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Les Enfants du Paradis : épisode 3 et les adieux de José Martinez

Vendredi 15 juillet. Les Enfants du Paradis de José Martinez par le Ballet de l’Opéra de Paris, au Palais Garnier. Avec José Martinez (Baptiste), Agnès Letestu (Garance), Florian Magnenet (Frédérick lemaître), Vincent Chaillet (Lacenaire), Clairemarie Osta (Nathalie), Caroline Robert (Madame Hermine) et Yann Saïz (le Comte).

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(Photos : Cams)

Il serait un peu vain de faire un compte-rendu comme les autres. José Martinez n’a pas dansé le rôle de sa vie vendredi soir, mais ce n’était pas très grave. Il y avait chez son Baptiste ce qui le caractérise : des lignes élégantes, une belle danse, et une poésie rêveuse dans le regard. Son solo était triste, mais par son personnage, ou par la pensée que c’était la dernière fois ? 

Sa partenaire était celle de toujours, Agnès Letestu, déchaînée en Garance. Leurs pas de deux étaient complices, avec un peu de Lac des Cygnes par instants. Ces moments de couple sont restés comme les plus beaux passages du ballet, avec ceux des pantomimes, réalisés avec beaucoup de grâce.  

Rideau. Saluts habituels. Rideau. Puis José Martinez, seul en scène, les pieds ans les confettis. La salle se lève, dans la lumière, pour 1/4 d’heure d’ovation. Des ballons jaune et rouge, les couleurs de l’Espagne, tombent des coulisses avant les rituelles pétales de roses. José Martinez salue, re-salue. Va même traverser l’orchestre pour se prendre un petit bain de foule au parterre. Il est là, la main sur le coeur, visiblement ému. Il semble avoir du mal à quitter le scène, multipliant les saluts sous les ovations du public. Toute la troupe était là, une partie sur scène maquillé aux couleurs de l’Espagne, une autre en coulisse, au son des “Bravo” et autres “Olé” tonitruants. 

José Martinez, je l’ai vu lors de mon premier spectacle, en 1996. Il jouait le jeune homme dans Le Loup de Roland Petit. Un temps où la génération Noureev brillait parmi les Etoiles, et où les Karl Paquette ou Jérémie Bélingard faisaient leurs armes dans le corps de ballet.

Pour être honnête, ce n’est pas José Martinez que j’ai remarqué durant cette soirée, mais Aurélie Dupont. Lui, ce sera lors du second spectacle, le Coppélia de Patrice Bart, où il jouait Coppélius. Si aujourd’hui j’ai un avis mitigé sur ce ballet, sur le coup, j’avais été dans un état de ravissement total. Puis ce fut Capriccio, Don Quichotte, et pleins d’autres. 

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Durant mon adolescence, José Martinez n’était pas seulement José Martinez. C’était surtout José Martinez et Agnès Letestu. Le couple parfait, qui s’aimait à la vie comme à la scène. Ils étaient toujours tellement beaux en couverture de Danser. Quand j’ai recommencé à revenir régulièrement à l’Opéra, ils ne dansaient plus trop ensemble, même si je garde un souvenir enthousiaste de leurs Diamants. José Martinez, c’était ça : un danseur noble, aux lignes pures, le vrai prince charmant même si il s’est aussi illustré dans les rôles de méchants ou beaucoup plus contemporains, comme sa prise de rôle il y a quelques mois dans La Maison de Bernarda.

Les adieux d’une Etoile, c’est toujours un peu triste. Parce qu’il danse encore tellement bien que personne n’a envie de le voir partir. Mais c’est la vie, celle d’une compagnie. Son départ à la retraite a permis à un jeune danseur d’avoir un contrat début juillet. Après José Martinez, ce sera au tour de Clairemarie Osta de faire ses adieux l’année prochaine, puis Agnès Letestu dans deux ans, Nicolas le Riche dans trois ans, Aurélie Dupont dans quatre ans… 

Et après ces départs, il y aura qui ? 

C’est un peu la question que nous nous sommes posées, Fab, Cams, Elendae, Elodie et moi-même, au nouveau restaurant du Palais Garnier où nous nous sommes posées pour fêter la fin de la saison. 

Petite parenthèse gastronomique ? L’accueil fut très bien, classe, efficace, et très sympathique. L’ambiance est feutrée si l’on excepte notre table. Les plats sont bons sans être surprenants, mon dessert (l’Opéra) très bon. Seul point noir, le prix, trop élevé par rapport à ce que l’on a dans l’assiette. Et l’absence de bouteille de vin de 50 cl. 

Bref, après ces départs, il y aura qui ? Une question qui est pour l’instant restée sans réponse niveau masculin. Et c’est ça qui est un peu inquiétant. Nous aussi nous avons envie de dire, dans 30 ans, aux nouvelles générations de balletomanes : “Mais la génération 2012, elle était si exceptionnelle, tu ne peux pas te rendre compte, ça n’a tellement rien à voir aujourd’hui“.  Il y en a certains qui ressortent du lot, qui brille. Mais pas vraiment qui soulève l’enthousiasme général. 

Fin de saison oblige, chacune a allumé Radio Potin y est allée de son souvenir de l’année. Pour des raisons inexpliquée, “Stéphane Bullion” est l’expression qui a dû revenir le plus souvent sur la table. Rien à voir avec José Martinez finalement. Nous fermons le restaurant, chacune avec sa petite affiche souvenir du danseur sous le bras. Lui s’en va en Espagne, son pays natal, où il va diriger la Compagnie nationale de danse, un sacrée défi. Reste pour nous les souvenirs, et l’impression d’avoir vu sur scène pendant toutes ces années un Danseur, un vrai. 

Commentaires (6)

  • > Bref, après ces départs, il y aura qui ?
    Hier, j’ai trouvé Florian Magnenet absolument époustoufflant !

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  • et oui grand débat sur la relève qui nous a occupé une grande partie de la soirée!

    Belle soirée effectivement pour un danseur qui s’il n’étais pas mon favori m’aura marqué. Et bien d’accord pour le couple Letestu/ Martinez, juste culte!

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  • Fab

    J’aime bien ton commentaire sur l’absence de bouteille de 50 cl ou l’art de ne pas perdre le Nord 😉 Sinon, c’est vrai que le départ de José Martinez, et avant ceux de Manuel Legris et Kader Belarbi marquent une étape. Dans quelques années, ce sera le tour d’Agnès Letestu, Nicolas Le Riche, Aurélie Dupont. L’an prochain, Clairemarie Osta…Ce sont de très bons danseurs et de grandes personnalités…ça va faire un vide.

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  • Merci pour ce très bel article. Je ne suis pas à Paris et n’ai pu assister aux adieux de José Martinez. Côté masculin, je me pose la même question même si j’aime beaucoup Karl Paquette. C’est rare une réelle présence sur scène comme celle de Kader Belarbi que j’appréciais énormément et pas uniquement dans les chorégraphies de Béjart jouées par l’Opéra de Paris, José Martinez ou Nicolas Le Riche…

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  • dance7

    oui, merci pour ce bel article, les dernières soirées de la saison ont toujours quelque chose d’indéfinissable. c’est encore plus vrai lorsqu’elles sont synonyme d’un départ d’un dnseur étoile encore très présent. J Martinez, oui, une personnalité marquante, attachante. Il va manquer au public parisien. Souhaitons lui beaucoup de réussite à Madrid avec une compagnie dont le devenir est à tracer. Pour l’avenir, exigence et liberté pour les jeunes danseurs, à eux de s’affirmer !

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  • @ Joël : Magnenet a bien assuré, c’est vrai. Pour ma part je n’irai pas jusqu’à “époustouflant”, mais c’est un bon premier danseur.

    @ Cams : Et à mon avis, cette question n’a pas fini de nous faire parler ! 😉
    @ Fab : La danse, c’est bien, mais ne jamais perdre de vue les vraies choses essentielles de la vie 😆
    @ Anne-Laure : Martinez était une “vraie” étoile, au statut incontestable même pour quelqu’un qui ne l’appréciait pas. C’est rare en ce moment.
    @ Un défi plus que de taille : remettre au classique une compagnie qui n’en a plus fait depuis 10 ans, dans un pays frappé par la crise (et l’on sait tous-tes ce que devient un budget culturel par les temps qui courent). Sa nomination est en tout cas un signe fort, j’espère qu’elle sera suivi de moyens. Pour les d’jeunes, oui, à eux de s’affirmer, à la direction aussi de leur laisser une chance, ce qui n’est pas toujours le cas actuellement.  
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