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Paris l’été 2020 aura bien lieu ! – Rencontre avec Laurence de Magalhaes et Stéphane Ricordel

Il y aura bien un festival à Paris ! Laurence de Magalhaes et Stéphane Ricordel, qui assurent la direction artistique de Paris l’été en même temps que celle du Théâtre Monfort, ont réussi la performance de composer en un temps record une nouvelle version de ce rendez-vous chéri des parisien.e.s. Un festival plus court, devenant plutôt une grande fête de cinq jours. Mais un plateau conforme à l’histoire et l’ADN de Paris l’été : de l’exigence artistique, une diversité des propositions qui conjuguent théâtre, cirque, danse et arts plastiques et des prix très bas. Si bas que cette année, les spectacles sont gratuits. Ce festival dans son format inédit ouvrira avec Histoires Dansées, une Carte Blanche de François Alu, Premier danseur de l’Opéra de Paris dans le cadre désormais habituel du Lycée Jacques Decour. Un programme réjouissant en ces temps contrariés. Retour sur cet acte de bravoure et les semaines de doutes qui ont précédé avec Laurence de Magalhaes et Stéphane Ricordel

Paris l’été 2020

C’est tout naturellement dans leur Théâtre Monfort, lieu caché dans un endroit presque bucolique à la Porte Brancion aux confins de Paris, là où la ville prend déjà des allures de banlieue, que le rendez-vous est pris. En ce jour de juin écrasé de chaleur, Laurence de Magalhaes et Stéphane Ricordel semblent détendus en dépit des lourdes semaines qui ont précédé. Diriger à la fois le Théâtre Monfort et le festival Paris l’été, c’est s’infliger la double peine. Il fallut d’abord annuler la fin de saison du Montfort. “C‘était un peu comme un exil : on charge les ordinateurs dans les voitures et puis le dernier qui part met l’alarme“, se souvient Laurence de Magalhaes. Il restait tout de même l’espoir de maintenir l’édition 2020 de Paris l’été. Au fond, le festival débute dans la deuxième quinzaine de juillet et cela laissait un peu de temps. “Aussi longtemps qu’Olivier Py maintenait le Festival d’Avignon et tenait bon, nous avions l’espoir de pouvoir proposer Paris l’été”, confie Laurence de Magalhaes. “Et même quand l’annonce de l’annulation fut publique, nous avons  encore tenu bon : nous sommes plus petit, plus tard dans l’été. Nous nous disions que peut-être, il n’y aurait plus de Covid“.

Un festival annulé, finalement transformé

À ce moment-là, la programmation de l’édition 2020 vient d’être annoncée et comme toujours, les promesses artistiques sont alléchantes, avec un mélange de reprises luxueuses et de créations. Un point d’ancrage splendide avec le Lycée Jacques Decour et ses cours secrètes mais aussi un déferlement sur d’autres lieux de la capitale et de sa banlieue… Qui tombe à l’eau. “Cette année, nous avions douze compagnies étrangères programmées et il n’était plus possible de les faire venir, on n’avait plus personne au téléphone, il était impossible de commander des gradins“, se souvient Stéphane Ricordel. Du coup, il devient rapidement évident qu’il sera difficile de maintenir un festival de trois semaines, même avec des compagnies exclusivement françaises : “Nous avons d’abord pensé le décaler à la Toussaint comme la semaine en octobre du Festival Avignon ou Montpellier Danses qui segmente  mais on a vite compris qu’il y aurait comme un embouteillage”.

Laurence de Maghalaes et Stéphane Ricordel

L’idée surgit alors de maintenir un festival sur une période de quatre jours. “Il nous manquait une soirée dansante car on avait bien vu que pendant le confinement, les gens voulaient bouger. Mais on n’allait pas non plus faire une discothèque en plein air“, s’amuse Laurence de Magalhaes. “On s’est mis à chercher un showman. On pensait à Oliver Dubois que l’on adore mais il n’était pas disponible. Et c’est alors qu’est venu sur la table le nom de François Alu. Nous ne le connaissions pas personnellement mais  il a été tout de suite enthousiaste”. Voilà comment cette soirée d’ouverture du 29 juillet rajoutée au programme s’est montée en quelques jours : une carte blanche intitulée Histoires Dansées avec autour de François Alu Luna Peigné, Elena Ramos et Nicolas Sannier, doublée d’une joyeuse interpellation que concoctera Sébastien Barrier dans les espaces publics du Lycée Jacques Decour et qui s’achèvera par une soirée dansante animée par DJ Set de The Man Inside Corrine-dancefloor.

Exigence artistique et “gestes protecteurs” respectés

Voilà la première surprise de ce Paris l’été 2020 mais il y en aura d’autres. Comme ce bar dessiné par Johann Le Guillerm qui avait pensé à un comptoir covido-compatible avec des coques en plastique pour les consommateur-rice-s ! Le coronavirus paraissant s’ensommeiller  – et on l’espère ! – ce sera finalement un système de chariots mobiles dessinés spécialement par l’artiste circassien. Au chapitre des émotions assurées, le doublé Borealis de Dan Archer et Purple Rain de Pierre Ardouvin plongent dans les aurores boréales émerveillées et la pluie violette au son de Prince. “Tous les gestes protecteurs et non pas barrières seront respectés “, insiste Stéphane Ricordel. Autre doublé acrobatique : Instable de Nicolas Fraiseau et Christophe Huysman, et Renverse par la compagnie Les Filles du Renard Pâle. Aussi de la magie orchestrée par Yann Frisch pour son Baltass, du  théâtre avec la compagnie belge Ontroerend Goed pour A game of You et un dimanche en famille avec Clownstrum du Munstum Théâtre et J’ai trop peur de David Lescot.

François Alu

Reste la musique qui cette année descendra la Seine en bateau avec le groupe ukrainien DakhaBrakha et la chanteuse franco-algérienne Djazia Satour. “Ça, c’est aussi une idée spéciale Covid”, explique Laurence de Magalhaes. “Cela faisait trois ans que l’on se disait que l’on devait faire quelque chose avec la Seine mais on ne trouvait pas de concept. Et un soir, on sort, la Seine était presque limpide, sans bateaux, et la nuit commençait à tomber. Il fut alors évident que les deux concerts que nous avions au programme devaient se jouer sur la Seine. Le public sera sur les quais et la musique va passer…”. Voilà un donc un festival qui coche toutes les cases de l’esprit de Paris l’été que Laurence de Magalhaes et Stéphane Ricordel ont insufflé à ce festival lorsqu’ils en ont repris la direction il y a quatre ans.

Et c’est ce même esprit qui règne au Théâtre Monfort pour la saison à venir : éclectisme, ouverture sur le monde, croisements des genres dans un constant souci d’exigence. On y croise toutes sortes d’artistes : acteur-rice-s, danseur-se-ss, acrobates ou musicien-ne-s avec une note festive et un parti-pris convivial. Il tarde de les retrouver la saison prochaine. Et pas question à ce stade d’annuler. “Nous sommes responsables tous, de nous-mêmes et des autres, chacun à son endroit et personne n’a envie de l’attraper. Et puis, si nous savons faire une chose maintenant, c’est tout annuler en 48 heures“, ironise Stéphane Ricordel. Ces deux-là en tout cas sauvent un été qui menaçait d’être blanc, sans théâtre, sans danse et sans musique. Je repars revigoré par cette conversation énergique et combative et je me souviens ému de les avoir rencontrés dans une autre vie, lorsqu’ils parcouraient le monde avec leur compagnie Les Arts Sauts qui révolutionna le cirque et l’art du trapèze en nous mettant des étoiles plein les yeux. Aujourd’hui, Laurence de Magalhaes et Stéphane Ricordel continuent  à nous enchanter en montrant les spectacles des autres. Vite, que la fête commence !

 

Paris l’été du 29 juillet au 2 août, informations pratiques et réservation en ligne.

La saison du Théâtre Monfort saison 2020-2021 est en ligne

Merci à Éric Leite pour son aide précieuse.





 

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