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Conseil Nutrition – Retrouver une relation apaisée avec son corps et son alimentation

Si le confinement est terminé, les compagnies de danse ne reprennent qu’avec parcimonie et la plupart des écoles de danse restent fermées jusqu’en septembre. C’est donc le bon moment pour développer ses projets, se mettre à d’autres pratiques, comme vous l’avez peut-être déjà fait depuis mars. Et si cette période si particulière était aussi le bon moment pour retrouver une relation plus apaisée avec son corps et son alimentation ? Activité à la fois sportive et artistique, la danse exige performance, aptitude technique et une sélection exigeante par la silhouette, avec une certaine vénération de la minceur. Les danseur.se.s sont soumis.es au maintien d’un poids requis qui peut dévier vers un contrôle trop exigeant et des troubles du comportement alimentaire. Il est primordial dans ce contexte de veiller à rétablir une relation au poids et à l’alimentation harmonieuse. Et cette période où l’on a plus de temps pour soi peut être le bon moment pour faire le point.

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Bien souvent, dès le concours d’admission à l’école de danse, les danseurs et danseuses s’astreignent un régime particulièrement restrictif pour atteindre et conserver un poids inférieur à leur poids physiologique. Cette restriction cognitive dérègle les mécanismes naturels de contrôle de la faim et peuvent générer des pertes de contrôle (crises de boulimie ou d’hyperphagie, grignotages compulsifs…) et des conduites de compensation (prise de diurétiques, de laxatifs, vomissements, hyperactivité…). Les troubles peuvent également apparaitre à l’arrêt de la danse, quand le renoncement est subi et non choisi, et ce après des années d’investissements.

 

Des conséquences psychologiques

La confiance en soi et l’image du corps sont alors fragilisés avec une insatisfaction permanente et une distorsion (dysmorphie) : on se sent et on se voit gros même si on est normal ou maigre.

Le comportement alimentaire sert de soupape aux tensions intérieures et aux conflits avec le monde extérieurs (les parents, les amis, l’enseignement). Ainsi la fragilité intérieure tend à augmenter si on se contraint trop au paraître qu’impose la danse et que l’on ne peut exprimer son angoisse : hyperémotivité, anxiété, risque de repli sur soi, d’isolement.

 

Des retentissements sur la performance sportive

– de la fatigue, des vertiges.

– une mauvaise qualité de la fibre musculaire par carence protidique pouvant générer des blessures (fragilité tendino-musculaire).

– des anémies et carences nutritionnelles, notamment en vitamines, qui perturbent la récupération et l’endurance.

Mais aussi des incidences sur la santé si cela est plus grave :

– un risque de déminéralisation osseuse avec fractures de fatigue, voir même d’ostéoporose ultérieure.

– un ralentissement de la courbe de croissance et même un risque d’impact sur la taille définitive.

– des troubles de la puberté et de la fertilité.

 

Respecter ses besoins

Les jeunes danseurs et danseuses doivent mener de front les études chorégraphiques et scolaires avec un manque de sommeil, des horaires irréguliers et comprimés qui déstabilisent les temps de repas, mais il n’est pour autant pas légitime de jeûner ou sauter des repas lorsque l’on est pratiquant sportif.

Les besoins énergétiques sont supérieurs à la population, surtout à l’âge de l’adolescence où ils doivent également couvrir les besoins de croissance. Si une perte de poids est nécessaire, il faut l’inscrire dans la durée, de façon très progressive afin de ne pas générer de carences. Ensuite, les besoins énergétiques doivent être couverts à la hauteur des dépenses (au moins 2.000 kcal/jour chez l’adulte). Les féculents (lentilles, patate douce, pois chiche, pain complet, quinoa…) doivent être présents à chaque repas en quantité adaptée pour soutenir l’effort et éviter les coups de pompe.

L’apport lipidique (le gras) reste essentiel et participe également à la qualité de la peau en maintenant des huiles et oléagineux de bon profil nutritionnel riches en acides gras saturés et vitamine E (colza, noisette, noix, amandes…). Les protéines nécessaires aux muscles doivent être présentes également à chaque repas, à raison d’environ 1,5g/kg de poids corporel via les produits laitiers, les légumineuses, le tofu, les œufs, viandes et poissons.

 

Pratiquer une alimentation intuitive

Pour apaiser notre rapport souvent conflictuel à la nourriture,

 – Différenciez la faim de l’envie de manger par ennui, par anxiété, tristesse ou colère… Substituez des activités réconfortantes au grignotage : méditation, bain, lecture, danse, et une boisson chaude peuvent vous permettre d’attendre le repas suivant.

– Evitez les extrêmes : oui au cheat meal ou au goûter gourmand mais sans finir le paquet ou dévorer dans l’excès, pour éviter d’avoir à compenser dans l’hyper-contrôle les jours suivant.

– Renouez avec vos sensations : écouter sa faim, savoir d’arrêter de manger lorsqu’on est rassasié… Mangez en toute conscience et sans perturbateurs extérieurs comme les écrans, lentement pour être attentif à ses sensations et savoir se demander si on a encore faim avant de finir son assiette ou se resservir.

– Faite la paix avec la nourriture, ne vous interdisez pas certains aliments sinon ils risquent de se transformer en pulsion. Intégrez-les avec parcimonie dans votre alimentation pour ne pas les rendre objet de convoitise.

– Faites un recadrage alimentaire. Prendre soin de son alimentation, c’est une philosophie, un art de vivre. Il faut travailler sur ses croyances pour que l’alimentation saine ne soit pas vue comme une contrainte et modifier profondément son comportement alimentaire, sans faire un régime passager.

 

Savoir lâcher prise

Sans tomber dans un état pathologique, de nombreux.ses danseur.se.s pratiquent l’orthorexie qui se caractérise par une préoccupation exagérée de la nourriture saine. En tant que sportif, il est normal de contrôler son alimentation, cela fait partie de l’entraînement. Mais sachez également retrouver du plaisir alimentaire quand vous avez faim, en supprimant la culpabilité et en relativisant certaines entorses, en arrêtant de compter les calories, de toujours anticiper.

 

Identifier les déviances

Ce temps de recul imposé par l’arrêt des activités en cette période est l’occasion de prendre du recul sur son alimentation et certains signes doivent alerter : une perte rapide ou trop importante de poids, une obsession du contrôle du poids ou du régime, une distorsion de l’image du corps, une consommation excessive d’eau comme coupe-faim, le rejet de certains groupes d’aliments (matière grasse, féculents…), une alimentation trop recentrée (laitages natures et légumes verts exclusifs…), des attitudes de tri dans l’assiette, des repas décortiqués ou consommés vraiment trop lentement… Des professionnels (nutritionnistes, psychologues, médecins…) peuvent vous aider à enrayer ces comportements, dangereux pour votre santé.  

C’est aussi de la responsabilité de l’entourage d’observer sans juger, mais de tendre la main : parents mais aussi conjoint.e, amis, camarades, professeurs et enseignants. Plus ces comportements sont pris en charge tôt, plus ils seront faciles à enrayer et en limitant les répercutions ultérieures. 





 

 

Commentaires (1)

  • Bonjour,
    C’est un plaisir de lire tous vos articles. Je suis médecin, spécialisée dans les TCA. Merci d’avoir écrit sur ce sujet. Si vous souhaitez en savoir plus ou trouver un professionnel spécialisé, vous trouverez les informations sur le site de la fédération française anorexie boulimie : https://www.ffab.fr/
    Il existe également une ligne téléphonique “Anorexie Boulimie, Info écoute”, avec différents professionnels disponible selon le créneau horaire (0810037037).
    Bonne journée à tous. En souhaitant que les salles de danse rouvrent bientôt !

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