Un avant-goût de La Sylphide
Ecrit par : Amélie Bertrand
Le ballet La Sylphide sera donné au Palais Garnier dès le 22 juin. Une répétition publique a eu lieu le 8 juin dernier, avec deux jeunes Sujets qui assureront quelques représentations : Amandine Albisson et Yannick Bittencourt. La séance de travail a été conduite par Laurent Hilaire, jamais avare d'une petite blague (parfois pas très fine) pour faire rire le public, mais grand connaisseur de l'oeuvre, et aux remarques passionnantes. La cheffe de chant était Elena Bonnay.
Laurent Hilaire commence tout d'abord par évoquer cette version de La Sylphide, remontée par Pierre Lacotte, expliquant que c'est une légère désynchronisation entre le haut et le bas de la danseuse qui donne aux Sylphides cet aspect de légèreté.
Amandine Albisson et Yannick Bittencourt danseront La Sylphide à la fin de la série, courant juillet. Il leur reste donc un mois pour apprendre et peaufiner leur rôle. Ils en sont donc relativement au début de leur préparation. Ils ont appris les pas, il faut mettre maintenant mettre les choses en place, approfondir leur personnage et les émotions. Pour cette séance de travail, Laurent Hilaire a choisi de leur faire travailler le pas de deux final. James a obtenu un voile pour faire tomber les ailes de la Sylphide, qu'elle ne puisse ainsi plus s'enfuir. Il veut la garder pour lui. Elle est intriguée par le voile, elle cherche à l'avoir. Le pas de deux est un jeu entre eux deux, James faisant semblant de résister et la Sylphide courant après ce voile. Elle finit finalement par l'attraper, mais le voile, en lui coupant les ailes, la tue.
Ce pas de deux a de nombreuses difficultés : la technique, la pantomime qu'il faut rendre compréhensible, et (surtout pour lui) l'utilisation du voile, un bout de tulle pas facile à manier. Le jeu du chat et de la souris entre James et la Sylphide doit paraitre le plus naturel possible, même si tout est calculé et mis en place avec une grande précision. Et c'est avec les détails que cette pantomime sonnera juste. "Si tu veux le voile, regarde-le", lance ainsi Laurent Hilaire à Amandine Albisson. "Tu charmes James, il faut y aller à fond, accentue plus". La danseuse semble assez à l'aise avec son personnage, malicieuse et sans tomber dans la minauderie, qui semble être un peu le pièce de ce passage. "À la fin, il faut que tu boudes un peu plus", même en trois minutes, les personnages ont une évolution. James pose un petit bisou dans le coup de La Sylphide pour se faire pardonner, un "smack" sonore résonne dans l'amphithéâtre. "Les bisous, c'est dans le silence", lance malicieusement le maître de ballet.
Pour le public, Laurent Hilaire est d'une grande clarté. Il explique chaque geste de la pantomime, leur signification, et comment tous ces mouvements sont importants pour la progression de l'histoire. Aucun geste n'est gratuit. Il montre beaucoup, il prend la place de James, celle de la Sylphide, il connaît visiblement les deux rôles sur le bout des doigts.
Les deux jeunes danseurs mettent en pratique instantanément les remarques concernant la pantomime, le travail du voile est par contre plus dur à mettre en place. "Joue avec le voile pour qu'elle est vraiment le geste d'essayer de l'attraper", conseille Laurent Hilaire à Yannick Bittencourt. Mais le bout de tulle est capricieux, il est difficile de le faire vraiment planer dans les airs, et il est déjà retombé quand Amandine Albisson, suivant la musique, tend la main pour l'avoir. Le couple travaille ensuite quelques directions. Si le placement est bon, le public a une véritable impression de jeu spontané entre eux. "Ne voyage pas trop, ça donne un côté naturel au mouvement", conseille à Amandine Albisson le maître de ballet.
Finalement, la Sylphide attrape le voile empoisonné. C'est un coup d'arrêt, ses ailes tombent, la vie la quitte petit à petit. Amandine Albisson joue déjà joliment son rôle, mais attention à la musique qui défile et à la chorégraphie à respecter. "C'est bien d'avoir de la vraie émotion, mais il faut rester dans le temps musical". La Sylphide s'étaient finalement... "Et là la Croix-Rouge arrive, enfin les quatre Sylphides", conclue Laurent Hilaire, décidément très en forme en ce samedi après-midi, mais cette dernière réflexion a bien fait rire le public. L'heure était écoulée, pas le temps de filer une dernière fois la scène, dommage.
Amandine Albisson et Yannick Bittencourt ont montré les débuts de leur travail dans cette répétition. Difficile donc de dire ce qu'il en sera dans un mois, même si les deux danseurs semblaient plutôt bien dans leur personnage, et formait un couple joliment assorti. Pour le public, cette séance de travail a eu un véritable intérêt pédagogique. Ce fut à la fois une première approche globale du ballet, et le décryptage point par point d'une scène précise, souvent difficilement compréhensible pour des néophytes. Dommage que l'Opéra de Paris ne joue pas le jeu de ces répétitions plus souvent.
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