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Hiroaki Umeda – Vibrance / Median

Le chorégraphe plasticien japonais Hiroaki Umeda a présenté deux pièces lors du Festival 100% au printemps, l’un des temps forts de la programmation annuelle de La Villette à Paris. Vibrance se construit autour de trois danseuses de hip hop enveloppées dans l’univers visuel hypnotique du chorégraphe, tandis que Median, solo interprété par Hiroaki Umeda, est à la fois oeuvre plastique et chorégraphie implacable sur une scénographie virtuose en lumières et vidéo. Artiste majeur et singulier, Hiroaki Umeda invente un autre regard sur la chorégraphie, intégrant dans ses créations un schéma visuel et sonore qui sature l’espace, déroute parfois mais impressionne par la maîtrise absolue de ses savoir-faire.

Hiroaki Umeda de Vibrance

Hiroaki Umeda a dû, comme de nombreux artistes étrangers, déserter les scènes françaises et internationales en raison de la pandémie. Le voilà de retour avec deux pièces montrant deux facettes de son travail. Habitué à s’exprimer en solo, le chorégraphe collabore dans Vibrance avec trois danseuses hip hop japonaises. Entre show son et lumières et clubbing infernal, Hiroaki Umeda imagine une chorégraphie en clair-obscur. Figées sur leur axe, les trois danseuses développent un  arsenal éblouissant de mouvements du haut du corps et des bras parfaitement synchronisés avec la musique et les lumières, au point que l’on se demande parfois qui mène la danse dans cette atmosphère sonore multi saturée et constamment syncopée. Développer une musicalité aussi parfaite sur cette conception sonore débridée est stupéfiant. La coordination des trois danseuses sidère et nous laisse presque en apnée.

Hiroaki Umeda, créateur polymorphe, impose ainsi la maîtrise absolue de son univers. Cela passe par des créations sonores trop saturées et à peine supportables sans les bouchons d’oreilles généreusement offerts. La question se pose de savoir si cette débauche de décibels sert le spectacle. Ce n’est pas certain. L’intensité sonore agresse et détourne par moments le public de la scène. C’est dommage mais la force de l’interprète et du plasticien triomphent néanmoins dans sa seconde pièce Median. Hiroaki Umeda est ici  en solo, la forme qu’il affectionne depuis ses débuts. À peine visible, telle une créature lumineuse plongée dans un espace intersidéral, le mouvement vient d’abord de l’image, de ces milliards de pixels qui défilent en lignes horizontales ou verticales pour finalement s’arrondir et former comme une toile d’araignée dans laquelle il joue et se débat.

Median de Hiroaki Umeda

C’est une chorégraphie globale que propose ainsi Hiroaki Umeda. Il plonge dans le monde microscopique pour examiner ses mouvements et les intégrer dans sa cinétique chorégraphique. Son art utilise une technologie high-tech au plus serré mais il ne s’y noie jamais, affichant au fil de ses créations un savoir-faire de plus en plus aiguisé. Sa danse est ancrée solidement dans le sol, féline, sans effet, presque ascétique dans un spectacle total autour d’un créateur charismatique.

On peut être dérouté par l’univers d’Hiroaki Umeda si éloigné du récit européen de la danse contemporaine. Il n’y a pas d’autre enjeu dans son travail que de mettre sur scène un objet esthétique qui se voit davantage comme une oeuvre plastique, un syncrétisme du mouvement qu’il va traquer sous toutes ses formes. Il faut une autre focale pour plonger dans l’oeuvre du chorégraphe japonais. Cela demande de se délester des habitudes de public occidental, d’accepter de se laisser happer dans le monde enchanté d’Hiroaki Umeda. Mais il y a tout à gagner dans cette aventure.

Median de Hiroaki Umeda

Programme Hiroaki Umeda. Vibrance de Hiroaki Umeda avec Ayumi, Chika-J et Yuli ULI, son et lumières : S20  ; Median de et avec Hiroaki Umeda. Samedi 9 avril 2022 à la Grande Halle de la Villette, dans le cadre du Festival 100%.

 



 

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