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Les Petits Rats en escapade

L’École de Danse de l’Opéra de Paris donne en général ses représentations au Palais Garnier. Mais il arrive qu’elle parte explorer des contrées lointaines, genre le Théâtre de Suresnes, comme c’était le cas le week-end dernier.

Samedi 12 mars, je suis dans le rang des VIP : Brigitte Lefèvre, Laurent Hilaire, Wilfried Romoli, Pierre Lacotte ou Violette Verdy ont fait le déplacement… Et même mon ancienne prof de danse, que je n’ai pas croisé depuis plusieurs années. L’occasion de prendre des nouvelles d’ancien-ne-s élèves devenu-e-s Petits Rats, ou d’apprendre qu’en des temps lointain, j’ai dansé dans un ballet avec Jérémy-Loup Quer.

Beaucoup d’enfants dans la salle, beaucoup de parents. Il n’y a peut-être pas les ors de Garnier, mais le public est chaleureux.

Le spectacle débute avec Dessins pour six de John Taras, sur une musique de Tchaïkovsky, jouée par Alain Moglia, Roland Pidoux et Laurent Choukroun. Quatre filles (Alice Catonnet, Caroline Osmont, Clotilde Tran Phat et Roxane Stojaniov) et deux garçons (Mathieu Contat et Hugo Marchand) évoluent sur scène en tutus et costumes bleus nuits. Les différents ensembles, pas de deux et petits solos sont l’occasion d ‘une démonstrations technique dans le pur style classique. Le ballet est difficile, et les élèves semblent parfois avoir du mal avec la scène plus petite que d’habitude. Le trac a du mal à partir au début, et le souci de passer les nombreuses embûches techniques prend parfois le pas sur la musicalité.

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Vient ensuite un charmant pas de deux de Bournonville, Fête des fleurs à Genzano, avec deux jeunes pousses qui ne doivent pas avoir plus de 16 ans. Laura Bachman assume son statut de soliste avec plein de bravache et une certain candeur, qui ne nuit pas au morceau. Malgré sa coupe à la Justin Bieber (qui fait donc des ravages jusqu’à Nanterre), Lou Thabart nous sort une bien belle variation. Un couple choupinet comme tout, très frais, un joli moment avec beaucoup d’assurance.

Variations de Violette Verdy continue le spectacle, sur une musique de Brahms autour d’un thème de Paganini, jouée par Ellina Akimova. Le schéma est un peu le même que pour Dessins pour six. Quatre danseuses (Alice Catonnet, Ambre Chiarcosso, Laïa Ramon et Claire Trouvé) et quatre danseurs (David Auboin-Tehio, Natan Bouzy, Mathieu Contat et Germain Louvet) se relayent sur scène entre solos, pas de deux et petits ensembles. J’ai un peu de mal à accrocher au style au début, ni pur classique, ni vraiment néo. Les élèves, qui dansent ce ballet pour la première fois, semble tendu-e-s. Mais ils/elles trouvent leur place au fur et à mesure, et Variations offre quelques beaux moments. Tout le monde est mis en valeur à un moment donné, et chacun a droit à son petit moment seul-e en scène.

A corps, Essence de Florent Melac clôt la soirée, sa première chorégraphie, pour douze artistes (Laura Bachman, Valentine Hilaire, Caroline Osmont, Tiphaine Prévost, Clotilde Tran Phat, Marie Varlet, David Auboin-Tehio, Natan Bouzy, Jérémy-Loup Quer, Lou Thabart, Valentin Chou et Baptiste Claudon). Même si Florent Melac tombe parfois dans la facilité, je suis toujours impressionnée par son sens du mouvement et de l’occupation de la scène. Le style, contemporain fluide, fonctionne très bien, et les élèves se sentent visiblement bien dans ce ballet. J’ai même l’impression qu’ils/elles sont plus à l’aise dans ce style que dans le pure classique, qui est pourtant l’essentiel de leur formation. Autre réflexion, à part ça : Florent, tu dois avoir 18-19 ans, et si tu t’amusais un peu dans tes chorégraphies ?

La soirée fut globalement bien sympathique, même si nous avions à faire ici à des élèves, des danseur-se-s encore en formation. Bien sûr qu’il y a eu des ratés, des cafouillages, des tremblements, des sourires crispés indéboulonnables et des peurs visibles de se lancer dans des pas de deux. Mais il est difficile de leur en tenir rigueur, car tout de même, quel professionnalisme pour de si jeunes personnes. Et même si le trac est parfois palpable, le plaisir de danser et d’être sur scène l’était aussi.

La plupart de ces élèves sont en première division, et donc sur la ligne de départ pour entrer dans le corps de ballet en juin prochain. Certain-e-s me semblent sortir du lot, même si ces impressions n’engagent que moi et ma totale subjectivité (message subliminale aux parents susceptibles). Contrairement aux dernières Démonstrations, les filles m’ont cette fois-ci fait plus forte impression, avec globalement beaucoup d’assurance. Clotilde Tran Phat me paraît au-dessus, avec un début de lyrisme dans Dessins pour six, et une vraie présence dans le contemporain. Sa danse fait déjà plus mature, moins ados que celle de ses petit-e-s camarades. Caroline Osmont semble également plus assurée. J’ai également eu un petit coup de cœur pour Laïla Ramon, dont la jolie danse et la musicalité se distinguait dans Variations. Un nom à laisser dans un coin de sa tête.

Je connais un peu moins bien les garçons, et je n’ai pas réussi à mettre un prénom sur chaque visage. Lou Thabart m’a toutefois beaucoup plus, également dans le contemporain. Malgré ses cheveux au vent, il y a chez lui une témérité très ado et une façon de s’imposer dont il est difficile de résister, il n’a pas peur de montrer ce qu’il sait faire. Un jeune fongueux bondissant en puissance.

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