TOP

Mathilde Froustey : “Promue Première danseuse, je serais tout de même partie”

English version

Mathilde Froustey, Sujet au Ballet de l’Opéra de Paris, fait ses valises. La danseuse prend une année sabbatique et sera dès le 1er juillet, et pour une saison, Principal dancer (Danseuse Étoile) au San Francisco Ballet. Rencontre à quelques jours de sauter dans son avion.

Mathilde-Froustey_Sans-Francisco-Ballet

 

De quand date cette décision de partir ?

La décision date de janvier, après Don Quichotte (ndlr : où elle avait tenu pendant deux représentations le rôle principal). Don Quichotte a vraiment été un cap dans ma carrière. C’était mon premier ballet en trois actes, tellement difficile mais génial. C’était un grand moment. C’était difficile de retourner dans le corps de ballet après avoir fait Kitri, aussi bien psychologiquement et physiquement. Quand on est Sujet et qu’on danse des rôles d’Étoiles, on ne se repose pas le lendemain, on est dans le corps de ballet pour danser les pêcheurs. Cela fait depuis mes 17 ans que je fais ça, lorsque j’ai eu mon premier rôle. Honnêtement, c’est difficile. Je ne voulais pas être une Sujet aigrie et triste, et je sentais que si je ne montais pas, ça allait être le cas, il fallait vraiment que je prenne mon année. Je le sentais au fond de moi. Mon truc dans ma vie, c’était de danser Kitri à l’Opéra de Paris. Depuis toute petite, je veux danser ce rôle, ici. Je l’ai fait, ça s’est plutôt bien passé, maintenant je peux aller voir ailleurs.

 

Si vous aviez été promue Première danseuse au dernier Concours de promotion, vous seriez partie quand même ?

Oui, je serais partie aussi. En fait, je voulais être nommée Première danseuse et partir ensuite. Ce n’est donc pas vraiment lié au Concours de promotion. On a beaucoup à apprendre à aller voir ailleurs. À l’opéra, j’arrive le matin à 9 heures et repars à 23 heures. Même si je suis une geek et que je regarde toutes les vidéos de danse, c’est difficile d’avoir le temps de voir d’autres choses. J’adore les galas pour ça, voir d’autres chorégraphes et d’autres façons de bouger. C’est vraiment quelque chose que je voulais faire.

 

Vous n’avez pas essayé de partir avant ?

Cela fait longtemps que je voulais utiliser cette chance de pouvoir prendre un an de congé sabbatique et revenir après au même poste. Les voyages sont mon autre passion. J’avais essayé ailleurs, à l’ABT, au Royal Ballet, mais ça n’était jamais le bon moment. J’aurais pu aussi partir à Vienne chez Manuel Legris. On en a parlé après La Fille mal gardée, il était dans la salle. Il m’a dit de rester encore un peu… Bon, je n’ai pas attendu longtemps.

 

Vous n’avez pas eu envie d’attendre la nouvelle direction, celle de Benjamin Millepied, pour voir comment ça se passait ?

Non. Pour moi, c’était juste le moment de le faire. Je n’ai pas vraiment pu parler avec lui.

 

Pourquoi le San Francisco Ballet ?

Depuis toute petite je suis cette compagnie. À l’époque, je n’avais pas été prise à l’École de Danse et je ne pensais pas qu’on pouvait y rentrer après l’âge limite. Donc pour moi, l’Opéra, c’était mort. J’y suis ensuite entrée à 15 ans. Le SFB (San Francisco Ballet) est une compagnie américaine particulière, beaucoup plus classique et française que l’ABT ou le NYCB. D’ailleurs, ça se voit dans le physique des filles. Ça n’est pas pour rien que l’on m’a engagée. Ils ont pratiquement le même répertoire qu’à l’Opéra. La compagnie danse Onéguine et Suite en Blanc, du Wayne McGregor, Raymonda ou Giselle. Même s’ils dansent aussi du Balanchine et du Robbins, la technique n’est pas si différente. C’est un bon mélange entre quelque chose de différent et qui ressemble à ce que je fais aujourd’hui. Le directeur Helgi Tomasson aime d’ailleurs beaucoup le travail de l’Opéra, ce qui est rare pour une compagnie américaine.

 

Comment avez-vous connu Helgi Tomasson ?

Il m’avait vu en 2006 lors de la soirée Jeunes Danseurs. Je dansais Delibes Suite, le pas de deux de José Martinez, il a d’ailleurs acheté cette chorégraphie pour le San Francisco Ballet à cette occasion. On avait été présenté, il m’avait dit qu’il m’avait beaucoup aimée, et j’ai toujours gardé ça dans un coin de ma tête. En janvier, je lui ai envoyé un mail, puis une vidéo de Don Quichotte, qui datait de 15 jours, et des extraits de Sérénade. Il m’a engagée directement en tant que Principal dancer à partir de ces vidéos. La décision a été prise au début de l’année. Je l’ai dit à Brigitte Lefèvre de suite et ça s’est divulgué. Mais le SFB m’avait demandé de ne pas en parler par rapport à d’autres danseurs qui étaient sur le départ.

 

Vous êtes Sujet, vous devenez Principal directement, c’est un sacré challenge…

C’est assez difficile. Je vais arriver dans un nouveau pays, avec une nouvelle langue, une nouvelle compagnie… et un nouveau métier. À l’opéra, j’ai eu la chance de faire beaucoup de rôles d’Étoile. Mais danser des rôles d’Étoile en tant que Sujet et des rôles d’Étoile en tant qu’Étoile, ça n’est pas pareil. Sujet, on a le droit de se planter. Étoile, c’est notre boulot de danser ces rôles. C’est une grande pression mais c’est génial.

Mathilde-Froustey_depart

 

Comment vont se passer vos premières semaines là-bas ?

C’est un nouveau répertoire, je ne vais donc pas danser tout, tout de suite. Il va falloir que je travaille. Le directeur s’était demandé si ça ne me gênait pas. Au contraire, si je peux avoir du temps, c’est mieux. Je vais avoir beaucoup à apprendre, c’est un nouvel élan génial. On n’a pas encore d’appartement. On sera logé à l’hôtel pendant 15 jours par la compagnie avant de trouver quelque chose.

 

Comment vous semble l’ambiance au San Francisco Ballet ?

J’ai déjeuné avec le directeur mi-juin. Les rapports ont l’air assez simples, assez directs. On a eu une discussion très honnête. Je lui ai dit mes angoisses, il m’a dit comment ça allait se passer. On va tout faire pour que ça se passe bien. C’est un gros truc de faire venir quelqu’un de l’étranger aux États-Unis. S’ils le font, c’est pour que je danse beaucoup, ce dont j’ai envie. On est prêt à travailler ensemble. Sur le papier, tout semble parfait. Je sais que ça ne sera pas tout rose, que ça sera difficile, mais c’est mon envie profonde.

 

Qu’allez-vous danser ?

On va démarrer avec une répétition d’un programme mixte, je devrais danser des rôles principaux d’une pièce de Wayne McGregor et une création d’Alexeï Ratmansky. Puis on préparera la tournée à New York en octobre. Ensuite, place à Casse-Noisette à Noël, comme dans toutes les compagnies américaines ! Puis Giselle en janvier. J’espère aussi être sur les créations de Liam Scarlett et Justin Peck.

 

Vous avez souvent exprimé l’envie de faire plus de danse contemporaine. Ce sera l’occasion ?

Je suis contente de découvrir ces nouveaux chorégraphes. On ne peut pas tout danser à l’Opéra, je restais plutôt sur les programmes classiques. Le SFB a aussi un répertoire assez vaste, c’est vraiment la compagnie classique la plus contemporaine des États-Unis. Ils sont assez ouverts.

 

Vous participerez à la tournée du San Francisco Ballet aux Étés de la Danse, en juillet 2014 ?

J’espère être sur la tournée à Paris. Mon contrat s’arrête début juin mais on va essayer de s’arranger. C’est aussi à ce moment-là que je devrais décider de la suite.

 

Quel rôle vous tente le plus là-bas ?

Je suis très heureuse de danser Giselle. J’ai déjà dansé tout le deuxième acte, la variation du premier acte, j’ai gagné Varna avec ce ballet… Il ne me manque pas grand-chose.

Mathilde Froustey - Giselle lors du gala YAGP 2010

Mathilde Froustey – Giselle lors du gala YAGP 2010

 

Vous allez être en concurrence avec sept autres Principal dancer femmes, dont certaines très médiatiques comme Maria Kochetkova. Comment vous préparez-vous à ça ?

C’est assez excitant. Je pense que c’est très différent de l’Opéra, le SFB a l’habitude d’accueillir de nouveaux Principals venu-e-s d’ailleurs. J’adore Maria Kochetkova, je suis vraiment fan, j’ai vu toutes ses vidéos, je la connais pas cœur (rire). Je suis très contente de pouvoir travailler à côté d’elle, je suis sûre que je vais apprendre énormément rien qu’en la regardant. Il faut que j’enlève le moule Opéra de mon esprit où l’on vient d’un concours et tous de la même école. Au SFB, les danseurs sont tous très différents. Je pense que c’est un peu comme dans un gala international : il y a de la concurrence mais on est tous tellement différents, on vient d’écoles tellement différentes, il y a des choses à prendre chez chacun. C’est une pression différente, mais ça va être vraiment chouette.

 

Vous avez pris une année sabbatique. Vous pouvez donc revenir l’année prochaine au même poste. Mais honnêtement, après une année en tant que Principal, vous vous voyez revenir Sujet et vous reconfronter au Concours de promotion ?

Je ne sais pas… J’essaye de ne pas y penser, de profiter de cette année au maximum. À la fin mai 2014, je veux pouvoir me demander ce que je fais en toute liberté, si je reste ou si je reviens. Il faut vraiment que j’aie l’esprit libre là-bas et que je me consacre à 100 % à cette compagnie pour pouvoir prendre une décision claire.

 

Sur Facebook votre message laissait penser à un adieu définitif…

Les gens perçoivent ce qu’ils veulent. Je dis juste que j’aime cette compagnie.

 

Vous avez démarré votre carrière très rapidement, avec un premier grand rôle à 17 ans. Vous devenez Sujet en 2005 mais vous bloquez au Concours de promotion. Ce coup d’arrêt dans votre carrière a été difficile ?

Je ne suis pas d’accord, je n’ai pas eu de coup d’arrêt. J’ai dansé des rôles d’Étoile tous les ans, je suis la seule Sujet à avoir eu cette chance. Quant aux Concours de promotion, il n’y en a pas eu pendant quatre ans. C’était d’ailleurs le plus difficile, c’est pire que de ne pas monter. Ne pas monter c’est pas de chance, mais pas de concours, c’est pas de chance du tout. Ce n’est même pas avoir l’opportunité de le faire. Ce qui m’a fait tenir, c’est d’avoir pu danser tous ces rôles.

On a l’impression que je suis rapide comme fille parce que j’ai eu débuts rapides, mais je suis quelqu’un de lent. Je suis lente, j’ai mis du temps à comprendre plein de chose dans mon travail, j’apprends un ballet lentement. J’ai appris beaucoup de choses pendant ces années. J’ai pu travailler avec Noëlla Pontois, avec Guillaume Charlot qui fut mon coach pendant six ans, avec Florence Clerc, José Martinez, Monique Loudière, Manuel Legris… Et puis j’ai eu une vie aussi !

 

On a quand même senti chez vous une certaine frustration sur les réseaux sociaux après le dernier Concours, où vous n’étiez pas classée…

Je ne suis pas d’accord non plus. Je n’étais pas frustrée, j’étais juste déçue. Mais qui ne serait pas déçu d’un Concours de promotion raté ? Cela fait des mois que l’on travaille, c’est un investissement énorme… Je ne suis même pas classée, je suis déçue. Ces paroles n’étaient ni de la frustration, ni de la rancune.

Concours-promotion_2012_Mathilde-Froustey_Carmen

 

Vous ne partez donc pas en porte-à-faux avec la direction ?

Je ne suis pas fâchée. Je suis très proche de Brigitte Lefèvre qui m’a toujours soutenue. C’est elle qui m’a toujours donné des rôles d’Étoile. Je sais que certain se sont demandés pourquoi j’ai dansé Kitri alors qu’il y avait des Premières danseuses avant moi. Brigitte a répondu : “Elle danse Kitri parce que je le veux“. Depuis Ivan Le Terrible, c’est elle qui m’a poussée. C’est elle qui m’a donné l’envie de partir.

 

Comment ça ?

Si je n’avais pas eu ces rôles d’Étoile tous les ans, je me serais peut-être dit que ça allait de rester Sujet. Mais le fait de danser des premiers rôles régulièrement, et de voir le public applaudir, alors c’est peut-être que je peux le faire, que je le mérite. J’ai eu la chance de saluer en tant qu’Étoile… Elle m’a fait garder cette flamme. Après, peut-être que je ne peux pas être Étoile à l’Opéra parce que je suis mauvaise en Concours… C’est pour ça qu’il n’y a pas de frustration. Je pars plus pour l’envie de faire autre chose. Bien sûr qu’il y a la frustration de ne pas monter, mais derrière cette décision, il y a surtout l’envie de danser.

 

Ce rêve d’Étoile à l’Opéra de Paris, vous ne l’avez plus ?

J’essaye de ne pas trop y penser. Je ne sais pas… Je ne suis pas forcément partie définitivement non plus, je peux revenir. Quand je suis rentrée dans le ballet, c’est allé très vite. Mais pour moi, être Étoile comme Aurélie Dupont ou Agnès Letestu me paraissait inaccessible, je n’y pensais même pas. Le rêve est là, mais au quotidien, c’est du concret, et avant de rêver à être Étoile, il faut d’abord passer le Concours. Et quand on fini par ne pas monter sept ans de suite, on se dit qu’on ne sera pas Étoile. Ce Concours met des barrières concrètes à ce rêve de petite fille.

 

Vous pensez que vous n’êtes pas faite pour le système Opéra ?

Je ne sais pas, peut-être pas. Je suis en panique totale en concours. On a tous ses faiblesses, je suis juste un être humain. J’ai tout essayé, même l’hypnose (rires). Le truc, c’est que je suis contente de moi à chaque fois, puis on me dit que ce n’était pas bien… Je suis trop stressée. En concours, je ne suis pas bonne, je danse mal, je ne sais pas faire.

 

Vous avez pourtant remporté Varna…

Varna, ce n’est pas pareil. Les gens sont debout dans les gradins, ils se mettent à hurler dès que l’on fait un dégagé, c’est vraiment un spectacle. Et puis à Varna j’avais 17 ans.

 

Le fait de rater les Concours, mais d’avoir des rôles d’Étoile, c’est tout de même paradoxal. Comment l’avez-vous vécu ?

À chaque fois, j’ai un rôle d’Étoile en décembre et je rate le Concours un mois avant. J’ai dansé Casse-Noisette ou j’ai répété Kitri en scène le lendemain d’un Concours où je n’étais pas classée. Où donc est ma place ? Je ne suis pas classable pour être Première danseuse, mais en même temps je peux rentrer sur scène avec un rôle d’Étoile ? Il y a toujours un petit désespoir…

 

Vous en parliez avec Brigitte Lefèvre ?

Elle restait très diplomate. Elle a une seule voix en Concours, comme tout le monde. Souvent, après les Concours, j’allais voir Brigitte pour lui demander s’il n’était pas temps que je parte, que je ne monterais jamais puisque je n’étais même plus classée, que la nouvelle génération arrivait, que j’avais passé mon tour. Elle me disait de rester, elle me donnait des rôles. Cette année, c’était Kitri, mais je ne voulais plus retourner en arrière.

 

Vous pensez que vous êtes à votre place dans la hiérarchie en tant que Sujet ?

Je ne sais pas… C’est très dur d’avoir un regard sur soi, c’est impossible. Je sais juste que quand j’ai la chance de danser des rôles d’Étoile, ça se passe plutôt bien. Mon parcours est trop compliqué entre ces premiers rôles et ces Concours ratés. Et quand je vois Ludmila, Agnès, Dorothée, Myriam, je me dis que jamais je n’arriverai à danser comme elles. Je les trouve tellement incroyables que je me dis que c’est normal que je sois Sujet.

 

Pourtant on vous offre un contrat d’Étoile dans une compagnie réputée…

Dans une semaine je suis Étoile, c’est dingue !! Quand je dis ça, j’ai l’impression que ce n’est pas moi qui parle, c’est un rêve qui se réalise… Je ne me pose pas trop la question. Je me dis que le directeur n’est pas fou, qu’il croit en moi (rires). C’est un vrai challenge, mais aussi beaucoup d’angoisse. On va voir ce que ça fait, peut-être que ça va réactiver ce rêve d’Étoile à l’Opéra de Paris.

 

Pour vous, les résultats des derniers Concours de promotion ne sont pas injustes ?

S’il y en a une qui ne peut rien dire, c’est bien moi, tellement je danse mal en Concours. Et puis Alice, Valentine… Ce sont toutes mes copines, elles méritaient de passer. Je m’étais faite la réflexion lors du Concours il y a deux ans. Je m’échauffais et je regardais les filles autours de moi : Laura, Alice, Charline, Héloïse, Amandine, Aurélia, Kora… Je m’étais demandé à quoi cela servait que l’on se batte, on était toutes bien. S’il y avait plus de places, beaucoup d’autres mériteraient de passer, c’est très dur pour cette classe.

 

Pour vous, le Concours de promotion à ce stade de la hiérarchie n’est pas une bonne idée ?

Pour les Quadrilles, c’est le seul moment où on peut les voir, certains restent en coulisse toute l’année. Mais nous les Sujets, on a fait nos preuves. On ne devrait pas avoir à subir le système de “place” ou de “pas de place”. Il y a des générations sacrifiées à cause de ça. Avant la notre, il y avait celle de Miteki Kudo. L’année dernière, Héloïse a dansé Nikiya comme une star, elle aurait dû être nommée Première danseuse dès la fin du spectacle !

 

Il y a une vraie réflexion des danseurs et danseuses sur ce Concours ?

Beaucoup se posent des questions sur ce Concours, surtout notre classe des Sujets. Franchement, les danseur-se-s n’y tiennent pas tant que ça… Mais je ne sais pas s’il y aura quelqu’un de suffisamment courageux pour y toucher. C’est un gros truc de s’attaquer au Concours de promotion, c’est un sujet délicat.

 

Après chaque Concours, la rumeur du public prétend que, si vous n’êtes pas nommée, c’est parce que personne ne vote pour vous du fait de votre mauvais caractère…

Je n’ai pas envie de répondre à ça. Cela fait 15 ans que l’on fait tout ensemble, que l’on vit ensemble. On a passé notre enfance ensemble, notre adolescence. On voit nos copines se marier, avoir des enfants. C’est vraiment des gens que j’aime, des danseurs que j’aime. L’Opéra, c’est ma famille, on s’aime autant qu’on se déteste.

 

C’est difficile de quitter l’Opéra ?

C’est très dur. Il y a ce truc, en spectacle. Parfois, je regarde les danseurs autour de moi, et je me dis qu’ils sont tous déments. C’est une super compagnie, on a tous nos qualités et nos défauts, mais ce sont tous des gens supers.

 

Quel est votre meilleur souvenir en scène avec cette compagnie ?

Les quatre petites cygnes du Lac, avec Dorothée Gilbert, Myriam Ould-Braham et Fanny Fiat. C’était une osmose, et c’était vraiment quatre copines. C’était une très longue série, on dansait tous les soirs, parfois deux fois par jours. On était épuisées. Mais il y avait une solidarité incroyable entre nous. À la fin, on savait comment chacune respirait, comment chacune bougeait. On se tient les mains pour danser, on est tellement collées. C’était vraiment un souvenir fort. Tout le monde nous disait qu’on était géniales, le public de Bastille hurlait des bravos quand on finissait notre quatuor.

Mon meilleur souvenir, c’est vraiment ça, cette osmose entre nous quatre. Je n’ai pas beaucoup redansé ce passage ensuite, et je suis contente, car c’est toujours moins bien qu’avec ces trois-là.

 

Et comme rôle principal ?

Kitri bien sûr, c’était vraiment mon rêve… Je devais le danser deux soirs. Mais après la première représentation, Pierre-Arthur Raveau, mon partenaire, se blesse. Je me souviens de ce vendredi soir, j’étais tellement triste de ne pas le redanser, on pleurait dans les bras l’un de l’autre. Danser ces rôles, c’est toute une préparation. J’étais prête pour samedi, j’avais mes pointes de prêtes. Ma famille avait réservé 60 places dans la salle, avait réservé les billets de train, l’hôtel. Ils ne me voient danser qu’une fois par an.

Seul mon père est venu. Le samedi soir, on est allé au restaurant, on a bien mangé et bien bu, on s’est couché à 3 heures du matin… Quand Brigitte m’a appelée à 9h30 le lendemain matin, j’ai cru que c’était le réveil. J’ai regardé mon portable, c’était elle. Elle m’a demandé si je voulais danser Kitri avec François Alu dans l’après-midi. J’ai dit oui, j’aurais dit oui à n’importe quoi pour redanser ce rôle. Parfois, on ne réalise pas la chance qu’on a. Là, je l’ai vraiment réalisé, j’étais tellement triste la veille.

 

Comment s’est passée cette matinée si particulière ?

François Alu n’avait jamais répété en scène, il n’avait jamais filé le ballet en entier. Vincent Chaillet était en coulisse, je lui ai bien dit de rester car je ne savais pas si François allait arriver au bout. Il ne se rendait pas compte, c’est un mur ce ballet, il faut le filer et le filer, je n’étais pas sûre qu’il puisse aller au bout. Mais il a une force en lui incroyable et un peu d’inconscience de la jeunesse. Moi qui suis un peu fofolle, il l’est encore plus que moi (rires). Pierre-Arthur est très différent, c’est une force tranquille. On est à l’opposé, mais on s’apporte des choses, c’est pour ça qu’on adore danser ensemble. Il va falloir compter sur eux ces prochaines années !

Mathilde Froustey et Pierre-Arthur Raveau - Don Quichotte

Mathilde Froustey et Pierre-Arthur Raveau – Don Quichotte

 

Vous avez raconté ces rebondissements sur les réseaux sociaux, sans cacher votre tristesse. Certains y ont vu une “bonne communicante” qui attire la sympathie du public en “jouant les Calimero sur Twitter“…

Franchement, je m’en fiche. Étant Sujet, les rôles d’Étoiles sont rares. Kitri, ça se travaille pendant deux mois. On me dit que je vais danser deux spectacles, c’est mon rêve de danser Kitri… Et puis finalement je ne vais pas danser. Pour moi, c’était la dernière chance de danser Kitri et on me l’a enlevée. Peut-être que je ne le danserai plus jamais. J’ai juste dit que j’étais triste. On ne peut pas blâmer une artiste qui est triste de ne pas danser. C’est ça notre vie, c’est pour ça qu’on se lève le matin, c’est pour ça qu’on fait tout.

 

Quel ballet de l’Opéra va le plus vous manquer ?

Les Noureev, j’adore les danser. Ça n’était pas le cas au début. À l’École de Danse, je passais beaucoup de temps avec Samuel Murez à regarder des vidéos de danseurs américains ou cubains, on pouvait y passer des week-ends. Et les ballets de Noureev, on les trouvait ennuyeux. “Ben pourquoi elle ne fait que deux pirouettes ? Parce que c’est un ballet de Noureev !”. Un autre en fait douze ! Puis j’ai été distribuée sur Clara dans Casse-Noisette. Je me suis dit qu’il allait falloir que j’aime, car je ne peux pas danser quelque chose que je n’aime pas, j’ai besoin d’être joyeuse pour danser. Il allait falloir que j’apprenne à aimer cette chorégraphie. J’ai lu le livre d’Ariane Dollfus Noureev l’insoumis. Je le connais maintenant pas cœur, je l’ai beaucoup offert. J’ai commencé à vraiment aimer Noureev en cernant sa personnalité. Maintenant, je comprends cette exigence. C’est une grande fierté d’avoir dansé ces chorégraphies qui ont une vraie histoire. La mise en scène est nette, claire, lisible… J’aime vraiment beaucoup. J’ai du mal aujourd’hui à voir une autre version de Casse-Noisette que celle de Noureev. C’est un chef-d’œuvre.

Et puis plus jeune, je faisais partie du groupe de Manuel Legris, qui a été très important pour moi. Il a encore les larmes aux yeux quand il parle de Noureev. Toute cette génération avait une telle admiration pour lui…

 

Et, au-delà de la danse, qu’est-ce qui va vous manquer le plus durant cette année américaine ?

Les croissants ! (rires). Ici ! (ndlr : l’interview se déroule au Palais Garnier). C’est un endroit que j’ai adoré par moment, détesté à d’autres. C’est une drôle de maison, tant qu’on ne le vit pas au quotidien, on ne peut pas comprendre. C’est un monde de fous (sourires). Ça va me manquer, tous les gens vont me manquer, ma loge va me manquer, le Foyer de la Danse va me manquer, l’odeur de Garnier va me manquer, les souris de la cafétéria vont me manquer… L’Opéra va me manquer.

On vit des choses tellement intenses ici, aussi bien dans le négatif que dans le positif. Un soir de Concours, je peux être assise là en train de pleurer, à me dire que j’ai mal dansé, que je ne monterai jamais. Et puis le lendemain, on revient, on travaille. Il se passe la même chose que si j’avais été promue Première danseuse. On va à la barre, on travaille notre corps, on continue. C’est fort ce qu’on vit ici. Ça va être différent à San Francisco, je vais vivre d’autres choses très intenses, mais il y aura toujours cette passion de la danse.

 

Qu’est-ce que l’on peut vous souhaiter ?

D’être heureuse ! Même si je ne danse pas tous les soirs. Et continuer de progresser, d’apprendre…

Je voulais aussi remercier les gens sur Twitter, Facebook, les blogs… C’est un soutien incroyable. Ça a été très important pour moi. Quand je remercie les gens sur les réseaux sociaux, c’est vraiment sincère. Les moments difficiles après les Concours sont contrebalancés par tous ces commentaires de soutien. On ne danse pas pour la direction ou les coulisses, on danse pour les gens qui sont dans la salle. Je suis super contente d’avoir ces retours, j’adore aller voir sur Twitter ce qui se dit après une représentation. Ce sont nos applaudissements à nous !

 

Mathilde Froustey s’envole pour San Francisco le 30 juin. Elle devrait très vite mettre en ligne son nouveau site web, qui contiendra une partie blog où elle racontera son année américaine.

Commentaires (34)

  • Heu…Woaw.
    Merci infiniment pour cet article, j’ai l’impression d’être pourrie gâtée avec autant d’infos sur ma danseuse préférée. Vraiment, je ne pourrais pas vous remercier assez!
    Cet entretien est extrêmement “eye-opening”…(Je suis vraiment désolée je ne trouve pas d’équivalent en français) on y apprend tellement de choses! J’en ressort avec l’impression de comprendre Mathilde Froustey parfaitement. Vous avez su poser les bonnes questions.

    (Juste une petite coquille, il est écrit “qu’allez vous danserez?” cela m’a fait rire!

    Répondre
  • Olenna

    Merci beaucoup pour cette itw 😀

    Répondre
    • swanlake__

      Merci beaucoup pour cette interview intéressante. C’était un vrai plaisir à lire, je vous remercie beaucoup.
      J’admire beaucoup Mathilde, comme d’autres danseuses “Sujet”, vraiment, comme elle bien le dit, dans le cas de sujets sont toutes extraordinaires, vraiment toutes premières danseuses.
      Je suis très heureux pour Mathilde, je suis sûr elle fera bien en Amérique, et va laisser le nom de l’Opéra de Paris très élevé, à Paris on sera très fière d’elle, elle en Giselle aura un triomphe, j’en suis sûr.
      Quoi qu’il en soit, je me sens un peu triste, parce que quand je l’ai lu il y a quelques mois que il y aurait Sleeping Beauty en Décembre, ma première pensée en lisant ça était: très bien, je peux voir que Mathilde comme Aurora, mon rêve. Great¡¡¡ Génial¡¡¡ j’étais trés hereux¡¡¡
      Alors, quand j’ai lu il y a peu , qu’elle allait vivre pour un an en Amérique, je me sentais un peu triste, parce que je ne peux plus voir l’Aurora de Mathilde en décembre. 🙁
      C’est une bonne chose que je peux voir Myriam et Ludmila en Aurora, que elles sont mes deux danseuses préférées, mais il serait génial, pour moi, voir toutes trois comme Aurora. Eh bien, en tout cas, bonne chance à Mathilde et, honnêtement, je voudrais qu’elle revenir à l’opéra l’an prochais, bien que j’admire beaucoup de danseuses de l’opéra, je reconnais que Mathilde a quelque chose , comme une joie spécial chaque fois qu’elle danse qui est transmis au spectateur, et que en particulier, je pense, qu’ il n’est pas facile à trouver en une danseuse, et elle a ça. Elle me rappelle beaucoup à Ludmila Pagliero , puisque toutes deux sont de véritables reines sur scène quand elles y sont, je veux dire, que toutes les regards sont sur elles quand elles y sont, comme par exemple Serenades, la livraison est 100%
      tant pour Ludmila comme pour Mathilde, qui particulièrement,était vraiment Exceptionnelle, sans doute , une de ses meilleures representations. En fait, j’étais dans Sérénades et je me suis dit en la regardant que Mathilde était une vraie star. cela se voit dans chacun de ses performances, mais en Sérénades elle avait la magie en sa danse, quelque chose d’unique et très fabuleux à vivre, comme j’ai l’ai vecu, merci mathilde.un vrai plaisir de la voir danser.
      pardon pour mon français….merci¡¡¡ 😉

      Répondre
  • Laurie

    Merci beaucoup, à vous ainsi qu’à Mathilde pour cette interview ! Après tout ce qu’on peut lire sur elle cela fait vraiment du bien de lire SES propos à elle. L’ayant découvert sur youtube dansant Giselle avec Mathias Heyman j’ai tout de suite accroché elle a beaucoup de qualité, ses interprétations, ses façons d’aborder un rôle ne sont pas forcément celles que je préfère, mais sa carrière et donc son travail n’est pas finit, elle aura donc sûrement des occasions de nous faire part de ses progrès en scène. Mais c’est toujours un grand plaisir de la voir danser et cela sûrement car elle-même respire le bonheur de danser à chaque apparition. Je la suis donc assidûment sur ses réseaux sociaux depuis cette saison,ce qui est une façon pour moi de la découvrir toujours plus, de profiter de son travail ( j’adore particulièrement sa vidéo de répétition de Delibes Suite avec Mathias Heyman), j’ai donc eu un moment de grosse déception en apprenant sur son compte Twitter son départ pour le SFB. Si je résidais sur Paris je tenterai d’obtenir une place de dernière minute pour la Sylphide pour la voir danser en vrai au moins une fois avant son départ. Mais je suis bien sûr très contente pour elle, j’espère que ce changement va lui apporter beaucoup de choses positives ce dont je ne doute pas vraiment. En espérant avoir l’occasion de la voir en scène un jour ( dans un rôle d’Etoile au mieux 😉 ). Merci encore pour cette interview, c’était très intéressant d’avoir son propre point de vue!

    Répondre
  • Aymeric

    Merci pour cette interview! Elle confirme qu’elle danse samedi?!

    Répondre
  • Estelle

    Délicieusement longue, agréablement impertinente et rondement menée : : bref, cette interview est parfaite !

    Répondre
  • Merci pour cette interview! C’est agréable de la voir sous ce jour et s’exprimer vraiment sur sa vie à l’Opéra et la compagnie en général.

    Répondre
  • Joelle

    Bravo Amélie ! Belle Interview ! Tu t’es débrouillée comme une chef !!!

    Répondre
  • a.

    Après tout ce qu’on a pu lire sur elle sur le web, remarques soit exagérement flatteuses, soit exagérément ironiques, enfin on peut lire Mathilde par Mathilde… C’est agréable et ça nous rappelle, à nous qui sommes assis dans nos fauteuils, ou qui dansons gentiment en amateur, combien l’art est difficile… et combien elle a raison de prendre des risques!
    Alors bonne chance à Mathilde Froustey – espérons qu’elle nous tiendra au courant de ses aventures!

    Répondre
  • Sunshine

    Merci pour cet entretien très complet même si parfois le style alourdit quelque peu la lecture… J’adore cette danseuse et j’espère pouvoir la voir au moins une fois au SFB! Beaucoup d’infos ça fait plaisir, les entretiens des magazines sont souvent si superficiels! Merci!

    Répondre
  • Julia

    Enfin une interview digne de ce nom qui pallie à celles, souvent vides, des journaux mainstream (celle du Figaro était franchement légère). On comprend bien mieux la personnalité de Mathilde, mais aussi les enjeux et les difficultés de cet art exigeant….Il faudrait plus de portraits ou d’interviews de ce type!

    Répondre
  • Strapontine

    Il y en a déjà tant… Mais voilà un autre compliment sur cette interview ! Vraiment fascinant d’avoir la version de Mathilde ! et non, elle ne déteste pas Brigitte ! Je lui souhaite bonne chance et j’espère très égoïstement qu’elle reviendra malgré tout prendre sa revanche sur l’opéra pour y devenir Etoile. Ce serait une belle histoire, avouons-le 😉

    Répondre
  • leballetetmoi

    Thanks Amélie for a wonderful interview! (I give up writing in french) You managed to ask all the questions that I posed to myself!
    All in all I think that the french dance-lovers are a little too severe with Brigitte Lefèvre. Personally I don’t like her speech-bubbles and I am the first to complain about etoile nominations that have taken too long (like MOB’s). Still I sometimes see the tendancy to blame her for everything that doesn’t go well. In a system as complex as the POB it’s impossible to take care of everything. That Mathilde Froustey doesn’t blame BL for her non-promotion shows that even Mrs B hasn’t got all the power in her hands. It seems that it’s rather the fault of the promotion system and I think MF is right in saying that the competition is good for the quadrilles and coryphées but less so for sujets, whose qualities are known to everybody.
    My best wishes to Mathilde Froustey! She really deserves this recognition!

    Répondre
  • Céline

    Interview très intéressante à lire pour tout admirateur de Mathilde Froustey, seulement, le plaisir de la lecture m’a été quelque peu gâché par les fautes d’orthographe et la transcription laissant paraître un langage oral peu adapté par la suite à une version écrite.

    Mais l’important, c’est ce que Mathilde Froustey dit, en fin de compte ! Et bonne continuation à elle…

    Répondre
    • a.

      Je pense qu’Amélie l’a retranscrite le plus vite possible pour que nous l’ayons à lire le plus vite possible. Et si vous avez l’habitude de taper toute la sainte journée sur un ordi, vous comprendrez aisément qu’on puisse par fatigue faire des fautes de frappe ou d’inattention. De surcroît vous auriez pu lui envoyer un petit mail pour le lui dire (certes moi aussi j’aurais pu!) plutôt que d’écrire cela dans les commenatires… non?

      Répondre
      • Estelle

        Je suis d’accord avec votre commentaire. Que ceux qui ne font jamais de fôtte d’aurtteaugrapheux lui jettent la première pierre…

        Répondre
          • Pardon, je ne connaissais pas du tout cette règle…Je m’en excuse. 🙁

  • petitvoile

    @a., MF ne prend aucun risque, sauf exception russe les danseurs des autres compagnies du monde travaillent par contrat d’un an renouvelable sans aucune sécurité d’emploi. MF prend un congé de l’Opéra où sa place lui reste au retour.
    La remarque de MF à propos du San Francisco Ballet “je pense que c’est un peu comme un gala international…” me laisse pantoise ! Le choix de ce voyage lui sera au moins une bonne occasion de prendre en maturité.

    Répondre
    • Schlacter

      Après le statut de Principal Dancer qui n’est pas celui d’Etoile (Daniil Simkin, Carlos Acosta, Roberto Bolle et Alina Cojocaru sont, c’est bien connu, de simples Premiers Danseurs dans leurs compagnies respectives) puis les contrevérités effarantes (Mathilde Froustey inconnue Outre-Atlantique et ne prenant aucun risque en partant), il vous faut sortir une seule phrase d’une interview de plusieurs pages pour ironiser mollement sur sa maturité.
      Chère Madame, ce qui affleure ici c’est que cette danseuse est non seulement extrêmement respectueuse de ses partenaires et de ses collègues (elle ne dit pas une seule fois mériter la promotion plus que les autres et vante le talent de ses concurrentes les plus directes) et qu’elle est si entièrement dédiée à son art qu’elle fait un choix très courageux : celui de s’expatrier, d’affronter de nouvelles règles, de nouveaux ballets pour continuer à incarner des personnages et, en définitive, à dédier sa vie et son corps à la danse. Tout cela me semble être d’une grande maturité, comme danseuse et comme femme. [edit : pas d’agressivité, merci].

      Répondre
      • a.

        Je suis assez d’accord, les vrais risques ne sont pas que des risques matériels, de type juridico-financier, mais artistiques et (ça compte aussi) affectifs. Si demain je pouvais partir exercer mon métier à l’étranger, je serais sûremetn contente, mais je me dirais aussi que c’est dangereux : non pas de perdre de l’argent ou un statut mais d’oser partir, quitter quelque chose, renaître ailleurs, accepter quelque chose de tout à fait nouveau alors qu’on est installé dans ses habitudes, autant professionnelles qu’affectives que culturelles. Quoiqu’on en dise, partir, c’est toujours mourir un peu. Essayez, vous verrez. Je maintiens que c’est un risque, surtout dans un métier délicat et subtil.
        Je comprends que vous n’aimiez pas cette danseuse, vous devez visiblement bien la connaître, mais, si vous voyez ce qui lui manque, ne lui ôtez pas ce qu’elle a…

        (je ne sais plus trop à qui je réponds là…)

        Répondre
  • noz

    Mathide Froustey est une véritable artiste dont la sensibilité d’écorchée vive ressort de façon très émouvante dans ce joli interview. Son regard à la fois nostalgique sur le passé et positif sur un avenir même incertain est très touchant. Bien des danseurs-euse doivent se reconnaitre dans cette confession qui a du panache et la sincérité, non pas d’un certain désespoir, mais d’une noble ambition qui est tout à son honneur. Sa force est précisément dans l’espoir qui reste intact et sa décision intéressante qui répond intelligemment à l’instabilité qui lui est reprochée de façon très mature. Le regard qu’elle porte sur ses partenaires de route et de travail avec lesquels elle a partagé ses années Opéra est subtil ,sans être désenchanteur pour ceux qui restent, notamment la pertinence de ses observations sur la classe des Sujets et le magistral compliment qu’elle adresse en particulier à Héloïse Bourdon. Je pense que tout le monde s’accorde à lui souhaiter une magnifique année où l’amour qu’elle a pour son métier et la réussite de son aventure américaine soient au rendez vous.

    Répondre
  • Joelle

    Je n’ai vu danser Mathilde Froustey que quelques fois, mais je l’ai bien aimée tout de suite. Elle a décidé de tenter l’aventure, c’est son choix et il est tout à fait respectable. Mais une petite musique/ritournelle n’arrête pas de trotter dans ma tête depuis l’annonce de son départ et elle vient en totale contradiction avec le titre de l’interview. Si elle avait été promue “‘Première Danseuse”, je ne suis pas sûre qu’elle serait partie aux USA… C’est sans doute une “lapalissade” me direz-vous…

    Répondre
  • petitvoile

    @Schalcter, je parle avec ma carrière de vingt ans de soliste derrière moi, française à l’étranger. Le regard professionnel diffère peut-être du vôtre, il n’en a pas moins le droit d’exister à sa très faible mesure sur les blogs français. Plusieurs fois ici même j’ai oser dire lors des concours internes de l’Opéra que certaines danseuses n’avaient pas été promues parce qu’elles n’étaient pas les meilleures tout simplement et chaque fois les fans de telle ou telle danseuse s’enflamment en criant aux complots sans fin… Au moins sur ce point MF remet les choses à leur place. Je maintiens que MF ne prend pas de risque, elle part parce qu’elle en a envie, comme les autres, et si elle ne fait pas ses preuves elle reviendra à la maison, pas comme les autres qui n’ont que le choix de faire leurs preuves. Le côté fan club est décidément bien aveugle avec la réalité qui se permet de vous apprendre que le San Francisco Ballet n’est ni le Royal Ballet de Londres ni l’ABT ni le NYCB. Chaque danseur choisit son chemin de carrière, MF fait celui de premiers rôles dans une plus petite compagnie, c’est son désir et cela ne se discute pas, c’est très bien !

    Répondre
  • J’avais laissé un com mais il semble s’être volatilisé dans les labyrinthe du net 🙂
    Je disais juste que ça ne me surprend pas du tout que Mathilde Froustey ait envie de prendre un peu le large même si je la voyais plus rejoindre une autre compagnie européenne (Vienne par exemple).
    Je ne suis pas “groupie” mais force est de constater le décalage entre les rôles qu’elle danse avec succès et ses résultats aux concours annuels. Je sais bien qu’il y a de nombreuses et nombreux “oublié-e-s” des concours et que ce n’est pas vraiment nouveau (Kudo, Fiat, …) mais ce n’est pas parce qu’elle n’est pas seule dans ce cas qu’il faut qu’elle s’en contente si cela ne lui convient pas. Elle gère sa carrière comme elle l’entend. Et puis sans vouloir polémiquer j’ai du mal à comprendre la politique ODP et je suis de plus en plus déçue par celui-ci. Tant sur le plan des nominations que sur le reste.

    Répondre
  • a.

    C’est sûr que des lecteurs étrangers à ce site ou au monde de la danse nous prendraient peut-être pour des fous… à commenter les carrières des uns et des autres… (bon, ça, je n’en dis rien, car n’y connais rien) ou encore leurs mérites et démérites… Disons, pour essayer de détendre l’atmosphère que nous sommes des passionnés, ou des amateurs au sens propre : ceux qui aiment… Voilà la cause des excès! Mais peut-être est-ce une bonne cause?

    Répondre
    • Pas mal de mon entourage me prend en effet pour une folle mais quand on aime peu importe :-). Je suis tarée de danse et très fière de l’être. Surtout que j’essaie de ne pas imposer ma passion à celles et ceux que ça n’intéresse pas.

      Répondre
  • petitvoile

    Je dirais qu’il faut bien comprendre que concours interne ou pas, il y aura toujours de très bons danseurs moins distribués que d’autres. Un c’est ainsi dans toutes les meilleures compagnies, pourquoi? D’abord parce qu’elles attirent les meilleurs danseurs de la planète: si vous avez le choix entre un contrat de soliste dans une petite compagnie et un contrat de corps de ballet dans une grande, la majorité choisit la grande compagnie parce que meilleurs danseurs autour de soi donc meilleure motivation de travail, meilleur répertoire, meilleurs chorégraphes, plus de spectacles, meilleurs maîtres de ballet, meilleures conditions de travail, meilleure réputation sur le cv etc.. Et vous savez aussi que vous monterez plus difficilement dans l’échelle parce qu’au lieu d’avoir 3 très bons devant vous vous en avez vite une bonne vingtaine d’excellents plus le génie qui peut arriver d’un jour à l’autre. L’Opéra de Paris est une maison de 150 danseurs c’est énorme et la majorité est de très très bon niveau! A chaque audition de l’Opéra je peux vous assurer que les 200 qui se présentent sont la crème de la danse pour décrocher un contrat de corps de ballet de base! Donc voilà, q’une MF venant de l’Opéra de Paris trouve un contrat de Principal à SF est normal, il s’est passé la même chose avec beaucoup de danseurs! Sofiane Sylve a rejoint le SFB comme Principal en venant d’Amsterdam où elle n’avait pas non plus un contrat de Principal. idem Guillaume Graffin qui a rejoint l’ABT comme Principal en venant de Monte Carlo etc… dans le sens inverse Mlle Park pourrait avoir un contrat de Principale n’importe où, elle a choisi l’Opéra où elle est coryphée. Comme vous avez chez Béjart d’excellents corps de ballet! Ce sont des choix de carrière.

    Répondre
  • Petitvoile

    Accueil de la petite française passé inaperçu à New York. Celle qui fascine public et critiques c’est Sofiane Sylve, l’autre française, d’une trempe rare il faut le dire. …. Ou quand les français se trompent de fan club… Certes la petite Mathilde tourne, quoique largement moins que la Sylve, et puis et puis… Le sourire affiché en grand large finit par énerver et voilà, d’une soliste public et critiques attedent mieux qu’un effet de jeune remplaçante hyper stressée dans des rôles pas difficiles en plus dont du déjà connu…

    Répondre
    • Estelle

      Merci pour ce retour, je cherchais justement des avis sur M.Froustey à SF !

      Répondre
    • a.

      Décidément, vous ne l’aimez pas… c’est certes votre droit (puisqu’aujourd’hui on ne parle plus que de droits…) mais je trouve ça assez cruel de déclarer cela de manière aussi abrupte et insistante sur un blog lu par des centaines de lecteurs (euh? des milliers peut-être? pardon Amélie!!). Je n’ai vu Sofiane Sylva danser que deux fois (quand elle dansait dans une compagnie européenne, impossible de me souvenir laquelle, car c’était il y a longtemps) et je comprends votre goût pour sa danse, mais… pourquoi tant d’acharnement contre Mathilde Froustey??

      Répondre
  • petitvoile

    @a. je vous relate dans le sujet qui lui est destiné les critiques New Yorkaises qui ont encensé la française Sofiane Sylve (dont le New York Times qui en fit son gros titre un jour de la semaine de son reportage quotidien) et ne dirent pas un mot de l’autre française passée inaperçue par les journalistes dans la liste des solistes du SF ; je vous relate également ce que j’ai vu sur scène en compagnie d’américains qui ne l’a connaissaient pas avec leur pensée de retour sans a-priori. Chez un artiste et en l’occurrence ici le regard de l’autre est intéressant. Sylve n’est pas mon type de danseuse toutefois il faut bien reconnaître que dès qu’elle entre en scène c’est sur elle que l’oeil est attiré et sur elle qu’il s’accroche, elle a le plus d’exception qui fait une carrière internationale, en allemagne où elle débuta à 15 ans avec une aura qui se concrétisa en rôle titre à 17 ans à l’ENB de Londres puis au Het, au NYCB et à San Francisco. Cette danseuse qui a dansé avec les plus grands est la française la plus connue dans le monde après Guillem et jamais les français ne l’ont invitée, allez comprendre…!

    Répondre
  • petitvoile

    @amélie, je ne mets pas les deux danseuses l’une contre l’autre, seulement ce sont les deux françaises de la cie avec un engouement de blogs parisiens somme toute normal pour Mathilde étant donné que Sylve n’est connue que des professionnels français. En règle générale, quand une ou un français de l’Opéra de Paris rejoint une autre cie de moindre importance c’est pour briller, or la situation actuelle s’avère caduque, à la fois le répertoire du SFB n’est pas top (la choré de Thomasson était très moyenne et leur Cendrillon rend celui de Noureev excellent!!!) avec un contrat de solo principale qui lui tenait à coeur mais où elle danse des rôles de moindre importance qu’à Paris… Même dans Suite en blanc de Lifar maison ODP elle a été distribuée derrière les autres… A 28 ans dans une carrière de danseuse ça questionne… Constat dont les fans peuvent en tirer ce que bon leur dit bien entendu.

    Répondre

Poster une réponse Annuler la réponse