Quand le hip hop croise le Ballet de Bordeaux
Ecrit par : Amélie Bertrand
Jeudi 14 avril. Le Ballet de l'Opéra National de Bordeaux à la Grande Halle de La Villette, pour Tétris d'Anthony Egéa.
Le Ballet de l'Opéra de Bordeaux se fait une réputation de plus en plus grandissante depuis quelques années. Si la troupe tourne régulièrement dans le sud de la France, impossible de les voir sur Paris. C'est donc avec une certaine curiosité que j'ai fait connaissance avec la compagnie hier, dans le carde du festival Hautes Tensions.
Ce festival est dédié aux arts de la rue, donc pas question de voir un ballet classique. La vingtaine de danseur-se- venu-e-s ont présenté la pièce contemporaine Tétris, Anthony Egéa. L'idée ? Une pièce qui mélange la danse classique avec le hip hop, concept plutôt en vogue en ce moment, pour "dévergonder la danse classique". J'avoue avoir très moyennement apprécié cette phrase du chorégraphe, qui sous-entend que le ballet est coincé (il n'a pas vu du Noureev à mon avis).
Mais mis à part le discours, le mélange des styles a plutôt bien marché. L'idée est de toute façon bonne à la base, entre le classique qui se met à se libérer du dos, et le hip hop qui se sert de plus grandes capacités physiques. Il était tout de même étonnant de remarquer que, si le chorégraphe s'est très bien servi des danseurs, il a eu beaucoup plus de mal avec les danseuses.
C'est par elles que tout commence. Elles sont une dizaine, avec une soliste au milieu sur un grand socle rond. Toutes sont sur pointes, et martèlent le plus fort possible le sol avec des petits sauts. j'ai mal pour elle, surtout que c'est l'essentiel de la chorégraphie des dix premières minutes. S'ensuit une démonstration d'efforts physiques, qui sert plus à montrer la souplesse des danseuses qu'à danser véritablement. C'est impressionnant, mais ça n'apporte pas grand chose. Anthony Egéa a visiblement été fasciné par ses femmes longilignes, perchées sur pointe et qui semblent défier les lois du corps humain. Mais il n'a pas su s'en servir, et encore moins leur insuffler son style hip hop. Il n'a peut-être pas trop su les bousculer.
Par contre avec les hommes, et c'est surprenant, mais tout fonctionne. Le principe est le même : une dizaine de danseurs (et plutôt beaux gosses si je puis me permettre) et un soliste au milieu. Le mélange qui n'arrivait pas à se faire avant semble soudainement ce qu'il y a de plus naturel au monde. Les pirouettes et les sauts se fondent avec des figures hip hop, et créent une énergie à laquelle il est difficile de résister. Le travail du dos est particulièrement intéressant, de véritables anguilles. Le soliste résume le tout seul en scène en cinq belles minutes (comment s'appelle-t-il ? Je l'ai trouvé génial), c'est de la belle danse.
Après les femmes, après les hommes, les pas de deux évidemment. Anthony Egéa retombe dans ses travers, et le passage ressemble à nouveau un peu plus à une performance physique qu'à de la danse. Mais le travail de bras cette fois-c est plutôt intéressant, et donne visuellement des choses originales, ce qui est tout de même le but recherché dans ce genre de mélange. Un couple de solistes (très jeunes à première vue) termine le ballet plutôt en beauté. Les pas sont là encore plutôt dans la force, mais il reste difficile de résister à leur engagement et à leurs facilités. Au final, une pièce qui a parfois du mal à faire la symbiose des deux styles, exercice difficile, mais avec des passages de groupes plutôt intéressants, et de belles personnalités.
La soirée s'est terminée avec Vaduz 2036 de la compagnie Melting Spot, pièce que je n'ai pas vu (coup de fatigue+pas emballée par la "partition introspective, radicalement dépouillée" de la présentation+ j'ai le DVD dans mon sac).
Tétris, par le Ballet de l'Opéra National de Bordeaux, jusqu'au samedi 16 avril à 20h30 et dimanche 17 avril à 17h00. Spectacle présenté dans le cadre du festival Hautes Tensions.
© Photos 1 : Sigrid Colomyes
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