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Pli – Inbal Ben Haim avec Domitille Martin et Alexis Mérat

Inbal Ben Haim est à la fois circassienne et plasticienne. Cette double formation l’a conduite à imaginer un spectacle inédit, Pli, dans lequel elle crée devant nos yeux son propre agrès composé de papiers. Plié, tordu, lié, l’artiste franco-israélienne bâtit un univers singulier, organisant le matériau sur lequel elle se suspend. Entourée sur scène d’Alexis Mérat, ingénieur et artiste de Domitille Martin, scénographe, elle invente un travail de voltige saisissant alors qu’elle se hisse au plus haut de cintres à l’aide de ces cordes de papier. Entre le travail en direct sur le matériau et une acrobatie de l’extrême, Inbal Ben Haim déploie le papier comme une métaphore de nos fragilités dans un spectacle qui émerveille.

Pli – Inbal Ben Haim

Pli. Le titre du spectacle annonce déjà ce qui va venir. Sur scène, rideau ouvert, des dizaines de rouleaux de papier de toutes tailles semblent attendre d’être manipulés. Cela commence dès l’entrée en scène d’Inbal Ben Haim et de ses deux acolytes. Ce papier, qui ne semble doté d’aucune vertu particulière, semble d’une totale banalité. Il se déroule simplement pour être plié, enroulé jusqu’à la torsion maximale. Sur scène, les trois artistes le malaxent pour en faire des cordes reliées en corolle. On est alors loin d’imaginer comment Inbal Ben Haim va se jeter à l’assaut de ce dispositif beau et fragile.

Elle grimpe alors comme on le ferait avec une vraie corde. On retient son souffle dans ce qui paraît un jeu dangereux. Le papier par essence est fragile. Il se froisse, se déchire. Inbal Ben Haim, à l’évidence, a su apprivoiser ce matériau qui n’est pas conçu pour ce qu’elle veut en faire. Alors qu’elle s’élance vers les hauteurs, elle semble en maîtriser parfaitement les spécificités. Elle le froisse et se love dans ces lianes de papier, plus résistantes qu’elles ne paraissent. Elle va même jusqu’à déchirer le papier, détruire cet agrès éphémère dont il ne reste plus finalement que le nœud qui reliait ces bandes.

Pli – Inbal Ben Haim

Cette première séquence éblouit par son aplomb, sa maîtrise et sa prise de risque inhérente aux arts du cirque. Par son travail sur le son et la lumière aussi, comme le bruit du papier qui se froisse et les rais lumineux reflétés dans ce drôle d’origami qui s’est construit et déconstruit. Surgit un corps-à-corps superbe entre l’artiste et le papier. Pli n’est pas un simple défi gratuit à la pesanteur. Inbal Ben Haim recherche ce que peut lui offrir le papier et comment il induit son récit dans les airs. Le papier offre ainsi des possibilités inédites mais pose aussi ses limites. C’est sa force et sa fragilité que l’artiste montre et décline sur scène. Il y a aussi cette familiarité que l’on ressent inévitablement avec ce matériau de notre vie quotidienne.

Pas de cabotinage dans la démarche d’Inbal Ben Haim et de ses deux acolytes. Mais une intuition, celle que le papier pourrait offrir des qualités spécifiques et inexplorées. Elle a débuté ce travail sans savoir où il la mènerait et si même il allait aboutir. Et elle ne manque pas de remercier celles et ceux qui lui ont permis de bâtir Pli, un spectacle qui ne ressemble à aucun autre, qui met des étoiles plein les yeux, nimbé d’une poésie qui nous enchante. Et que c’est précieux en ces temps tourmentés.

Pli – Inbal Ben Haim

Pli conçu et interprété par Inbal Ben Haim avec la collaboration de Domitille Martin et Alexis Mérat, produit par les SUBS ( Lyon). Samedi 12 mars 2022 au Théâtre de la Cité Internationale. À voir en tournée en 2022.

 



Commentaires (1)

  • Bertaut

    Amusant de voir que les ressentis peuvent tellement différer : je suis heureuse pour vous que vous ayez apprécié ce spectacle mais je me suis de mon côté terriblement ennuyée… Toute cette préparation était longue, longue, longue : et que je te déroule et que je te plie et que je te froisse et que je te tors ce papier…quand est-ce que ça commence, le spectacle, le vrai ?!!!
    Et ensuite oui, c’est sans doute difficile, fragile, mais encore une fois long, long, long et cette juxtaposition de petits (tout petits) jolis moments m’a laissée sur ma faim : impression d’avoir vu le résultat d’un travail d’atelier qui serait le début de quelque chose à travailler, resserrer, approfondir.
    On est loin de la magie et de la maîtrise des Cirque Plume et consorts.

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