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Y Olé ! Le sacre andalou de José Montalvo

Avec Y Olé ! de José Montalvo se clôt la saison du Théâtre National de Chaillot, dans la joie et le métissage. Car non content de marier, comme à son habitude depuis Paradis, différents styles de danse, le chorégraphe juxtapose dans cette nouvelle création musiques savante et populaire. Dans ce diptyque, où il convoque contemporain, hip-hop et flamenco, il rend hommage autant à ses pairs chorégraphes qu’aux fêtes bigarrées de son enfance.

Y Olé ! de José Montalvo

Y Olé ! de José Montalvo

Comment ne pas être séduit-e par l’immense Sacre du printemps ? Depuis Vaslav Nijinski, Mary Wigman comme Maurice Béjart, Pina Bausch comme Angelin Preljocaj (pour ne citer qu’eux-elles) se sont laissés charmer par ses rythmes envoutants. C’est aujourd’hui au tour de José Montalvo d’en donner sa lecture. Pour lui, pas de rite sacral païen, de vieux sages ou de jeune vierge sacrifiée, mais une fête printanière, véritable ode colorée, métissée, à la vie et à la danse.

Devant un écran prolongeant le tapis de scène, danseuses flamencas et contemporaines, danseurs hip hop et africains se donnent la réplique. Aux frappes de pieds et ports altiers des unes, répondent les sauts vertigineux et les head spins (tours sur la tête) des autres, produisant un spectacle virevoltant et chatoyant, digne d’un musical. Tandis que se déroulent entre des couples mixtes (flamenco / hip hop) des jeux d’attraction répulsion où les femmes le plus souvent mènent le bal, des racines puis un arbre fleuri prennent forme. Et l’élue, enfin, loin de mourir de sa danse, crie “encore” !

Dans cette première partie, enlevée, danseurs et danseuses impressionnent par leur virtuosité.  Pourtant, s’il est difficile de donner tort à José Montalvo lorsqu’il déclare que dans notre époque “sombre, de plus en plus intolérante et crispée“, il est nécessaire de montrer “une communauté symbolique dont la créativité nait de la mixité“, son Sacre peine à convaincre. Une musique et un héritage trop forts sans doute, pour des réjouissances printanières, aussi plaisantes soient-elles.

Y Olé ! de José Montalvo

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La seconde partie, plus intime, prend ses racines dans l’enfance du chorégraphe. Elle rend hommage aux fêtes flamencas que ses parents, réfugiés politiques espagnols, improvisaient avec d’autres immigrés. Celles-ci illuminaient un quotidien souvent fait de misère et d’exclusion, et sont à l’origine de la passion de José Montalvo pour la danse.

Tandis qu’à l’écran, la neige tombe sur une barque posée à même le sable et que les interprètes s’y succèdent, duos, trios et scènes de groupes redonnent vie à ces soirées perdues. Au son d’airs populaires flamencos, mais aussi anglo-saxons,  comme des castagnettes, le mélange des genres fait toujours loi. Et quand, arrivée sur scène, la barque se remplit des danseurs et danseuses qui entonnent en chœur El emigrente, c’est notre triste actualité qui jaillit au milieu des souvenirs du chorégraphe.

Si, dans ce second volet, les chants de Fran Espinosa comme le numéro de mime qu’exécute le brillant Karim Ahansal impressionnent, toutes les fusions n’y sont pas heureuses. Le flamenco, par exemple, s’épanouit assez mal sur Dream a Little Dream of Me. De plus, le message véhiculé par la dernière image projetée, un globe posé au milieu d’un amas de détritus, tourne court.

Finalement, malgré des interprètes tous remarquables et des intentions plus que louables, Y Olé ! , contrairement à Asa Nisi Masa pièce jeunesse créée la saison dernière, peine à provoquer mon enthousiasme. Mais ce n’est pas le cas le soir de la première du public de Chaillot. Lui tape des mains et des pieds tout en scandant “José ! José !“. Comment ne pas se réjouir d’une foule debout, saluant la danse, le brassage et la mixité ?

Y Olé ! de José Montalvo

Y Olé ! de José Montalvo

 

Y Olé ! de José Montalvo au Théâtre National de Chaillot. Chorégraphie de José Montalvo, assisté de Joëlle Iffrig et  Fran Espinosa. Scénographie et conception vidéo de José Montalvo. Coordination artistique, Mélinda Muset-Cissé. Costumes de Rose-Marie Melka, assistée de Marie Malterre et Didier Despin. Réalisation des costumes, Théâtre National de Chaillot. Lumières de Gilles Durand et Vincent Paoli. Son de Pipo Gomes. Collaborateurs artistiques à la vidéo, Sylvian Decay et Pascal Minet. Infographie, Sylvain Decay, Clio Gavagni et Michel Jean Montalvo. Répétiteurs, Delphine Caron, Emeline Colonna, Simhamed Benhalima et Fouad Hammani. Créé et interprété par Karim Ahansal dit Pépito, Rachid Aziki dit ZK Flash, Abdelkader Benabdallah dit Abdallah, Emeline Colonna, Anne-Elisabeth Dubois, Serge Dupont Tsakap, Fran Espinosa, Samuel Florimond dit Magnum, Elisabeth Gahi, Rocio Garcia, Florent Gosserez dit Acrow, Rosa Herrador, Chica Nakayama, Lidia Reyes, Beatriz Santiago, Denis Sithadé Ros dit Sitha. Mercredi 17 juin 2015.

Y Olé ! est présenté au Théâtre National de Chaillot du 17 juin au 3 juillet 2015  puis en tournée à Luxembourg et en France tout au long de la saison 2015/2016.

 

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