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[Le Temps d’aimer] Dutch Masters – Introdans

L’édition 2019 du festival Le Temps d’aimer a démarré d’une belle manière, avec une soirée consacré aux maîtres de la danse aux Pays-Bas : Jiří Kylián, Hans van Manen et Nils Christe. Un programme qui porte la signature du directeur artistique du festival, Thierry Malandain, mélangeant des pièces néo-classiques de chorégraphes boudées la plupart du temps en France. Mis à part le maître Jiří Kylián, les oeuvres de Hans van Manen et Nils Christe se font rares dans l’Hexagone. Et pourtant, que de richesses et de choses à danser ! La troupe Introdans, moins connue et au budget moindre que ses compatriotes NDT et le Het Nationale Ballet, n’en porte pas moins haut ce programme, montrant une qualité de danse et une justesse de mouvement qui donne aux quatre pièces proposées toute leur valeur.

Polish Pieces de Hans van Manen – Introdans

Maître européen de la danse néo-classique, Hans Van Manen reste mystérieusement absent du paysage de la danse en France, n’entrant au répertoire de l’Opéra de Paris… qu’il y a deux ans. Mais au Temps d’aimer, le chorégraphe néerlandais a eu régulièrement une place. Pour cette édition 2019, la troupe Introdans a choisi Polish Pieces, pièce bien représentative de la danse de Hans van Manen : une danse néo-classique à la fois dans la rigueur des lignes et l’affection de la géométrie, et dans la sensualité des torsions. Habillés d’académiques de couleur vive, les corps des danseurs et danseuses tranchent sur le fond noir. Les bras sont tendus au ciel, les jambes sont acérées dans des phrases chorégraphiques réglées au cordeau. Et pour apporter un peu de douceur, le haut du corps se fait fluide, dans la spirale, donnant comme une respiration dans une danse portée à toute allure par la musique de Górecki et qui ne souffre pas d’approximation. Tant mieux : la troupe Introdans est merveilleuse de rigueur, donnant toute la vitalité et les accents de surprise à une pièce séduisante et mordante. L’on en oublie alors le duo qui a précédé ce ballet, Andante du même Hans van Manen, dont la gestuelle plus purement classique ne mettait forcément le mieux en valeur les deux interprètes du soir.

Après cette oeuvre purement abstraite, la troupe prend un chemin plus lié à l’émotion en reprenant le magnifique Lieder eines fahrenden Gesellen (Chant du compagnon errant) du maître Jiří Kylián, sur la partition éponyme de Mahler. Une musique vocale qui inspire régulièrement les chorégraphes, partition puissante d’une grande force émotionnelle. Le chorégraphe s’empare, une fois de plus, avec justesse de la musique, s’en inspire sans trop la souligner, pour une série de duos d’une immense beauté. Jiří Kylián aime parfois les mises en scène lourdes et complexes. Rien de ça ici : juste la musique, un décor noir, la danse à l’état pur où seul compte la justesse du geste dans l’émotion. Là encore, les artistes d’Introdans sont formidables. Le travail du haut du corps, en torsions, en relâchés, en constant mouvement, est toujours porté par une musicalité jamais prise à défaut. Les danseurs et danseuses ont la justesse du ton, adoptant une certaine sobriété pour être au plus juste face à une musique assez grandiloquente comme ça. Une danse vivante, une oeuvre magistrale : rien de mieux pour démarrer un festival !

Lieder eines fahrenden Gesellen de Jiří Kylián – Introdans

Après l’entracte, la compagnie reprend Cantus de Nils Christe, autre chorégraphe néerlandais. Portée par l’énergie du groupe, la pièce est efficace, jouant d’une danse néo-classique rodée,  sachant ce qui sait faire de l’effet. Même si les références au maître tchèque sont parfois un peu trop visibles (ahh, le jeu du tissu qui recouvre les artistes). Cantus se regarde néanmoins sans déplaisir, le temps file sans s’ennuyer, mais il est difficile de passer après Lieder eines fahrenden Gesellen. L’une est une pièce sympathique, l’autre est un chef-d’oeuvre.

Cantus de Nils Christe – Introdans

 

Dutch Masters par Introdans à la Gare du Midi, dans le cadre du Temps d’aimer. Andante de Hans van Manen avec Pascal Schut et Yulanne de Groot ; Polish Pieces de Hans van Manen avec Nienke Wind et Vincenzo Turiano (premier pas de deux), Kim van der Put et Salvatore Castelli (deuxième pas de deux), Angelica Villalon et Pascal Schut ; Lieder eines fahrenden Gesellen de Jiří Kylián avec Kim van der Pu et Pascal Schut (premier pas de deux), Nienke Wind et Vincenzo Turiano (deuxième pas de deux), Yulanne de Groot et Salvatore Castelli (troisième pas de deux), Angelica Villalon et Lucas Donner (quatrième pas de deux) ; Cantus de Nils Christe avec Yulanne de Groot, Lucas Donner, Fabio Falsetti, Salvatore Castelli, Nienke Wind, Vincenzo Turiano, Angelica Villalon, Giuseppe Calabrese, Pascal Schut, Hayden Idrus, Brooke Newman, Nina Dijkman et Elisa Rudolf. Vendredi 6 septembre 2019.

Le Temps d’aimer continue jusqu’au 15 septembre à Biarritz.




 

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