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James Thierrée et son double Raoul

Lundi 2 janvier. Raoul de James Thierrée au Théâtre de la Ville.

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L’année 2012 ne pouvait pas mieux commencer. Après avoir lu des kilomètres de critiques enthousiastes sur James Thierrée, il était enfin temps d’aller découvrir l’énergumène de visu, avec son spectacle Raoul.

Que disent donc les critiques sur lui ? Que c’est un acteur formidable, un danseur formidable, et un créateur de génie. Soit, je suis d’accord sur les trois. Sauf que la soirée a laissé au final une impression mitigée.

James Thierrée est, incontestablement, un grand et vrai danseur. Lorsqu’il se met à bouger, tout s’assemble et tout s’allume. Voilà de la grâce à l’état pur. Son imagination semble totalement débridée et sans limite. Chaque geste est rempli d’une infinie poésie, un mélange de drôlerie, d’absurde, de mélancolie, et d’un je-ne-sais-quoi d’absolument indéfinissable. C’est un artiste, de ceux que l’on peut dire que ça s’écrit avec un grand A.

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Son spectacle Raoul est assez indéfinissable, et il serait bien difficile de le ranger dans une catégorie, sport typiquement français. Où est-ton d’ailleurs, dans la maison d’un SDF ou dans sa tête ? Et où est Raoul ? Un habile jeu de doublure jette le trouble à de nombreuses reprises, et l’on se demande qui est qui, ou si c’est le public qui commence à devenir schizophrène et voir double.

James Thierrée est seul sur scène, et nous présente son monde. Ce monde est délimité par de grandes voiles blanches. Au milieu, une petite baraque de tôle, plus ou moins accueillante selon le moment du spectacle. Dans ce monde, on y trouve des animaux étranges, des bruits bizarres, et des tornade de vents. Dans ce monde, la musique est un personnage à part entière. Raoul lui parle, la questionne, s’y confronte, se bat parfois avec elle.

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Imaginez en fait un monde qui n’est fait que de poésie. Chaque objet est propice à une idée, et peut prendre vie à tout moment. Un petit rien, comme des voiles affaissées qui se relèvent d’un coup pour devenir un décor, couple le souffle de beauté.

Alors qu’est-ce qui a cloché dans cette soirée ?

La danse est un savant rapport entre la technique et l’émotion. La première est un outil pour que la seconde puisse exister au maximum. Et ici, l’outil semblait bien trop petit pour cette imagination démesurée et onirique.

James Thierrée est magnifique quand il danse. Mais il est seul en scène, et ne danse pas durant toute l’heure 40. Un unique corps, et un corps de 37 ans, ne peut pas exprimer à lui seul toute cette poésie, ne peut pas aller jusqu’au bout des milliers d’idées abordées en si peu de temps sur scène. Cette matière si vivante a besoin de plus de supports pour s’exprimer pleinement.

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L’impression globale reste donc mitigée. Il y a des moments fulgurants de beauté, dès que ce corps se met en mouvement. Et d’autres passages, plus longs, lorsque la gestuelle redevient normale.

Chose curieuse, le public a beaucoup ri. J’ai vu dans Raoul beaucoup d’émotion, de tendresse, de mélancolie et de peur. Mais rien de profondément comique. Et ces rires parfois gras ont aussi un peu gêné ma soirée.

Commentaires (3)

  • Je suis d’accord avec toi moi aussi j’ai parfois été gênée par les rires. J’avais plus l’impression d’être dans un rêve étrange que dans une comédie .
    Je crois qu’il s’est peut être trop fait confiance et qu’il manque de la scénographie un peu plus travaillée.
    C’est tout de même un très joli spectacle 🙂

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  • Mano

    Bonjour,

    J’ai beaucoup aimé le spectacle, mais pas au point de me lever à la fin comme 50% de la salle.
    Je n’y ai pas vu beaucoup de danse. Par contre, j’ai été très sensible à cette façon de parler de la folie. J ai vu la schizophrénie chez Raoul et c’est ue prouesse d etre aussi délicat avec ce sujet.
    J ai eu la chance d y être u soir ou il y a eu peu de rire. Mais beaucoup d’enfants, ce qui m a étonnée.
    Finalement, j ai beaucoup plus aimé que “aurevoir parapluie” vu l année derniere et mon mari a préféré “le cirque invisible”.

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  • @ Petit Rat : Son prochain spectacle se fera en groupe, et sans lui sur scène. Je crois que c’est une bonne idée.

    @ Mano : Merci de votre avis ! La présence d’enfant m’a aussi étonnée, c’est plutôt difficile à suivre. James Thierrée garde une très grande finesse dans son propos, j’ai beaucoup aimé aussi cette idée du “double”, et de ne pas toujours savoir qui est qui.  

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