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Un gala Karl Paquette et sa révélation Marine Ganio

Dimanche 23 janvier, une foule d’habitué-e-s de Garnier s’est courageusement aventurée en banlieue parisienne, à Saint-Maur, pour un gala réunissant plusieurs artistes du Ballet de l’Opéra de Paris dans des grands pas de deux classiques, sous la houlette de Karl Paquette.

Ces galas sont l’occasion idéale pour découvrir de jeunes danseur-se-s dans des rôles de solistes, ce qu’ils/elles n’ont pas vraiment l’habitude de faire le reste de l’année dans la compagnie. Et là encore, ça n’a pas raté. Une personne que l’on ne voit jamais seule en scène a véritablement brillé cet après-midi, et a révélé sa vraie nature de soliste. J’ai nommé Marine Ganio.

Marine, sœur de l’étoile, jamais mises en valeur dans le corps de ballet. Elle m’avait déjà fait forte impression lors de la soirée Danseur-se-s/Chorégraphes quelques jours plus tôt, elle m’a ici vraiment impressionné.

Deuxième extrait du spectacle, La Belle au Bois Dormant, pas de deux du troisième acte. Marine Ganio est d’abord très sûre techniquement. Elle avance, sans faille, avec facilité et grâce. Surtout, elle en impose. Elle arrive sur scène, elle ne s’excuse pas d’être là. Elle est Aurore, la jeune femme devenue adulte dans les bras de son prince. Elle rayonne sur scène, charme le public et emballe le tout avec beaucoup de brio et de naturel. Bravo !

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Son partenaire Pierre-Arthur Raveau n’a pas démérité non pus. Certes, il a les défauts de sa jeunesse, une allure de jeune fougueux bondissant à mèche (syndrome Mathieu Ganio en force) qui peut parfois être énervant, ou cette pointe d’anxiété dans le regard et cette légère crispation de la mâchoire avant d’entamer une prouesse technique. Mais tout de même, il est difficile de résister à ses sauts qui s’envolent, son aisance sur scène, sa fraîcheur, son enthousiasme et ses facilités à la belle danse. Et puis, avec son air un peu naïf de jeune premier, il est vraiment trop choupinet. A suivre de près.

Ce couple est revenu un peu plus tard pour un pas de deux du deuxième acte de La Sylphide. S’il n’y a rien non plus à leur reprocher, je suis moins rentrée dans leur histoire, et me suis un peu ennuyée. Mais cette impression n’est que pure subjectivité.

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Bref, Marine Ganio m’a fait passé une belle après-midi. Et pourtant, ce n’était pas gagné au vu du premier extrait du spectacle, le pas de six de Raymonda. Ou une pure monstruosité technique. C’était fébrile, crispé, et pas très à l’aise. Les deux garçons Fabien Révillion et Yann Chailloux nous ont fait un vaste portnawouak dans leur duo, tandis que les jeunes Marion Barbeau et Silvia Saint-Martin ne semblaient pas totalement maîtriser leur variation, au demeurant, vraiment difficiles et longues. Héloïse Bourdon a fait une jolie variation de la claque, mais c’est vraiment lors du final que les danseur-se-s lâchent enfin la pression, et se mettent véritablement à danser. Le tout sous l’impulsion de Karl Paquette, très investi artistiquement dans son rôle. 

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Le spectacle a continué, après Raymonda et La Belle, par le célèbre pas de deux du deuxième acte du Lac des Cygnes. Exercice difficile que de transmettre de l’émotion, sans tout ce qu’il y a avant et les 32 cygnes (c’est quand elles ne sont plus là que l’on se rend compte de leur importance). Karl Paquette et Héloïse Bourdon forment un très joli duo, tendre et complice. La jeune danseuse semble déjà faire un vrai travail sur Odette, que ce soit artistiquement ou au niveau des bras. Tout n’est bien sûr pas abouti, mais il y a déjà une véritable réflexion, et je suis vraiment curieuse de la voir à l’œuvre un de ses jours dans le ballet complet.

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Vient ensuite Giselle, le pas de deux de l’acte II, interprété par Silvia Saint-Martin et Yann Chailloux. Là encore, l’exercice n’est pas évident. Les deux danseur-se-s y ont mis beaucoup d’eux, et cela a donné un plutôt joli moment. Silvia Saint-Martin semble faite pour les rôles romantiques, et elle a vraiment le physique de sa Giselle. Yann Chailloux se défend des difficultés techniques. Bref, il/elle s’en tirent bien.

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La Sylphide enchaîne, suivi d’un pas de deux de Roméo et Juliette, par Marion Barbeau et Fabien Révillion. Les deux artistes ont choisi la voie de la gaieté. Il/elle sont jeunes, frais, pleins d’amour et d’espoir dans la vie… et ça s’arrête un peu là. Le pas de deux est plutôt long, et la monotonie des sentiments exprimés nous le fait un peu sentir. Marion Barbeau se distingue toutefois. Voila une danseuse sûre techniquement, fraîche comme une rose, rayonnante, heureuse d’être sur scène. Et cela fait plaisir à voir.

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Le spectacle se termine en beauté avec le duo d’Esmeralda, interprété par Karl Paquette et Héloïse Bourdon, qui ont eu décidément tous les morceaux de bravoure. Les deux artistes sont brillant-e-s et nous offre un joyeux moment de danse. ça tourne, ça saute, ça fouette à toute vitesse et ça nous emporte sans aucune difficulté.

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Les applaudissements sont nourris et mérités, non seulement pour ce beau final, mais pour l’ensemble du spectacle, plutôt sympathique et qui a su mettre en valeur chacun-e des jeunes danseur-se-s présent-e-s.

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© Photo : Danses avec la plume

Commentaires (12)

  • Swan London

    Très intéressant chronique, je vous remercie beaucoup.
    Merci beaucoup pour les photos.
    Je serais ravi de voir dans un avenir proche Silvia Saint-Martin dans Giselle.

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  • Ah, comme vous me faites regretter de ne pas avoir pu assister à cette après-midi…

    Le programme était joli… Mais, je pensais bien que le pas de six de Raymonda en ouverture était un peu “difficile”…
    Le choix d’un pas d’ensemble, aussi charmant mais plus facile techniquement eut été préférable sans doute ; la difficulté des pièce présenté n’est pas synonyme de qualité de la danse… Mais cela, les organisateurs l’oublient… Parfois…

    Pour Mlle Bourdon, elle est très prometteuse, c’est certain.. Et son travail que vous signalez sur Odette ne me surprend pas, malgré sa jeunesse….
    Attendons encore un peu et elle dansera le Lac, c’est certain… je le lui souhaite, je nous le souhaite…

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  • @Swan London :

    Mlle Saint-Martin est un peu jeune encore pour un rôle si éprouvant ; sans doute très jolie paysanne, peut-être émouvante Willi, mais… La grâce, le beau jeu de james et un lyrisme certain ne suffisent pas pour la scène de la folie…

    Soyons patient !

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  • elendae

    Karl Paquette aurait-il donc réussi un sans faute ?? Je l’apprécie beaucoup mais je dois avouer que je ne l’ai jamais vu réussir parfaitement une réception jusqu’à présent 😆 ce qui n’enlève rien à son charisme !!

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  • @Swan London : Merci !

    @Fée Dragée : je partage ton avis pour Silvia Saint-Martin

    @Elendae : c’est vrai que j’ai peu parlé de Karl Paquette… qui a fait du Karl Paquette  😆  Même s’il a assuré pour l’Esmeralda finale, il s’est tout de même mis en rentrait par rapport aux jeunes pousses, même dans Le Lac, où il a surtout mis en valeur Héloïse Bourdon.

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  • Tu ne les suis pas jusqu’au Japon mais c’est tout juste :p
    Je n’ai pas assisté à ce gala mais j’ai eu l’occasion de voir Marine Ganio à la soirée des danseurs-chorégraphes et elle m’a bien plu – plus que son frère, mais ça, c’est une évidence. Je ne sais pas si j’aimerais ses interprétations (mais pour ça, encore faudrait-il qu’elle soit distribuée), mais ses mouvements, posés, ont une densité qui relève d’une maturité artistique assez surprenante pour son âge et sa classe (du coup, comme le disait le petit rat, c’est sa classe qui devient surprenante…).
    Quant à Héloïse Bourdon, elle me donnerait vraiment envie d’aller revoir le Lac des cygnes. Je crois qu’elle me donnerait envie de voir à peu près tout, en fait.

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  • lulu

    J’ai eu la chance de découvrir ce Gala grâce à Fée Dragée que je remercie. J’ai passé un après- midi de rêve . Effectivement Karl Paquette a été royal de générosité pour ces jeunes danseurs que son spectacle mettait très en valeur et tous ont rivalisé d’intelligence et de maitrise d’eux même en proposant des variations difficiles qu’ils ont éxécutés avec un talent fou,ce qui a permis d’apprécier le potentiel que sera la relève de cette superbe Compagnie. Si Marine Ganio a réellement surpris par ses qualités artistiques, sa belle technique, et sa présence en scène, ce qui a réjouis le public, très sensible à son travail, Héloïse Bourdon a été pour moi le Must du Spectacle. Cette jeune fille est éblouissante en tous points et dans chacun des différents registres qu’elle a abordé aux côtés de Karl Paquette, que ce soit le Lac, Esmeralda ou la Claque de Raymonda, elle s’est montré virtuose . C’est une danseuse exceptionnelle que j’aime infiniment pour sa classe unique et son jeune tempérament éclatant, comme j’aime Eléonora Abbagnato, Myriam Ould Brahm ,Aurélie Dupont et Agnès Letestu qui sont de vrais petits bijoux. Merci Fée Dragée. Je me relis et je vois que je me sui laissée aller au plaisir de parler de ce que j’aime, telle une Fée …électricité. Bravo à ce Forum qui est bien sympathique et tellement libre.

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  • 😯 @lulu : En tout cas, vos remerciement me font bien plaisir…

    Oui, il y a dans la compagnie des éléments pour assurer la relève, même s’ils sont jeunes… Et qu’en attendant on vit une sorte de “moment creux” à mon sens… Etant donné aussi que ne sont pas distribués comme ils le devraient certains danseurs méritants…

    Certain public demande des Etoiles ! Que voulez-vous…

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  • licorne

    Merci pour le commentaire bien vu de dimanche à St Maur
    Pour moi j”ai eu une impression un peu plu Fun sur l’ensemble.
    Un poil plus enthousiaste sur ce que j’ai vu et surtout découvert comme talent chez certains comme Marine, Sylvia et Fabien: c’était Super!!!!.
    Je suis d’accord aussi sur le duo Karl Paquette Héloïse Bourdon qui fonctionne très bien, complicité et très belles prestations “d’étoiles” … de la très belle danse, pour faire regretter encore à Fée Dragée de ne pas être venue. Vraiment, le lac, par exemple, c’était mieux que TOUT ce que j’ai vu à Bastille -excepté LA Russe-.! On espère tous des bonnes distrib pour la suite de la saison pour ces jeunes incroyables qui montent , qui montent. !!! Mais il faut être patients et les jeunes aussi dans des galas comme ça, se rôdent bien pour le futur-proche, d’ou la bonne surprise avec Marine.Un grand BRAVO à Karl Paquette pour des initiatives courageuses et belles ,dignes d’un vrai prince TRES Bon esprit Monsieur Paquette.

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  • Regain

    Karl Paquette est un artiste extrêmement généreux et sympathique. Ce n’est peut être pas l’Étoile du siècle mais moi, je l’adore… :-)(-:

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  • @Mimy : j’ai franchi le périph sud quoi, je suis une aventurière lorsqu’il s’agit de danse 😆

    @Lulu : Héloïse a vraiment assuré, et elle fait l’unanimité. Mais pour ma part, ce n’est pas forcément la jeune artiste qui me touche le plus.

    @Licorne : Oui, l’initiative de Karl Paquette est vraiment à saluer. Ils sont finalement assez peu d’étoiles à faire ça aujourd’hui.

    @Regain : Je vois très bien ce que tu veux dire 😉 

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  • lulu

    @Amélie. Je comprends très bien ce que tu veux dire à propos de Héloïse , parce que moi-même qui l’adore aujourd’hui ,elle ne s’est pas imposée d’office à mes yeux comme la meilleure parmi les jeunes qui ont de l’avenir. En fait je dirais que son capital sympathie, qui fait aujourd’hui l’unanimité, comme tu le soulignes, elle l’a acquis par son travail qui l’a énormément transformée depuis qu’elle a quitté l’école à 16 ans et on la remarque surtout aujourd’hui, par sa différence. Plus jeune sujet, de plus en plus jolie sur scène, de plus en plus solide, à mesure qu’on lui fait confiance, très souriante. Elle irradie totalement sur scène . Bref, ce côté sérieux, volontaire, intelligent et simple, avec un petit quelque chose d’indéfinissable en plus, fait qu’elle force quelque part l’admiration. Je reste persuadée qu’avec la maturité et si elle reste dans cet état d’esprit, ell e va convaincre de plus en plus et réussir à s’imposer sans éclabousser les autres, C’est ça qui me plait dans son travail et qui m’intéresse chez cette jolie danseuse discrète. Celà dit, il y a bien sûr d’autres talents en herbe à l’Opéra, que l’on prend plaisir à voir s’épanouir et qui ont fait eux aussi l’unanimité lors des représentations du Lac, ou le Corps de Ballet était magnifique, et celà, grâce essentiellement à ses interprètes. Quoiqu’il en soit, l’ascenssion est longue, périlleuse ,difficille et toujours incertaine ce qui demande pour ceux que l’on aime bien et que l’on soutient beaucoup d’humilité et de persévérance.

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