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La Nuit des Étoiles à Bruxelles

La Nuit des Étoiles au Cirque Royal de Bruxelles. Samedi 23 mars 2013.

Programme : Evgenia Obraztsova et Igor Kolb (Ballet du Mariinsky) – Talisman de Marius Petipa et Cendrillon d’Alexei Ratmansky ; Aleksandra Timofeeva (Ballet du Kremlin) – Russkaïa de Kasian Golezovsky et La Mort du Cygne de Machel Fokine ; Maia Makhateli et Jozef Varga (Het National Ballet) – Trois Gnossiennes de Hans Van Manen et Don Quichotte de Marius Petipa ; Maria Yakovleva et Kirll Kurlaev (Ballet de l’Opéra de Vienne) –  La Sylphide d’Auguste Bournonville et Moszkowsky Waltz de Masily Vainonnen ; Iana Salenko et Marian Walter (Ballet de l’Opéra de Berlin) – Elegie der Herzen de Raimondo Rebeck et le Grand Pas Classique de Viktor Gzovsky ; Aki Saito et Wim Vanlessen (Ballet Royal de Flandre) – Tchaïkovsky Pas de deux de George Balanchine ; Marianela Nunez et Thiago Soares (Royal Ballet de Londres) – Le Corsaire de Marius Petipa et Winter Dreams de Kenneth MacMillan ; Alessio Carbone et Delphine Moussin (Ballet de l’Opéra de Paris) – L’Arlésienne de Roland Petit et Arepo (solo Alessio Carbone) de Maurice Béjart.

À voir aussi : diaporama en coulisse lors de la répétition du spectacle.

Photos de Marc Haegeman : site officiel et Page Facebook

Nuit-des-etoiles

Un gala d’étoiles, ce n’est pas forcément le plus facile des spectacles à mettre en place. Il faut un programme intéressant, intégrant les grands classiques du répertoire (impossible de faire un gala d’étoiles sans le pas de deux de Don Quichotte), tout en réservant quelques surprises. Il faut quelques stars de la danse avec aussi des découvertes. Il faut des danseurs et danseuses habitué-e-s du genre, où il faut savoir envoyer beaucoup de brio en deux minutes, sans que le couple ne soit blasé de l’exercice. Il faut une belle salle qui se prête au spectacle, un décor ni trop vide ni trop kitchounet. Mal agencé, ce genre de spectacle devient un ennuyeux exercice d style. Bien ficelé, et voilà une soirée qui régale.

La Nuit des Étoiles de Bruxelles, première du nom (une deuxième est déjà prévue pour le 21 mars 2014) a fait partie de cette deuxième catégorie. Il ne faut pas s’attendre à un flot d’émotion lors de ce genre de soirée. Mais de la belle danse, de la joie de danser, de l’enthousiasme sur scène, du brio, il y en a eu. Grâce surtout aux quinze danseurs et danseuses invité-e-s, des stars mais pas que, en tout cas quinze artistes vraiment impressionnants.

Et malgré l’avalanche de virtuosité, mon coup de coeur de la soirée est allé à un moment d’émotion : la Cendrillon d’Evgenia Obraztsova. Tout le monde s’extasie sur cette danseuse. Et tout le monde a raison. Evgenia Obraztsova est une grand technicienne, mais surtout une grande musicienne. Ses bras, son haut du corps, sont d’un vrai lyrisme. Au delà de sa virtuosité, tout en elle respire l’émotion, la pureté. Pour ce pas de deux de Cendrillon, elle démarre seule en scène. Elle est là, la tête dans les mains tout à son chagrin. En un geste, elle arrive à raconter une histoire, à toucher le public, à faire vivre quelque chose. Même lorsqu’elle salut, Evgenia Obraztsova est fascinante. Je suis fan.

Talisman, son autre pas de deux – dansé aussi avec Igor Kolb – fut plus conformisme sur la forme. Un danseur viril et fougueux, une danseuse légère et virtuose.  Classique. Mais les deux allaient tellement bien dans leur rôle respectif qu’il était difficile d’y résister.

Talisman - Evgenia Obraztsova et Igor Kolb

Talisman – Evgenia Obraztsova et Igor Kolb

Les deux autres stars de la soirée – si l’on parle en terme de notoriété – étaient le couple du Royal Ballet Marianela Nunez et Thiago Soares. Leur pas de deux du Corsaire fut époustouflant de perfection. Oui, la perfection n’existe pas, encore moins dans la danse, mais l’adjectif “parfait” est pourtant le premier qui me soit venu à l’esprit. C’est peut-être la centième fois que le couple dansait ce pas de deux, et il faut bien dire qu’ils le faisaient un peu sentir. Leur deuxième morceaux était Winter Dreams, un composé de romantisme : gestes déchirants, pleurs et musique dramatique. Perfection toujours, émotion un peu moins.

Mais d’autres danseurs et danseuses ont pris le relais. Et dans la catégorie révélation, je demande Maia Makhateli, Étoile du Het National Ballet. Elle et son partenaire Jozef Warga ont fait un choix de pièces judicieux. La première est une oeuvre de leur compagnie, Trois Gnossiennes de Hans Van Manen. Loin des pas de deux néo-classiques un peu indigestes qui sont légions, voilà une chorégraphie intéressante, évitant les clichés, interprété par le couple avec une certaine force, loin d’une vision éthérée qui fait aussi florès. Le couple a clôturé le gala avec le pas de deux de Don Quichotte envoyé avec un panache irrésistible, un régal.

Don Quichotte - Maia Makhateli et Jozef Varga

Don Quichotte – Maia Makhateli et Jozef Varga

Tchaïkovsky Pas de deux, par les solistes du Ballet Royal de Flandre Aki Saito et Wim Vanlessen, fut aussi un très beau moment. Aki Saito se détacha particulièrement, avec une variation virtuose qui fut une véritable leçon de style. Quel plaisir aussi de découvrir Iana Salenko (oui, les femmes ont brillé ce soir) sans Daniil Simkin. En général, quand la danseuse vient à Paris, c’est pour danser (et se faire éclipser) par le jeune fougueux bondissant de l’ABT. Elle n’a pourtant rien à envier à la jeune star niveau virtuosité et présence sur scène, et sa variation du Grand Pas Classique fut enthousiasmante.

Tchaïkovsky Pas de deux - Aki Saito et Wim Vanlessen

Tchaïkovsky Pas de deux – Aki Saito et Wim Vanlessen

L’Opéra de Paris était représenté par Alessio Carbone et Delphine Moussin, qui a remis ses chaussons pour l’occasion. Pas de pièce virtuose, mais des moments très bien choisis, interprétés avec beaucoup de force. Alessio Carbone a d’abord débarqué tout seul pour la variation d’Arepo. Petit rire du public, c’est vrai, elle est impossible cette variation. Mais le danseur a su en faire quelque chose, sans jamais sombrer dans le ridicule, dans l’exagération. Il est revenu en deuxième partie avec Delphine Moussin pour les dix dernières minutes de L’Arlésienne, vraie respiration entre deux moments de bravoure. Les deux artistes étaient sur la même longueur d’onde, incroyablement présents, faisant vivre l’histoire en lui rendant tout son drame. Et à mille lieues de ce que l’on voit si souvent au Concours de promotion. À force d’être sous-distribué, j’en viendrais presque à oublier combien Alessio Carbone est un interprète précieux.

Arepo - Alessio Carbone

Arepo – Alessio Carbone

Si l’on doit parler de tout le monde, citons aussi le so cute couple du Ballet de l’Opéra de Vienne, Maria Yakovleva et Kirll Kurlaev, pour une jolie Sylphide, ou la présence scénique d’Aleksandra Timofeeva. La belle a choisi deux extraits marqué par le sceau d’Ouliana Lopatkina. Et il est difficile de passer après elle. Sa Russkaïa est ainsi enjouée et pétillante, mais bien loin de la désarmante simplicité de la Grande Ouliana. J’aimerais bien voir cette danseuse dans un pas de deux plus traditionnel pour me faire une véritable idée. Tant mieux, elle est aussi l’invitée du gala Noureev & Friends à Paris le juin prochain.

Commentaires (2)

  • Joelle

    Cela a dû être une belle soirée… Amélie la chanceuse !!!

    Alessio C. a l’air d’être pas mal distribué dans le prochain spectacle à Bastille (Mahler/Neumeier), alors on croise les doigts pour lui !

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