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Mayerling de Kenneth MacMillan par le Ballet de l’Opéra de Paris – Qui voir danser sur scène

Mayerling de Kenneth MacMillan arrive au répertoire du Ballet de l’Opéra de Paris, à voir du 22 octobre (avant-première jeune) au 12 novembre au Palais Garnier. Voilà un ballet complexe, autant dans l’histoire qu’il raconte que par sa technicité, notamment dans les portés, l’évolution psychologique des personnages et la dureté de certaines scènes. Au-delà du duo Rodolphe-Mary, l’œuvre offre une dizaine d’autres rôles, puissants et virtuoses, et demande sur scène de nombreux solistes aguerri-e-s. Les distributions y ont ainsi toute leur importance pour porter ce ballet dans toute sa complexité, autant pour chaque rôle en soi que pour l’équilibre global du casting.

Mayerling de Kenneth MacMillan – Mathieu Ganio et Ludmila Pagliero en répétition

 

En préambule

Rodolphe, le rôle principal masculin, est particulièrement éprouvant pour le danseur. Il demande d’être en scène quasiment en permanence durant les trois actes, enchaînant des variations techniques et six grands pas de deux parfois acrobatiques. La compagnie qui danse ce ballet, pour tenir toute la série, se doit donc d’avoir de nombreuses Étoiles expérimentées pour se saisir du rôle, d’autant que plusieurs seconds rôles accaparent déjà Solistes et Premiers danseurs. Ce n’est pas forcément le cas du Ballet de l’Opéra de Paris en ce moment, qui continue d’avoir un déficit d’Étoiles masculines. D’autant plus que la programmation de cette série est intense, avec un nombre important de représentations sur trois semaines, quasiment sans pause, ce qui rend d’autant plus compliquée la gestion des blessures. On ne peut regretter à ce titre que François Alu n’ait pas souhaité le danser, d’autant plus qu’il semble taillé, par ses qualités théâtrales, à s’emparer de ce genre de rôle. Néanmoins, les quatre distributions affichées mettent en scène des personnalités très différentes, à des stades opposés de leur carrière. Et il sera intéressant de voir comment chacun se saisit de Rodolphe. Homme fou, ultra-sensible, violent, toxique, amoureux… Il y a de multiples façons de s’emparer de ce personnage, l’un des plus intenses rôles masculins du répertoire néo-classique.

Mayerling de Kenneth MacMillan – Stéphane Bullion et Hannah O’Neill en répétition

Les distributions de Mayerling

Hugo Marchand (Prince Rodolphe), Dorothée Gilbert (Baronne Mary Vetsera), Hannah O’Neill (Comtesse Marie Larisch), Silvia Saint-Martin (Princesse Stéphanie), Yann Chailloux (Empereur Franz Joseph), Laura Hecquet (Impératrice Elizabeth), Valentine Colasante (Mitzi Caspar) et Marc Moreau (Bratfisch) : les 22, 25 et 28 octobre, les 3, 8 et 11 novembre.

Pour la première, voilà une distribution de grande classe et qui semble équilibrée. Hugo Marchand a acquis une épaisseur dramatique qui lui donne les épaules du rôle, Dorothée Gilbert est toujours aussi entière dans ses interprétations, et surtout les deux ont l’habitude de danser ensemble et ont une grande confiance mutuelle. Indispensable pour ce ballet ! Hannah O’Neill, Laura Hecquet ou Valentine Colasante assurent les forts rôles secondaires et semblent toutes distribuées selon leur emploi naturel, là où elles brillent le plus. En retrait la saison dernière, pas techniquement mais plus dans le jeu, Silvia Saint-Martin a là une belle occasion de montrer ses qualités dramatiques. Yanna Chaillou et Marc Moreau, là encore deux danseurs expérimentés, complètent un casting où des personnalités bien différentes semblent toutes trouver leur place.

Mayerling de Kenneth MacMillan – Hugo Marchand et Dorothée Gilbert en répétition

Mathieu Ganio (Prince Rodolphe), Ludmila Pagliero (Baronne Mary Vetsera), Laura Hecquet (Comtesse Marie Larisch), Éléonore Guérineau (Princesse Stéphanie), Yann Chailloux (Empereur Franz Joseph), Héloïse Bourdon (Impératrice Elizabeth), Bleuenn Battistoni (Mitzi Caspar) et Andréa Sarri (Bratfisch) : les 26 et 29 octobre, les 4, 9 et 12 novembre.

Mathieu Ganio est un danseur qui se plaît dans ces fresques narratives – qui a pu publier son Onéguine ? Et on l’imagine bien donner un autre regard à ce personnage, peut-être dans une veine plus sensible, plus romantique. Il est intéressant de le voir en parallèle de Hugo Marchand, tant leur interprétation pourrait être différente. L’associer avec Ludmila Pagliero, une danseuse qui le met en confiance, est là aussi une bonne idée, ils forment un duo équilibré. Et peut-être l’occasion pour l’Étoile de nous montrer une autre facette de sa personnalité, plus séductrice, plus tourmentée ? Le duo paraît presque un peu trop sage, mais leur complémentarité et leur maturité artistique peuvent amener autre chose. Le reste de la distribution semble équilibrée et donne leur chance à de belles et expérimentées personnalités. On ne manquera pas ainsi Éléonore Guérineau qui pourrait être une époustouflante Stéphanie ou Francesco Mura qui revient enfin à un rôle de premier plan. Et Bleuenn Battistoni, après sa prise de rôle réussie en Gamzatti et sa Giselle de dernière seconde la saison dernière, a droit de nouveau à une belle opportunité.

 

Paul Marque (Prince Rodolphe), Hohyun Kang (Baronne Mary Vetsera), Héloïse Bourdon, (Comtesse Marie Larisch), Marine Ganio (Princesse Stéphanie), Grégory Dominiak (Empereur Franz Joseph), Roxane Stojanov (Impératrice Elizabeth), Éléonore Guérineau (Mitzi Caspar) et Marc Moreau : le 27 octobre et 1er novembre. Axel Magliano (Bratfisch) : le 7 novembre.

La distribution la plus surprenante de cette série. Paul Marque a une magnifique progression depuis son titre d’Étoile. Mais on ne peut s’empêcher de penser que cette prise de rôle de Rodolphe arrive peut-être un peu tôt. Il devait au départ avoir le rôle de Bratfisch, ce qui était une excellente idée : un second rôle virtuose idéal pour une première fois dans un ballet de Kenneth MacMillan. C’est là que l’on sent un peu la raréfaction des Étoiles masculines. Mais le danseur a le courage de l’endosser et il pourrait créer la surprise. Même interrogation pour Hohyun Kang, magnifique et talentueuse danseuse mais qui n’a aucune expérience d’un premier rôle. Et celui de Mary Vetsera pour se lancer, on ne sait pas si c’est vraiment un cadeau. Le duo doit aussi apprendre à se connaître, ce n’est pas une mince affaire dans ce ballet. Néanmoins, le reste de la distribution met là encore en avant des artistes accomplis. On aime déjà Héloïse Bourdon en Comtesse Marie Larisch, Marine Ganio en Stéphanie ou Éléonore Guérineau en Mitzi. Il faut ensuite que tout le monde trouve sa place. Cette distribution a peu de dates et assez espacées entre elles, ce qui laisse le temps de travailler et de peaufiner les rôles. L’on peut imaginer une certaine évolution entre la première et la dernière soirée.

Mayerling de Kenneth MacMillan – Paul Marque et Hohyun Kang en répétition

Stéphane Bullion (Prince Rodolphe), Hannah O’Neill (Baronne Mary Vetsera), Héloïse Bourdon, (Comtesse Marie Larisch), Charline Giezendanner (Princesse Stéphanie), Grégory Dominiak (Empereur Franz Joseph), Camille Bon (Impératrice Elizabeth), Roxane Stojanov (Mitzi Caspar) et Nikolaus Tudorin (Bratfisch) : le 2 novembre. Avec Andrea Sarri (Bratfisch) : le 5  novembre. Avec Jack Gasztowtt (Bratfisch) : le 10 novembre.

Mayerling semble avoir fait son entrée au répertoire pour Stéphane Bullion (le ballet était initialement programmé en 2020, annulé par le confinement et décalé de quelques saisons). C’est peut-être le danseur que l’on imagine le mieux dans ce rôle, artiste accompli, forte personnalité et qui sait montrer tellement de choses dans ces rôles narratifs – qui a oublié son Armand ? C’est un plaisir de le revoir une dernière fois et un beau cadeau pour lui de le laisser s’emparer de ce rôle mythique. Et tout autant un plaisir de voir Hannah O’Neill en May, danseuse en retrait ces dernières années et qui a là une chance immense. La question est plutôt sur le duo, comment va-t-il s’accomplir en scène et dans la technicité des pas de deux ? L’on guettera aussi Charline Giezendanner, là encore enfin de retour sur le devant de la scène avec un rôle puissant, tandis qu’on aurait bien échangé les rôles de Camille Bon et Roxane Stojanov. Sur le papier, une distribution qui tente surtout pour ses premiers rôles que pour son équilibre, mais tout est possible en scène.

 

Et vous, quelle distribution allez-vous voir ? Laquelle vous tente le plus ?

 



Commentaires (10)

  • Martine

    Je vais applaudir Hugo Marchand et Dorothée Gilbert le 3.
    Je rêve de voir ce magnifique danseur depuis longtemps. Son physique élégant allié à la grâce de Dorothée Gilbert me promettent un ballet extraordinaire.

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  • Florence Luxen

    Bonjour, je vais voir Mayerling le 28 octobre avec Hugo Marchand , Dorothée Gilbert, et tous les autres danseurs Valentine Colasante, Sylvia Saint Martin…..
    Je vous donnerai mes impressions . Je pense que cela va etre une soirée inoubliable!
    Moi aussi je reve de pouvoir applaudir Hugo Marchand . Quant á Dorothée Gilbert c´est une danseuse magnifique par sa technique mais aussi par l´émotion dans laquelle elle nous entraine.

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  • Léa

    Gilbert / Marchand pour moi aussi. C’est top !! J’aurais bien aimé voir Mathieu Ganio que j’adore….ainsi que Ludmila Pagrliero. Je m’inquiète surtout de la capacité physique de Ganio à tenir ce rôle et à le tenir dans la durée, après le gros coup dur de son abandon précoce dans le Rouge et le Noir. Je crois les doigts !! Gros gâchis pour Alu mais c’est un sujet en soi, visiblement sa nomination a généré d’autres problèmes…

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  • MSG

    Quelqu’un sait pourquoi Sae Eun Park n’est distribuée nul part ? Ni Mayerling ni Lac des cygnes ?

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  • Agrippine

    J’ai vu Mayerling à Paris mercredi dernier avec Ganio/Pagliero.
    Mathieu Ganio a été très impressionant, par moment fragile, très touchant (surtout dans le dernier pas de deux, absolument magnifique). Le partenariat avec Ludmila Pagliero a très bien marché. Elle a incarné une Mary Vetsera un peu espiègle, un peu naïve mais aussi sûre d’elle et de ce qu’elle veut, j’ai bien aimé.
    L’impératrice Élisabeth d’Héloïse Bourdon était superbe, altière, la danse d’une légèreté étonnante.
    Laura Hecquet en Comtesse Marie Larisch magnifique aussi et à ne pas oublié la Mizzi Caspar de Bleuenn Battistoni à qui ce rôle allait comme un gant, j’ai été conquise.
    Andréa Sarri a été un Bratfisch touchant et les 4 officiers tous très élégants et puissants.
    Bravo aussi aux ateliers costumes et décors.

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  • AnSo

    Je vais voir Hugo et Élisabeth, je trépigne !!!

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  • Je vais voir Paul Marque/Hohyun Kang demain, distribution que m’a réservée mon abonnement. Je n’aurais parut-être pas choisi celle-là en premier, mais je suis très curieuse de revoir Paul Marque, qui ne m’avait que moyennement convaincue en Roméo, et de découvrir sa partenaire dans un grand rôle. J’aurais cependant adoré voir aussi Hugo et Dorothée, couple toujours très juste et intense, Stéphane Bullion, magnifique Armand de la Dame, Ludmila et Mathieu, que j’aime beaucoup l’un et l’autre… Bref, j’aurais aimé les voir tous !

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  • Lot

    Hohyun Kang était brillante hier. Le casting est plus que compréhensible, elle brillait – absolument sublime. Stojanov faisait aussi une Sissi merveilleuse. Par contre, pas du tout convaincu par Marque qui m’a semblé avoir quelques moments de maladresse et avait peut-être un peu plus de mal à capter l’attention que ses partenaires.

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  • Florence

    Bonjour,
    Après avoir vu Paul Marque hier soir, je partage votre avis … le rôle vient peut-être un peu tôt pour lui … !
    En revanche, j’ai trouvé Hohyun Kang très gracieuse, talentueuse et pleine de promesses pour sa carrière.

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  • Dancing Crow

    J’ai vu plusieurs distributions dont Stéphane Bullion & Hannah O’Neill. Un privilège du fait qu’il y ait eu que 2 représentations (sur 3) avec ce couple éblouissant.
    M. Bullion était un peu fébrile au niveau des appuis et un peu raide dans la première partie de l’acte I. Puis toute sa dextérité comme partenaire expérimenté et attentionné s’est dévoilé sous nos yeux. Passionné mais avec une certaine pudeur latente témoignant du respect du corps et de la personne qu’il “manipule”. Au IIe et IIIe acte, tout son corps s’est complètement délié pour faire place à des sauts amples et des mouvements fluides. Le passage des fentes avec le crâne donnait des frissons… Son interprétation était complexe mais très lisible. Sa folie prend totalement possession de lui lors de la scène du feu d’artifice où il découvre sa mère batifoler avec son amant.
    M. Bullion nous a totalement transporté dans sa détresse et son désespoir.
    Un Rodolphe inoubliable…
    Triste pour lui qu’il n’a pas pu faire un dernier adieu sur scène à Garnier…

    Quant à Mlle O’Neill, elle a assumé le rôle de Mary si technique et effrayant magistralement. En confiance avec son ténébreux partenaire, elle a déployé ses magnifiques lignes longilignes et a démontré sa technique impeccable. Elle était peut-être un peu en retrait par moment sur l’expressivité mais revenait en force quand il le fallait tantôt juvénile tantôt fatale.
    C’est sûr, c’est une étoile montante!

    Petite mention spéciale pour Andréa Sarri, le plus dégourdi des Bratfisch!

    En résumé, mon couple favori de toute la série.

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