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A sign of Love – Ballet de Shanghai

La venue du Ballet National de Chine en septembre dernier avait laissé des questions en suspens sur l’avenir du ballet en Chine. Et notamment du répertoire. Entre les oeuvres occidentales qui ne trouvent pas forcément un écho chez ces interprètes asiatiques et les chorégraphies officielles de l’époques Mao, où se trouve l’alternative ? Le Ballet de Shanghai, en visite à Paris ce printemps, apporte une réponse avec le réussi A Sign of Love.

Ballet de Shanghai - A Sign of Love

Ballet de Shanghai – A Sign of Love

Ballet créé par une équipe française (Bertrand d’At à la chorégraphie, Jérôme Kaplan aux décors et costumes), A Sign of Love n’en est pas moins un ballet chinois. Inspiré du film In the Mood for Love, l’oeuvre se déroule dans le Shanghai des années 1930, mêlant légende ancestrale (celle du Bouvier et de la Tisserande), histoire d’aujourd’hui (les années d’insouciance brisées par la guerre) et bien sûr amours détruits. Entre scènes de groupe et pas de deux romantiques, A Sign of Love se sert du langage classique pour créer un ballet d’aujourd’hui. Rien de nouveau dans le genre, peut-être. Mais entre la production léchée, une troupe d’excellent niveau, des chorégraphies efficaces et ce qu’il faut de pittoresque, il faut bien dire que le tout fait son petit effet. L’ensemble est porté par une musique mêlant jazz shanghaïen, airs traditionnels chinois et une pointe de Beethoven plutôt bien trouvée.

Les Wang et les Li logent dans la même pension, dans le Shanghai festif des années 1930. Une passion naît entre Mr Li et Mme Wang, mais leur pudeur et leur respect du mariage les retiennent. Leur conjoint respectif ne s’embarrassent pas de ces précautions et courent ensemble les cabarets. Les bombardements et la guerre vont ensuite séparer Mr Li et Mme Wang, alors que leur histoire se mêle à la légende du Bouvier et de la Tisserande.

Ballet de Shanghai - A Sign of Love

Ballet de Shanghai – A Sign of Love

Un paradoxe marque d’emblée dans le déroulement de la trame. Les artistes de la troupe savent être expressifs. Chaque personnage est caractérisé. Les interprètes de Mr Li et Mme Wang sont ainsi très joliment dans cet amour en retenue, quand la danseuse de cabaret ou l’ami journaliste sont beaucoup plus volubiles. Pourtant, les sentiments de tous ne peuvent pas être exprimés frontalement. N’attendez pas ainsi des grands pas de deux romantiques à la Neumeier ou des passages de pantomime explicites. Ici, l’on se frôle à peine. Les regards se détournent, les gestes d’émotion sont mesurés, retenus. Rien n’est montré explicitement, franchement. On ne peut pas ouvrir son coeur sur scène. L’expression des sentiments passe par le minimum, intériorisés, sans pour autant qu’à aucun moment les danseurs et danseuses aient l’air inexpressifs.

Il faut ainsi parfois du temps avant de discerner les personnages dans la foule, comprendre les sentiments. Il faut savoir lire derrière les regards qui se détournent et cette extrême retenue. Bertrand d’At a eu l’intelligence de se servir de la façon d’exprimer les sentiments de la troupe, plutôt que de calquer la façon de faire européenne. C’est justement ce qui donne à A Sign of Love ce petit goût d’ailleurs.

Ballet de Shanghai - A Sign of Love

Ballet de Shanghai – A Sign of Love

C’est aussi ce qui fait que les bien plus exubérants passages d’ensemble restent peut-être plus vivement dans les esprits. Le chorégraphe a su utiliser comme il se doit la belle énergie de la troupe et qualités de solistes de certains, tout en occupant la scène d’une façon que n’auraient pas reniée certains spectacles de Broadway. Sur des musiques jazzy, le ballet part en balade dans ce coin de ville d’une autre époque, les rues bondées, les cabarets et clubs de boogie-woogie. Un Shanghai de carte postale, sans aucun doute, mais qui fait son effet sur une scène de théâtre.

Le Ballet de Shanghai présentera également lors de sa tournée parisienne La Fille aux cheveux blancs, ballet-propagande de Mao. Une autre facette de l’histoire de la danse en Chine.

Ballet de Shanghai - A Sign of Love

Ballet de Shanghai – A Sign of Love

 

A Sign of Love de Bertrand d’At par le Balle de Shanghai, au Palais des Sports. Avec Wu Husheng (Mr Li), Ji Pingping (Mme Wang), Jiang Yong (Mr Wang), Chen Yan (Mme Li), Zhou Jiawen (la Tisserande et la Meneuse de revue), Zhang Wenjun (le Bouvier) et Zhang Yao (le journaliste). Jeudi 13 mars 2014 (répétition générale). 

Commentaires (2)

  • Alix

    J’y étais le 20 mars.
    Le ballet a effectivement des spécificités qui lui confère un certains charmes : les voix, l’alternances de musiques d’époque et de genre très différents, mais aussi des performances moins classiques. J’ai mis du temps à différencier les deux personnages masculins, faute de code couleur/ caractéristique franche. Mais l’interprétation était très fine et la chorégraphie est bien équilibrée. La soirée était donc très plaisante, hormis le manque de respect criant du public et des ouvreuses! Elles ont continué à placer des gens pendant les 15 premières minutes. Lors du premier pas de deux qui ouvre le ballet, une cinquantaine de personnes déambulaient encore debout ! Et dès la fin du ballet, les gens se sont lever pour partir, oubliant d’honorer les danseurs par des applaudissements respectueux. Mauvaises habitudes liées au cinéma? C’était très choquant !

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    • Nati

      Absolument d’accord pour les ouvreuses, quand j’y suis allée le 15 mars le placement a continué toute la 1ère demi-heure ! et pour le public, certains prenaient des photos avec des mégas flashs sans se soucier de savoir si cela pouvait gêner ou surprendre les artistes …

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