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“Avec FrancenDanse, nous voulons montrer sur scène toute la diversité du ballet en France”

Installé depuis déjà plusieurs saisons au Théâtre des Champs-Élysées, le programme TranscenDanses s’apprêtait à vivre une rentrée morne après l’annulation de plusieurs troupes internationales. Mais c’était sans compter la motivation et l’énergie de cette équipe de production, qui pour compenser ce manque de spectacle, a monté en quelques mois le programme FrancenDanse. L’idée ? Montrer sur une même scène toute la diversité du ballet en France avec quatre troupes (Ballet de l’Opéra de Lyon, Ballet de l’Opéra de Bordeaux, Malandain Ballet Biarritz et Ballet du Capitole), venant avec chacune un solo ou pas de deux de leur répertoire. Parce que la danse est toujours vivace en France et a plus que jamais besoin de rencontrer à nouveau son public. Vony Sarfati, membre des Productions Sarfati qui produit FrancenDanse, nous en dit plus sur cette soirée attendue le 15 octobre au Théâtre des Champs-Élysées.

Edit : le Ballet de l’Opéra de Paris sera finalement aussi présent, avec Ludmila Pagliero et Hugo Marchand.

L’affiche de la soirée FrancenDanse.

Comment est venue l’idée du spectacle FrancenDanse ?

J’y ai pensé en en discutant avec les directeurs et directrices des compagnies en juillet dernier. Avec l’annulation des Ballets Suédois, notre rentrée danse était bancale. Et la danse française vivait de grandes souffrances. La danse, c’est le corps, l’échange, le toucher, le contact… Tout ce qui nous est interdit avec la Covid. Mais nous ne pouvions pas avoir une rentrée parisienne sans la danse, elle est pour beaucoup essentielle dans nos vies.

 

Quelle est la ligne artistique de FrancenDanse ?

D’abord, c’est tout simplement la joie et la fête de se retrouver ensemble, de danser et de voir de la danse dans un théâtre et non pas en vidéo. Ensuite de montrer sur scène toute la diversité du ballet en France. Les quatre compagnies présentes – le Ballet de l’Opéra de Lyon, le Ballet de l’Opéra de Bordeaux, le Ballet du Capitole et le Malandain Ballet Biarritz – ont eu le même cahier des charges : 15-20 minutes en scène pour y proposer ce qu’ils voulaient, sous forme de duo ou solo, pour montrer la marque de fabrique de leur compagnie. L’idée était de leur donner un plateau sur lequel ils puissent s’exprimer, danser, y faire des choses. Chaque direction a fait son choix dans son coin, mais au final le programme est très équilibré. On se rend compte de la diversité et de la complémentarité de la danse française, dans leur programme comme dans leurs talents.

Le Ballet de l’Opéra de Lyon vient avec le solo Period piece de Jan Martens, créé en septembre. Kader Belarbi propose un avant-goût de son Toulouse-Lautrec avec un pas de deux, une création qui s’annonce passionnante (ndlr : à venir en novembre à Toulouse). Le Malandain Ballet Biarritz vient avec un extrait de Mozart à 2. Nous n’avions jamais travaillé avec cette troupe, elle n’a pas besoin de nous pour tourner. Mais j’ai été très touchée par l’enthousiasme de Thierry Malandain qui nous a dit oui presque tout de suite. Il est une force très importante du ballet en France, c’est un créateur. Mais je suis reconnaissante aux quatre directeurs et directrices d’avoir accepté cette idée un peu folle ! Ce sera une soirée vraiment inédite, pleine de surprise, surtout très joyeuse.

Mozart à 2 de Thierry Malandain – Malandain Ballet Biarritz

Si l’on parle de la diversité du ballet en France, l’on pourrait penser à d’autres troupes, comme le Ballet Preljocaj, les Ballets de Monte-Carlo ou le Ballet du Rhin. Vous avez fait appel à eux ?

Oui, aux trois, mais ces compagnies étaient déjà en spectacle à ce moment-là. Nous avions déjà travaillé avec les deux premières, jamais avec le Ballet du Rhin mais cela m’intéressait beaucoup de l’avoir dans le programme, il est une force importante de la danse en France. Je ne suis pas partie de mes connaissances ou mes connivences personnelles pour monter FrancenDanse, je voulais avant tout un tableau représentatif de ce qui se passe dans le ballet en France. Notre saison Transcendanse invite principalement habituellement des compagnies internationales car nous considérons que les compagnies nationales n’ont a priori pas besoin de nous pour venir danser à Paris, il y a pour cela un réseau de théâtres nationaux. Mais ce n’est pas toujours le cas dans les faits.

Ce spectacle, c’est d’abord la joie et la fête de se retrouver ensemble, de danser et de voir de la danse dans un théâtre et non pas en vidéo

Le Ballet de l’Opéra de Paris aurait dû donc pu avoir toute sa place dans ce programme. Vous l’avez invité ?

Oui, absolument. Pour moi, le Ballet de l’Opéra de Paris est la mère de toutes les compagnies, notre culture française de la danse vient principalement, je pense, de cette troupe. J’ai contacté Aurélie Dupont. Il y a l’envie commune de pouvoir participer à cette soirée mais la situation est compliquée chez eux. Pour l’instant, cela ne se fait pas, mais j’espère que nous aurons une bonne surprise le 15 octobre. Et puis ce serait le devoir du Ballet de l’Opéra de Paris d’être présent, il manquerait quelque chose si l’on parlait du ballet français sans cette compagnie. Un solo ou duo de leur part nous permettrait de proposer un ballet de l’école française, qui manque un peu au programme. EDIT : le Ballet de l’Opéra de Paris sera finalement présent, avec Les Trois Gnossiennes de Han van Manan par Ludmila Pagliero et Hugo Marchand.

Period Piece de Jan Martens – Ballet de l’Opéra de Lyon

D’un point de vue de la production, en ces temps si difficiles pour la culture, comment parvient-on à monter de nouveaux projets comme FrancenDanse ?

Le projet s’est monté en 15 jours, alors qu’il nous faut en général deux à trois ans pour monter un spectacle. La billetterie court sur un mois, n’a donc pas été comprise dans les abonnements, c’est très difficile. Mais j’avais vraiment l’impression que l’on devait le faire. C’est en faisant que l’on continuera à faire vivre le spectacle vivant. Sinon c’est une mort anticipée et je ne peux pas l’accepter. Il faut y aller malgré les difficultés et le fait que le public revient timidement dans les salles, du fait de l’incertitude de la situation. Pour le financement, nous avons puisé dans nos réserves. Si le public est bien là, le spectacle ne se fera pas à perte. Nous avons besoin de montrer au public que la danse est toujours vivante, qu’elle existe et qu’elle a besoin d’exister. Et que cela se fait grâce au public. C’est la magie du spectacle vivant.

 

Vous projetez-vous déjà sur les saisons suivantes de TranscenDanses ?

Pour cette saison, la troupe cubaine Malpaso Dance Company devrait venir. Et le projet d’Eleonora Abbagnato a été transformé. Elle viendra finalement avec Les Quatre saisons de Giuliano Peparini, pièce créée cet été pour le Ballet de l’Opéra de Rome. Il sera trop compliqué de faire venir la troupe, alors des danseurs et danseuses de France seront engagées pour ce spectacle.

Notre saison prochaine est bouclée, elle s’ouvrira par une création inspirée par Mats Ek, déjà prévue avant le confinement, et se continuera avec deux compagnies françaises. Nos saisons se concentrent d’habitude sur les compagnies internationales, mais ça ne sera pas facile la saison prochaine, même si nous espérons le retour du Ballet National du Canada pour 2022-2023. Beaucoup de ces troupes internationales n’ont pas encore repris les spectacles chez elles. Elles doivent d’abord se consolider localement, voire régler le problème de leur simple survie. Nous avons la chance des subventions en France, d’une certaine assistance, du système des intermittents qui leur permettent de continuer à vivre. On peut râler sur les sommes allouées, mais en tout cas tout ça existe.

Nous avons besoin de montrer au public que la danse est toujours vivante, qu’elle existe et qu’elle a besoin d’exister. Et que cela se fait grâce au public. 

Le spectacle FrancenDanse réunit des artistes de quatre troupes, qui chacune fait très attention à protéger et tester ses artistes, un cas positif pouvant annuler un spectacle. Comment assurez-vous la sécurité sanitaire des artistes dans ce genre de programme qui fonctionne aussi sur les rencontres ?

Le protocole est très strict au Théâtre des Champs-Elysées. Les coulisses sont sanctuarisées et toutes les personnes qui y ont accès doivent avoir un test PCR négatif de moins de 72 heures. Le catering en bas est supprimé, chacun a le sien dans sa loge. Les distances de sécurité sont maintenues pendant les cours de danse. Le masque est obligatoire pour circuler dans les couloirs, les artistes l’enlèvent au moment d’entrer en scène, il y aura peut-être un petit final avec tout le monde sur le plateau. Ils vont devoir faire très attention. Mais nous allons essayer de faire quelque chose de convivial malgré la situation. On va se débrouiller pour sourire et applaudir sous nos masques !

Tout le monde a en tout cas envie que ce spectacle existe : les directions des compagnies, le Théâtre des Champs-Élysées qui nous soutient énormément, la technique, les relations publiques… et j’espère le public. Cela me fait extrêmement plaisir de pouvoir faire et envisager quelque chose de nouveau à l’heure où beaucoup de choses s’annulent. On peut créer et avancer, dans la joie et l’envie. 

Soirée FrancenDanse au Théâtre des Champs-Élysées le jeudi 15 octobre – Places de 15 à 68 euros – 300 place sur les 1.000 sont à 10 euros pour les moins de 26 ans. 

 



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