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CircusNext – À la découverte des jeunes talents du cirque européen

Le Théâtre de la Cité internationale à Paris accueille du 14 au 16 mars les spectacles des finalistes de CircusNext, la plateforme qui soutient les jeunes talents du cirque européen. Soit six projets sélectionnés sur 150, venus de toute l’Europe, à différents stades de préparation. Le principe ? Soutenir des auteurs et autrices émergentes et mettre en avant une singularité dans l’écriture d’un spectacle de cirque. Jongleur, acrobates, travail sur l’improvisation… Les six projets sélectionnés pour cette saison 2019 sont tous étonnants et différents, montrant la vitalité du cirque de demain. DALP a pu les découvrir la saison dernière, lors de l’une des étapes de sélection.

Surface – Familiar Faces

Sur la scène du Théâtre de la Cité internationale, les six projets CircusNext 2019 présentent du 14 au 16 mars 30 minutes de leur création en cours. Un “Work-in-progress” déjà mûri, qui arrive au bout d’un chemin de création. Une route qui est notamment passée par Neerpelt, petite ville au bout de la Belgique flamande, en juin 2018. C’est là que, sur 150 dossiers déposés, 12 avaient été sélectionnés. Pendant une semaine, ils ont pu présenter face à un jury de professionnels 20 minutes de leur création en cours et s’entretenir avec eux. Mais aussi présenter leur projet devant des directeurs et directrices de lieux de résidence d’artiste, de programmateurs et programmatrices de festival, et tous les contacts et relations informelles qui se font à vivre ensemble pendant une semaine. Le but ? Faire partie des six projets retenus, donnant droit à des résidences en Europe, 10.000 euros de bourse d’écriture et l’opportunité de présenter un travail plus abouti de 30 minutes au Théâtre de la Cité internationale, devant un public, mais aussi 150 professionnels.  

 

Premier critère : la singularité dans l’écriture

Un travail qui n’est pas simple pour le jury. Les 12 projets n’ont pas été sélectionnés selon leur aboutissement, mais pour la singularité de leur écriture. Sur scène, il y a ainsi des spectacles qui sont en réflexion depuis plus d’un an et presque finalisés, comme d’autres n’en sont encore qu’aux prémices. Venant de toute l’Europe, certaines troupes (notamment les françaises) bénéficient déjà de structures pour travailler, sont passées par des écoles professionnelles, quand d’autres sont originaires de pays qui ne soutiennent pas spécialement le cirque et ont dû faire avec les moyens du bord. Et le but n’est pas de choisir les six projets les plus finalisés, mais les plus prometteurs. “Nous sommes là pour faire émerger de jeunes auteurs et autrices“, explique Cécile Provôt, directrice de CircusNext. Cette plateforme regroupe une vingtaine de partenaires venus de 14 pays européens. Salles de spectacles, lieux de cirque, festivals… Ils s’engagent pour soutenir le jeune cirque émergeant. Leurs critères de sélection ? “La singularité de l’écriture, la cohérence du projet, l’excellence artistique, la qualité technique, la capacité à faire aboutir un projet… et à en monter d’autres par la suite“. 

Sur scène, les 12 troupes présentent 20 minutes de leur travail, plus ou moins avancés. Parmi les projets marquants, l’on note Surface de Familiar Faces, l’un des coups de coeur de cette sélection et qui fera partie des six finalistes. La petite troupe belge travaille l’acrobatie sur un sol détrempé… Et cela peut donner lieu à des milliers de possibilités, surtout que l’humour n’est pas oublié. Tout est déjà bien pensé et bien monté. En coulisse aussi les auteurs montrent qu’ils savent bien où ils vont, ce qui leur manque, ce qu’il faut améliorer, et ont déjà une idée de date de première. À l’inverse de NOise Cirkus de la troupe slovène Mismo Nismo, qui a visiblement eu beaucoup moins de moyens et en est encore aux balbutiements. Voilà une sorte de plaidoyer écologique dans une ambiance de décharge, avec une écriture jouant beaucoup sur l’improvisation, pas si fréquente que ça dans le cirque. Le groupe semble fragile, mais l’originalité de l’écriture a retenu le jury. Eux aussi seront sélectionnés. Face à ces différences de niveau, le jury laisse parler “son flair“. Avec prudence aussi. “On ne peut pas les envoyer au casse-pipe, ça peut briser une carrière“, raconte Cécile Provôt.

Materia – Andrea Salustri

Il n’y a ainsi pas d’âge pour postuler à CircusNext, “On peut avoir été interprète toute sa vie et se décider à être auteur à 40 ans“, continue Cécile Provôt. Le seul critère est d’être au début de sa carrière de créateur-créatrice, d’en être à son premier ou deuxième spectacle. “L’idée est de les aider autour de la production et de la diffusion avec une plateforme qui donne une visibilité très forte“. La présentation du projet au Théâtre de la Cité internationale et la bourse de 10.000 euros sont forcément porteuses pour les six projets sélectionnés. Mais le nerf de la guerre d’un jeune spectacle  de cirque reste surtout de trouver des lieux de résidence, ce qui prend le plus de temps à CircusNext. Pour la danse, une troupe va avoir besoin d’une salle pendant quelques semaines. Une création de cirque se passe souvent de façon plus morcelée, avec des périodes de création d’une ou deux semaines étalées sur une bonne année ou plus. Le temps de faire évoluer le spectacle ou de construire des agrès bien spécifiques. Et trouver un lieu de résidence pour le cirque n’est pas évident, il faut une salle appropriée, avec des caractéristiques techniques bien spécifiques. 

 

Un accompagnement jusqu’en 2021

Les six finalistes auront ainsi une résidence européenne. Mais les six autres projets non-sélectionnés ne seront pas non plus perdants. “Ils vont être accompagnés en résidence jusqu’en 2021. Tous les partenaires de CircusNext s’engagent sur les 12 projets“, explique Cécile Provôt. Pour la plateforme, il s’agit d’aider concrètement des troupes et des spectacles à émerger. “Mon travail est de les aider à se poser les bonnes questions concrètes mais à ne pas leur apporter des réponses toutes faites“. Il s’agit ainsi aussi bien de se poser des questions artistiques que de réfléchir à sa rémunération si le projet ne peut aboutir que dans deux ans. Murmur de Grensgeval, qui n’a pas été sélectionné, devrait en bénéficier. Voilà un très beau numéro de sangle aérienne mais auquel il a manqué une ligne directrice. Un projet tout frais qui devrait grandir même sans passer par le Théâtre de la Cité internationale. Idem pour Static de Monki Business, un solo d’acrobatie plutôt séduisant et à la bande-son qui envoie, mais qui cherche encore son chemin original.  

Sanctuaire Sauvage – Collectif Rafale

Pour les coups de coeur, au cours des présentations, Sanctuaire Sauvage du collectif français Rafale retient l’attention. Inspirés par leur père aveugle, trois jeunes auteurs et autrices ont imaginé une pièce originale et poétique, qui se voit comme elle s’entend. Le jongleur Andrea Salustri se démarque également. Sa pièce Materia se fait avec deux ventilateurs et des objets en polystyrène. Une mise en scène simple, mais tout est déjà construit, un univers particulier est déjà en place. Ces deux créations feront partie des sélectionnées. Tout comme le solo Contra de Laura Murphy, une personnalité percutante et brillante qui raconte les pressions sur leur corps féminin. Avec Surface de Familiar Faces et NOise Cirkus de Mismo Nismo évoqués plus haut, auquel se rajoute la compagnie Random que nous n’avons pas pu voir, chacun présentera au Théâtre de la Cité internationale du 14 au 16 mars 30 minutes de leur pièce. Avec presque un an de réflexion, de résidence et de maturité supplémentaire. Une occasion de découvrir en scène des pièces émergentes, toutes particulières, avant leur véritable première dans les mois à venir. 

 

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