. Le pas de cinq met en scène des Sujet brillants et expérimentés… Bref, beaucoup de talents vont avoir leurs chances durant cette série.

La Belle au bois dormant de Rudolf Noureev – Marine Ganio (Princesse Florine) en répétition