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Théâtre du Centaure – Animal Danser avec le vivant

Le Théâtre du Centaure, troupe circassienne où humains et chevaux sont en scène, a présenté chez elle, à Marseille, sa dernière création Animal danser avec le vivantdans le cadre de la cinquième édition de la Biennale Internationale des Arts du Cirque. Après s’être rodé sur des scènes de théâtre, le nouveau spectacle du Centaure a retrouvé son chapiteau et son manège pour une pièce conçue en collaboration avec la chorégraphe Kaori Ito. Elle reprend à son compte l’utopie du Centaure, cette recherche d’une fusion entre l’homme et l’animal. Manolo, le maître des lieux, est accompagné de la danseuse Léonore Zurflüh, de deux musiciens et de quatre chevaux, qui impriment à chaque séquence un rythme différent. Ce dialogue produit un spectacle d’une beauté froide et sensuelle à la fois. Un voyage onirique au plus profond de soi.

Animal danser avec le vivant – Théâtre du Centaure

Le spectacle au Théâtre du Centaure est à la fois le point d’orgue de l’aventure unique que vivent et partagent leurs fondateurs, Camille et Manolo, et la partie émergée de leur travail, celle qui s’inscrit dans  le format de la représentation théâtrale. Mais au-delà de ce rendez-vous avec les publics, c’est un lieu qui s’est ancré depuis huit ans à la Jarre, un quartier excentré de Marseille, à quelques encablures de la prison des Baumettes. Pas précisément l’endroit le plus chic de l’immense cité  phocéenne. Mais le Théâtre du Centaure a conçu dans cet environnement un lieu à son image : vaste, multiple et résolument écologique. À côté du grand chapiteau se dresse ainsi un bâtiment en bois recyclé, entièrement ouvert sur l’extérieur par des portes coulissantes vitrées. C’est le centre névralgique du Théâtre du Centaure, servant à la fois de bar où l’on peut boire du vin chaud les soirs d’hiver et se restaurer. Durant la journée s’y succèdent toutes sortes de propositions : chant, yoga, taiji quan, théâtre. On peut aussi s’initier à la danse indienne et au kathak. De là, on peut admirer au printemps les amandiers en fleurs qui encerclent le grand manège extérieur entouré d’un jardin en permaculture, où sont plantées les essences nécessaires au soin des chevaux qui vivent dans les box tout autour.

Le Théâtre du Centaure n’est cependant pas une oasis, mais un espace ouvert sur le quartier qu’il occupe et la ville qui l’accueille. Camille et Manolo ont depuis le premier jour parcouru à cheval les alentours et au-delà, pénétrant dans les cités comme pour créer un force d’attraction. Ce n’est pas une utopie ou en tout cas, cela ne l’est plus. Le Théâtre du Centaure fait désormais partie de l’écosystème marseillais, contribuant à faire mentir l’image déformée de la ville trop souvent colportée.

Il reste évidemment une forme d’utopie dans le nom même qu’ont choisi Camille et Manolo. Le centaure, mi-cheval mi-homme, n’existe que dans la mythologie et nos imaginaires. Mais l’idée est de s’appuyer sur ce rêve pour construire une esthétique nouvelle, dans laquelle la personne humaine et le cheval évoluent en symbiose. Tout leur travail parle de cela. En recherche constante, ils ont ouvert leur univers à d’autres savoir-faire. Le metteur en scène Fabrice Melquiot est ainsi un compagnon de route de longue date. Cette fois, Manolo a fait appel à Kaori Ito pour imaginer leur dernière création Animal Danser avec le vivant. Être avec l’animal un seul être pour danser avec la nature tout entière réunie, peut-on lire dans le cahier de création.

Animal danser avec le vicant – Théâtre du Centaure

Le spectacle y parvient-il ? Pas tout à fait, mais c’est dans l’ordre des choses d’un projet qui se revendique comme une utopie et un processus constant de recherche. Ce qu’il donne à voir nous offre un matériau précieux. Tout autour de la piste, quatre chevaux, les musiciens, Manolo et la danseuse Léonore Zurflüh. Elle est la première à entamer ce dialogue avec le cheval, mimant son pas, marchant , courant et dansant à son rythme et à ses côtés, lui servant de double. Ce jeu de miroirs, magnifiquement soutenu par la guitare de Virgile Abela et le chant de Anwar Khan, n’est dénué ni d’humour, ni d’une infinie tendresse et il semble paradoxalement que c’est le cheval qui est maître du jeu.

Mais c’est sans conteste l’ultime séquence du spectacle qui délivre le message le plus puissant. Durant dix minutes, Manolo presque nu chevauche un étalon, ou plus précisément l’enlace, l’embrasse, l’attrape par l’encolure, se niche sous sa croupe dans un climat de confiance suprême avec l’animal. À ce moment précis, la promesse de départ est totalement remplie. L’homme et le cheval interagissent comme un seul être. C’est grisant et d’une beauté fracassante.

Animal danser avec le vivant  – Théâtre du Centaure

Animal, danser avec le vivant de Kaori Ito et Manolo par le Théâtre du Centaure. Avec quatre chevaux noirs Indra, Arjuna, Nakula et Sahadeva, Manolo, Léonore Zurflüh (danseuse), Johanna Houe (artiste équestre), Virgile Abela (guitare électrique) et Anwar Khan (chant et harmonium). Vendredi 27 janvier 2023 au Théâtre du Centaure, dans le cadre de la Biennale Internationale des Arts du cirque de Marseille. À voir en tournée le 9 mai 2023 au Quai 9 Lanester, les 7 et 8 mai 2023 au Haras d’Hennebont, les 13 et 14 mai 2023 à la Baie du Mont-Sain-Michel. 

 




 

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