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Merce Cunningham Dance Company : clap de fin

Jeudi 15 décembre 2011. Legacy Tour de la Merce Cunningham Dance Company, au Théâtre de la Ville. Soirée composée de Suite for five (1956-1958), Quartet (1982) et XOVER (2007).

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L’ambiance était particulière au Théâtre de la Ville. Car Legacy Tour,cette tournée de la Merce Cunningham Dance Company n’est pas une tournée comme les autres. C’est la dernière. Le 31 décembre 2011, la troupe cessera d’exister, comme l’a souhaité son fondateur Merce Cunningham, décédé le 26 juillet 2009.

Selon sa volonté, la troupe est partie en tournée un peu partout dans le monde pendant deux ans. Paris est sa dernière étape, avant une ultime représentation à New York, le soir de la Saint-Sylvestre. Ces dates françaises sont donc les dernières chances pour le public de voir des œuvres de Cunningham dansées par sa propre troupe, qu’il a façonné pendant presque 60 ans.

Avant même le lever de rideau, les danseur-se-s avaient acquis les spectateur-rice-s à leur cause. Mais là n’était pas vraiment la question. Plus qu’une soirée inventive ou surprenante, il s’agissait surtout de rendre un dernier hommage au chorégraphe, de montrer sa façon de faire, de travailler. Ce spectacle était avant tout une leçon d’histoire de la danse.

La première pièce présentée, Suite for five, est ainsi un véritable testament de Merce Cunningham. La façon dont elle a été créée est en soi un parfait résumé de son mode de fonctionnement. Le chorégraphe a inventé son ballet de son côté. John Cage, le compositeur avec qui il a énormément collaboré, a composé la partition du sien. La première rencontre entre les deux s’est passée sur scène.

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Plus de 50 ans après la création, Suite for five ne résonne forcément plus de la même façon. Les danseur-s-es respirent maintenant avec cette musique, et il est étonnant de constater à quel point ces deux forces font maintenant corps. Il faut également s’imaginer le certain choc esthétique qu’a dû provoquer cette pièce lors de sa création, avec cette gestuelle si particulière, ce positionnement, presque cette économie de mouvement. Mais en soi, Suite for five n’a pas forcément bien vieilli, et reste visuellement datée (pas aidé par les costumes, il faut le dire, mais c’est un parti-pris).

Quartet, la deuxième pièce présentée, créée en 1982 sur une musique de David Tudor, possède ainsi plus de force. Contrairement à Suite for five, qui était une véritable (et formidable – mais seulement-) étude de style, Quartet possède un minimum de propos. Cinq danseur-se-s forment tour à tour des groupes et des individus. Comment interagit l’ensemble face à la personne, comment cette dernière essaye de s’intégrer, ou de vivre sa vie à côté ? Les artistes se mêlent et de démêlent, toujours porté-e-s par ce style si propre au chorégraphe américain.

XOVER, l’avant-avant dernière pièce de Merce Cunningham (créée en 2007), boucle la boucle de cette soirée. La gestuelle, la façon de travailler, la musique (celle de John Cage, encore et toujours), le style des costumes n’ont pas changé. Pourtant, cette pièce ne ressemble à aucune des deux autres. Voilà le propre des chorégraphes : savoir se renouveler constamment, tout en gardant une ligne directrice d’une logique implacable en plus de 60 ans de création. 

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Intellectuellement, cette soirée Cunningham fut indéniablement intéressante. Émotionnellement, je reste plus sensible aux bondissements de Forsythe qu’à la certaine austérité de feu Merce Cunningham.

Merce Cunningham Dance Company au Théâtre de la Ville. 1er programme jusqu’au 18 décembre. 2e programme (RainForest, Duets et BIPED du 20 au 23 décembre). Une journée autour de Merce Cunningham sera également organisée le dimanche 18 décembre, avec ateliers pour enfants, cours de danse, rencontres et projections.

A noter que Merce Cunningham sera au programme de la saison 2012-2013 du Ballet de l’Opéra de Paris. Un Jour ou deux devrait être programmé en novembre prochain, lors d’une soirée mixte avec a priori une création de Marie-Agnès Gillot, ainsi que peut-être Suite for five.

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