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Une soirée répétiton-répertoire avec le Ballet de l’Opéra de Lyon

Le Centre National de la Danse a lancé une excellente initiative il y a quelques saisons. Chaque année, une grande compagnie est invitée pour présenter son travail au public dans un cadre particulier : une heure de cours et répétition, pour voir la troupe au travail, suivi d’un court spectacle avec des pièces représentatives de son répertoire. Le tout dans le cadre du Grand studio, certes grand mais qui reste un studio, d’où une très grande proximité avec le public. Et voir des danseurs et danseuses danser d’aussi près, à tel point que l’on a un peu peur qu’ils rentrent dans le premier rang à la fin d’une diagonale de grands jetés, ça s’apprécie !

Cette année, le Ballet de l’Opéra de Lyon s’est prêté au jeu. La troupe passe son automne à Paris, entre Faces et Cendrillon de Maguy Marin. Elle s’est rendue au CND les 4 et 5 décembre dernier, pour deux soirs de “Compagnie au travail”.

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L’heure de répétition commence par l’immuable du danseur et de la danseuse : le cours. Le but n’était pas ici de montrer une leçon dans son entier, mais un aperçu de quelques exercices, pour montrer un peu le travail au quotidien. La barre et le milieu sont donc bouclé-e-s en 35 minutes, peut-être un peu frustrant pour des danse addict, mais un format idéal pour les néophytes. Le rituel ne change pas : tout le monde se place à la barre dans des couches de vêtements, enlevés au fur et à mesure des exercices. Pendant que le maître de ballet donne la leçon, le directeur du Ballet de l’Opéra de Lyon dresse un bref historique de la troupe. Si la compagnie est orientée vers le répertoire néo-classique/contemporain, son histoire est très ancienne, puisqu’elle a été créée à la fin du XVIIIe siècle.

Pliés, battements, quelques exercices de rapidités, grands battements, étirements, et place au milieu. Sur des airs de grands ballets classiques, la troupe enchaîne l’adage, les pirouettes, et un peu de grands sauts ou fouettés pour la fin, qui font toujours leur petit effet. Le répertoire est peut-être moderne, mais le cours quotidien est bien classique, cela reste la base. Déjà, l’on repère des personnalités, même si la troupe est globalement homogène.

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Le reste de l’heure est occupé, non pas d’une répétition, mais par le filage de deux œuvres. La première, For MG : the Movie de Trisha Brown, n’a encore jamais été dansée par le Balle de l’Opéra de Lyon. La troupe est encore en train de la répéter, pour une Première en février. Il s’agit donc de l’un des premiers passages en scène. Le directeur explique que ce type de chorégraphie n’est pas forcément facile à s’approprier. Souvent, la chorégraphe vient avant pour donner quelques cours, et transmettre au mieux son style et ses idées. Pour certains danseurs et danseuses, c’est difficile de se glisser dans ces nouvelles pièces, très modernes, tout le monde n’a pas les mêmes aptitudes.

La pièce se danse en silence, avec une petite dizaine de danseurs et danseuses. Pour danser ensemble, il faut donc s’écouter, faire attention aux autres, sentir ce qui se passe. Chacun-e semble déjà très attentif-ve sur scène, et l’on sent une très forte cohésion. Les gestes semblent encore un peu brut de décoffrage, la Première est dans deux mois. La seconde pièce est One of a Kind de Jiri Kylian, un classique du répertoire du Ballet de l’Opéra de Lyon. Tout est déjà en place, vivant, malgré les justaucorps de répétition. Kylian, c’est toujours aussi beau et musical, et l’on sen que la troupe à l’habitude de ce genre de pièce.

La deuxième heure est donc consacrée à un court spectacle. Lumières spécifiques, tenues de scène, mais toujours cette formidable proximité. Qui se ressent d’ailleurs d’autant plus dans la première œuvre, Sarabande de Benjamin Millepied. Sur des musiques de Bach, le chorégraphe a dessiné un quatuor à l’inventivité explosive. Les quatre danseurs s’amusent, se chamaillent gentiment, se prennent la place au soleil, reviennent en solo… pour mieux se retrouver ensemble. Voir leur regard avant de se lancer, leur coup d’œil, leur sourire en coin, leur joie visible de danser, c’est irrésistible.

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Je ne suis pas forcément fan de l’œuvre de Benjamin Millepied, mais je dois avouer que cette pièce m’a complètement séduite. Beaucoup d’imagination, une belle danse néo-classique, un certain humour et beaucoup de musicalité, on ne s’en lasse pas. Les quatre danseurs, Randy castillo, Harris Gkekas, Franck Laizet, Raul Serrano-Nunez, ont tous montré beaucoup de charisme et de virtuosité, même si ce dernier se détachait particulièrement, et semblait mener véritablement la bande.

La deuxième pièce était aussi un travail sur la fugue, d’un tout autre genre.Grosse Fugue de Maguy Marin, sur une musique de Beethoven, est plus dure, plus brut. Le quatuor est ici composé de quatre femmes, Dorothée Delabie, Amandine François, Aurélie Gaillard et Agalie Vandamme. Les robes sont rouge sang, la tension omniprésente, et le regard profondément désespéré. Et c’est assez déstabilisant de pouvoir regarder droit dans les yeux, d’aussi près, des artistes à ce point dans leur personnage torturés. La chorégraphie est tout aussi intéressante, mais je crois que j’avais envie de plus de fun ce soir-là. Maguy Marin aime montrer la dureté et la réalité de la vie, j’aimerais bien voir une pièce plus légère de sa part.

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