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Soirée Hommage à Roland Petit, épisode 3

EDIT : Roland Petit est mort le 10 juillet 2011, à l’âge de 87 ans.

Il se passe des choses incroyables aujourd’hui. Non seulement je choppe une place pour Le Lac des Cygnes du 21 décembre avec la sublime Lopatkina en à peine 10 minutes de lutte téléphonique, mais je finis mes compte-rendus des soirées Roland Petit à peine 10 jours après la dernière.  

Résumé de la soirée du 6 octobre

Le Rendez-vous

Il était inutile pour tout danseur de vouloir égaler Nicolas Le Riche. Yann Saïz a eu la grande intelligence de ne pas copier l’Etoile, mais d’interpréter à sa manière le personnage du jeune homme. La danse, c’est aussi cela : voir un spectacle très différent d’un soir sur l’autre grâce aux interprètes, qui revisitent avec leur sensibilité les ballets.

Plus qu’un poète dans la lune, Yann Saïz s’est glissé dans la peau d’un jeune dandy parisien. C’est un homme, tout prétentieux de sa jeunesse, qui débarque sur scène. Peut-être sort-il d’une soirée bien arrosée dans un club de jazz. Il n’a en tout cas peur de rien, et surtout pas du destin. Que peut-il arriver à un jeune parisien avec la vie devant lui ? Il se joue du sort et du sombre destin en noir, jusqu’à tomber sur Alice Renavand. Elle aussi est beaucoup plus terrienne. Ce n’est pas une créature venue d’un autre monde, mais une meurtrière qui compte bien tuer le jeune homme. Cruelle, c’est avec un sombre dédain qu’elle lui balance sa lame de rasoir une fois son crime accompli.

L’histoire en devient certes moins poétique, et perd peut-être ce “petit quelque chose”, mais la trame narrative fonctionne bien. Et le bossu, le corps de ballet, la musique et les décors se chargent de la poésie. Même si il n’y a rien à reprocher à Alice Renavand, je commence néanmoins à voir ses limites, et à penser qu’elle fait peut-être un peu toujours la même chose. 

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Le Loup

Ce fut très particulier. Stéphane Bullion était toujours dans son trip du jeune chiot, même si le haut du corps me semblait plus travaillé et en place. Quant à la jeune fille, il faut tout de suite oublier la version éthérée de Laetitia Pujol. Ludmila Pagliero est une tornade qui ressemble plus à Lise qu’autre chose, et qui prend vite le dessus sur le loup. C’est elle qui dirige. Mais quoi de plus normal face à un chien apeuré ? On est très loin du conte inquiétant des premières distributions, limite dans la farce. Mais à ma grande surprise, je dois dire que ça a plutôt bien marché. Moi qui cherchait des interprétations différences, je suis ici servie. Mais le couple fonctionne, et on y croit, c’est le principal.

Les problèmes arrivent quand la jeune fille découvre la vérité sur son fiancé de loup. Car Ludmila Pagliero reste dans le registre du tragi-comique. Elle exagère tout, et je n’y crois plus du tout. Pire, face à ses grimaces, j’ai l’impression d’avoir été transportée en deux secondes dans un épisode d’un dessin animé de Tex Avery. Le choque des cultures est grand, et j’aurais volontiers explosé de rire si je n’avais pas été assise à côté de Pierre Lacotte. La fin du ballet est sauvé par un corps de ballet, encore une fois, très investi. Mais je crois m’être fait une opinion des qualités d’actrice de Ludmila Pagliero.

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Le Jeune Homme et la Mort

Disons le tout net. Si j’ai retenté une troisième fois ce ballet, c’était pour y voir Nicolas Le Riche. Avec Eleonora Abbagnato, il nous a livré un grand moment de danse, un moment d’émotion universel, 20 minutes qui résume le pourquoi j’aime la danse. Exprimer des choses uniquement avec son corps, c’est autrement plus dur qu’avec des mots. Mais quand ça marche, il n’y a rien de plus prenant.

Il est difficile de définir le personnage du Jeune Homme par Nicolas Le Riche. Il est tour à tour dominant, dominé, apeuré, violent, fou, conscient de sa mort proche, furieux, combatif. Indescriptible. Quelques chose d’à la fois monstrueux techniquement, terriblement émouvant, et rempli d’une poésie étrange. Complexe. Un grand artiste tellement au dessus des autres qu’il est difficile de le décrire. Avec Eleonora Abbagnato, ils formaient un duo totalement en symbiose artistique. Je l’ai déjà dit ici, mais pour moi ce ballet est un chef d’oeuvre. Quand il est en plus porté par des interprètes d’exception, on touche le sublime. 

Il y a eu néanmoins un petit accro qui m’a un peu gâché mon spectacle. A la fin, lors du retour de la Mort, le voile rouge d’Abbagnato s’est coincé dans le décor. Un technicien a réussi à le débloquer, mais à la toute fin. Et pendant ces 30 secondes, je n’ai fait que me demander comment elle allait faire pour la pause finale. C’est ça de trop connaitre les ballets, car je pense que ceux et celles qui n’avaient jamais vu la chorégraphie ne se sont rendus compte de rien. 

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© Photos : Rêves impromptus

Commentaires (2)

  • on regarde trop les détails à force malheureusement au lieu de se lassier embarquer.

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  • @louison:C’est complètement ça ! J’aimerais bien parfois retrouver mon oeil de “je vais voir mon premier ballet”.

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