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Bilan 2021 de la Danse – Le Top 5 de la rédaction

2021, encore une année amputée. La saison n’a ainsi véritablement démarré qu’en juin, et décembre a été pour le moins chaotique. Mais pendant ces quelques mois d’ouverture, la danse a fait battre les coeurs et les esprits. Moments de création, d’émotion, de retrouvailles, de surprises… Le Top 5 des spectacles de danse de 2021 par la rédaction de DALP. Et haut les coeurs pour 2022 ! 

 

Le Top 5  d’Amélie Bertrand

1 – Time to tell de Martin Palisse et David Gauchard (Circa)

2 – The Barre Project de William Forsythe 

4 – Les Autres de Kader Attou

5 – Roméo et Juliette de Rudolf Noureev avec Mathias Heymann et Myriam Ould-Braham

2 – Le Lac des Cygnes de Florence Caillon – Compagnie L’Éolienne

Un Top 5 de 2021 est bien difficile à faire pour moi, tant les spectacles n’ont pas été franchement présents dans mon agenda. Une première depuis bientôt quinze ans… et j’espère la dernière ! Il y eut d’abord ce long hiver de couvre-feu, puis un heureux événement arriva chez moi à la fin du printemps, le jour de la réouverture des théâtres, décalant quelque peu ma rentrée Danse. Moins attendu et dont je me serais bien passée, un confinement Covid + me priva enfin des spectacles de Noël. Bref ! Quand ça ne veut pas, ça ne veut pas. Mais quelques beaux rendez-vous de danse et de cirque, en live ou par écran, ont marqué mon année 2021.

Time to tell de Martin Palisse et David Gauchard

Ce long hiver 2021 fut ponctué par quelques spectacles réservés aux professionnel.le.s. Si l’on comprend l’intérêt pour les troupes de les montrer tout de même (visibilité, aboutissement du travail), s’est posé la question, pour nous journalistes, de comment en parler. Comment parler de spectacles que le public ne pourra pas voir avant plusieurs mois, qui seront sûrement transformés d’ici là ? Comment parler de spectacles se jouant devant une salle vide ? Cette saison nous aura fait pleinement (re)prendre conscience que le spectacle vivant n’est pas juste une proposition artistique, mais c’est aussi l’odeur d’un théâtre, le murmure du public, l’électricité dans l’air.  Il y avait justement tout cela au Festival Circa à Auch, cet automne, rendez-vous incontournable du cirque contemporain, où j’ai découvert cette année le solo Time to tell de Martin Palisse et David Gauchard. Martin Palisse est jongleur. Il est aussi atteint de mucoviscidose. Pour la première fois, l’artiste raconte sa maladie en scène, ponctué par son talent fascinant du jonglage où tout est dans la précision, le grain de poussière, le souffle. Martin Palisse parle de lui, de sa maladie et ses difficultés. Mais aussi comment la science lui permet non seulement de vivre – il a 39 ans – mais aussi de vivre mieux. Ses dernières paroles du spectacle résonnent au diapason de cette année à venir : La science est là. Il n’y a pas à y croire ou à ne pas y croire. Il y a à lui faire confiance“. 

Dans les coups durs, William Forsythe est toujours là. Son film de danse The Barre Project, mené tambour battant par la sublime Tiler Peck, est une pépite d’inventivité, de virtuosité, d’humour… et de bonheur de danser. En plein hiver des salles fermées, ce petit bijou a été une bouffée d’air frais, que l’on espère voir un jour en scène ! Les Autres de Kader Attou, vu à la rentrée, fait aussi partie des “feel-good spectacles”. Une poésie bizarre, un humour noir, une drôle d’absurdité : le chorégraphe et ses interprètes nous emmènent dans une sorte de monde parallèle, un peu comme nous mais pas tout à fait, où l’on s’évade, l’on rit et l’on s’étonne. Une jolie réussite qui rassemble. Sur écran cette fois-ci, Mathias Heymann et Myriam Ould-Braham, le couple le plus attachant de l’Opéra de Paris, m’a encore une fois embarquée dans l’amour impossible de Roméo et Juliette de Rudolf Noureev. Tout est juste chez nous, tout coule de source, tout est sincère. Et tout le reste de la distribution fut au diapason, en particulier Stéphane Bullion (Tybalt). Enfin vu à la Biennale Internationale des Arts du Cirque de Marseille, Le Lac des Cygnes de Florence Caillon par la Compagnie L’Éolienne, la première relecture circassienne du chef-d’oeuvre de Marius Petipa, fut une belle surprise. La chorégraphe a su se créer sa propre écriture du mouvement tout en disséminant quelques clins d’oeil au célèbre ballet, sachant à la fois le citer et en prendre ses distances.  

The Barre Project de William Forsythe

 

Le Top 5 de Jean-Frédéric Saumont

1 – Transverse Orientation de Dimitris Papioannou

2 – Damien Jalet

3 – Inicio (Uno)/Al Fondo Rielo (Lo Otro del Uno) de Rocío Molina

4 – Complètement jetés de François Alu

5 – Sharon Eyal

Transverse Orientation de Dimitris Papaioannou

Comme à l’accoutumée, ce n’est nullement un classement mais l’ordre chronologique dans lequel j’ai vu ces spectacles. Transverse Orientation de Dimitris Papaioannou devait voir le jour dans la Cour d’honneur du Palais des Papes à Avignon à l’été 2020. Empêché comme beaucoup de spectacles par la pandémie, c’est donc à Montpellier Danse que l’on a découvert ce nouvel opus, plus complexe que le précédent The Great Tamer. Mais tout aussi impressionnant tant par la maîtrise du propos que la mise en œuvre d’allégories puisées dans la mythologie. Dimitris Papaioannou est un maître d’aujourd’hui, héritier majeur de la danse théâtre. Damien Jalet nous a offert deux pièces cette année, elles aussi retardées. D’abord Brise-lames, vue trop brièvement pour l’unique représentation du gala de l’Opéra de Paris, qui reprendra probablement cette création qui appelle évidemment le public. Ambiance crépusculaire d’une pièce créée sous pandémie qui offre l’une des plus grandes réussites de l’Opéra de Paris. Au Théâtre Chaillot ensuite, flanqué du plasticien Kohei Nawa, Planet (Wanderer) a ouvert en majesté la nouvelle saison. Damien Jalet est en recherche perpétuelle et son parcours tout autant métaphysique que poétique est l’un des plus passionnants de l’époque. Le chorégraphe franco-belge sait comme personne nous parler d’aujourd’hui, des désastres annoncés sans pathos mais en les transcendant pour en faire des objets esthétiques.

Rocio Molina et Rafael Riqueni – Inicio (Uno)

C’est aussi à Chaillot que l’on a retrouvé Rocío Molina, et de quelle manière ! Son projet de dialoguer avec la guitare pour une trilogie, dont on a vu les deux premiers volets, met en lumière une danseuse phénoménale. Au-delà du flamenco qu’elle a depuis longtemps subverti et sublimé, elle se crée une chorégraphie sur mesure dévoilant une danse sublime, qui n’est déjà plus du flamenco mais bien autre chose. Rocío Molina a émerveillé le Théâtre de Chaillot. Quant à François Alu, ce n’est plus hélas dans les distributions de l’Opéra de Paris qu’il faut le traquer puisque la Direction de la Danse semble ignorer son talent. Par chance, le Premier Danseur a mis à profit ces temps compliqués pour concocter avec la complicité de Samuel Murez le seul en scène ébouriffant Complètement jetés ! C’est dans doute le premier stand-up chorégraphié de l’histoire de la danse. C’est drôle, cruel, tendre. Surtout, l’on y voit François Alu enchaîner à train d’enfer variations classiques et détours hip-hop avec la manière, en pleine possession de ses capacités techniques et toujours aussi bluffant comme interprète. On l’attend de pied ferme à l’Opéra ou ailleurs. Enfin, le Palais Garnier fut la dernière étape de Sharon Eyal qui nous a épaté tout au long de l’année. À Montpellier Danse cet été pour son Histoire de l’Amour avec Chapter 3, transe joyeuse et hypnotisante. Puis au 104 avec Soul Chain pour la compagnie allemande Tanzmainz . Enfin, ne reculant devant aucun obstacle, Sharon Eyal prit de front Prélude à l’après-midi d‘un faune pour en faire l’une des plus belles pièces d‘ensemble de l’Opéra de Paris, rebaptisé du coup Faunes, illuminant un programme chaotique méchamment perturbé par le Covid et joué bien trop souvent sur une musique enregistrée. Mais même dans ces conditions, Sharon Eyal et son groupe de danseuses et danseurs de l’Opéra de Paris nous ont offert un beau moment d’émotion et une pièce d’une infinie beauté.

 

Le Top 5 de Claudine Colozzi 

1 – Programme hommage à Roland Petit et les adieux de Eleonora Abbagnato

2 – Mille et une danse (pour 2021) de Thomas Lebrun

3 – Festival Arte Flamenco à Mont-de-Marsan

4 – Complètement jetés ! de Samuel Murez et François Alu

5 – West Side Story de Steven Spielberg

Les adieux d’Eleonora Abbagnato

Après une année 2020 quasi blanche et un début d’année 2021 tout aussi maussade, la vie a refleuri dans les lieux culturels à partir de la mi-mai sans que l’on y croie vraiment. Impatiente de sortir de cette hibernation prolongée, j’ai repris le chemin des salles et la route des festivals. Il y a bien eu en mars quelques présentations à huis clos comme la captation de Notre-Dame de Paris de Roland Petit à l’Opéra Bastille avec Amandine Albisson et Stéphane Bullion ou Le Parc d’Angelin Preljocaj au Palais Garnier avec Alice Renavand et Mathieu Ganio. Mais j’ai pris pleinement conscience durant ces deux dernières années que ce qui compte lorsque j’assiste à un spectacle est de sentir le public à mes côtés. De la vie sur scène mais aussi dans la salle.

Les adieux d’Eleonora Abbagnato, moult fois ajournés, ont constitué l’un des temps forts de la fin de cette si étrange saison 2020-2021 de l’Opéra de Paris, tout comme la nomination de Sae Eun Park. L’une a tiré sa révérence, la seconde a vu sa belle trajectoire couronnée par un titre mérité. Certain.e.s ont pu juger peu délicate la quasi simultanéité de ces deux événements sans toutefois remettre en question la pertinence de cette nomination.

Retrouver le chemin des festivals a pris une saveur toute particulière après des mois de disette. Quel bonheur de voir que malgré des conditions de travail difficiles et l’éloignement des scènes, les chorégraphes ont continué de créer. Épopée festive et foisonnante à travers la danse du XXe siècle, Mille et une danses (pour 2021) de Thomas Lebrun, créée lors de la 41e édition de Montpellier Danse, ne pouvait trouver meilleur écrin que ce festival. 2021 a été aussi l’année des premières fois puisque je n’étais jamais allée au Festival Arte Flamenco de Mont-de-Marsan. Grâce à Farruquito et Manuela Carrasco, entre autres, la magie a opéré à ciel ouvert dans une atmosphère empreinte de la ferveur des retrouvailles. La langue magnifique du flamenco a été le trait d’union entre le public et les artistes.

François Alu – Complètement Jetés!

Evidemment comment ne pas évoquer François Alu dont les choix ont fait beaucoup jaser dans la balletosphère durant cette année 2021. Son seul-en-scène Complètement jetés ! a affiché complet. La joie de le retrouver sur scène, dans un exercice inédit (mais qui trouvera peut-être un jour ses limites) le disputait au regret de ne pas le voir revêtir le costume de Basilio. En feu d’artifice de fin d’année, la tant attendue relecture de West Side Story par Steven Spielberg a mis presque tout le monde d’accord. Sublimés par la caméra virevoltante du réalisateur, les numéros musicaux notamment les plus cultes, sans faire oublier la version d’origine, m’ont impressionnée par leur maîtrise. Aucun chef-d’œuvre n’est intouchable, y compris WSS !

 




 

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