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VanThorhout – Alexander Vantournhout

Alexander Vantournhout présente cette saison son dernier solo VanThorhout. Un jeu de mots sur son nom de famille pour signaler l’intention : jouer avec le personnage de la mythologie nordique Thor. À l’opposé de l’univers hollywoodien qui a repris cette figure héroïque, le chorégraphe et circassien belge en suggère un détournement savoureux, mettant en pièces le mythe viriliste du super-héros dans un solo habité, à la fois drôle et virtuose, fondé sur une série de tours perpétuels.

VanThorhout – Alexander Vantournhout

Il y eut quelques rendez-vous manqués avec le public. Alexander Vantournhout avait dû, lors de la pandémie, se contenter d’une audience réduite à quelques professionnels pour son précédent solo présenté au 104, créé en 2015, ANECKXANDER. Là-encore, le chorégraphe jouait avec son prénom dans cette pièce épatante dans laquelle l’artiste exposait son corps au-delà des limites physiques dans des figures extrêmes, entre contorsion et acrobatie. Jamais pour la simple démonstration de la performance mais toujours dans un souci de bâtir un récit qu’il avait sous-titré “une autobiographie tragique du corps”. Vanthorhout prolonge à sa manière ce travail. Car là aussi Alexander Vantournhout nous parle de lui et du rapport qu’il entretient avec ce corps exceptionnel. Souplesse serait à peine le mot juste car il semble y avoir quelque chose de profondément élastique dans sa manière de bouger.

Pour Vanthorhout, il a délaissé la scène frontale au profit d’une arène. Au centre, il expose torse nu ce corps dont émane une sensation étrange de force et de fragilité. On le dirait frêle alors que va se déployer durant presque une heure une force décuplée par le mouvement circulaire qui est la figure unique qu’il utilise a capella. Tel un derviche tourneur, Alexander Vantournhout tourne sur lui-même, lentement, puis de plus en plus vite. Et le rayon du cercle ne cesse de s’agrandir lui permettant de prendre de la vitesse.

Vanthorhout – Alexander Vantournhout

Subrepticement, Alexander Vantournhout introduit un accessoire qui souligne son propos. Le marteau du  dieu Thor est devenu un manche interminable sur-dimensionné par rapport à la pierre qui frappe. En détournant l’objet, il moque le mythe de la force, de la virilité du dieu de la pluie et du tonnerre. Et sur scène, ce drôle de marteau devient un accessoire qui trouve sa propre force dans la ronde infernale que lui inflige le danseur. On découvre plus tard que l’objet est encore plus inoffensif qu’il n’y paraît. Intervient aussi un drapeau, pointant le goût d’Alexander Vantournhout pour les objets avec lesquels il aime interagir sur scène. C’est un dialogue qui s’installe lors de leurs maniements, dans lesquels il trouve son énergie cinétique qui les font tourner ad libitum, à la limite du  déséquilibre, sans renier la part de virtuosité qui en fait un artiste exceptionnel.

L’humour pince-sans-rire inonde les spectacles d’Alexander Vantournhout qui ne rechigne pas à se moquer de lui-même. Pour Vanthorhout, c’est aussi le patriarcat et ses représentations symboliques qu’il met en pièces. Il porte sur le mythe de Thor un regard décalé : pas de toute-puissance mais un mélange subtil de force herculéenne et d’infinie fragilité. Danseur tout autant qu’acrobate, il mêle comme personne ses disciplines pour créer des spectacles qui explorent le corps – le sien mais aussi celui des autres – unissant avec bonheur virtuosité et poésie.

VanThorhout – Alexander Vantournhout

VantThorhout d’Alexander Vantournhout avec la complicité d’Emmi Väisänen sur une dramaturgie de Rudi Laermans et Sébastien Hendrickx. Mercredi 19 octobre 2002 au 104 de Paris. À voir en tournée cette saison, les 7 et 8 avril 2023 aux Subsistances de Lyon.

 



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