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Rencontre avec Riku Ota, Danseur Étoile du Ballet de l’Opéra de Bordeaux

Arrivé au Ballet de l’Opéra de Bordeaux en 2019, nommé Danseur Étoile en 2023, Riku Ota connaît une carrière à toute allure. Et forme, avec Mathilde Froustey, le nouveau duo incontournable de la compagnie bordelaise. Rencontre pour mieux connaître ce danseur japonais, formé à l’école de John Cranko en Allemagne, passé par le Ballet du Rhin, dont le début de carrière a connu le Covid et de longues blessures, et qui a aujourd’hui soif de tout danser.

 

Riku Ota (Albrecht) dans Giselle de Jean Coralli et Jules Perrot – Ballet de l’Opéra de Bordeaux

 

Comment a démarré chez vous la passion de la danse ?

J’ai démarré le ballet quand j’avais 8 ou 9 ans. Ma grande sœur prenait des cours de danse classique, j’allais toujours avec elle. Il y avait un autre garçon dans le cours, il avait le même âge que moi et on a commencé à parler. Au début, je prenais ces cours parce que ma grande sœur en faisait. Au fur et à mesure des années, la passion de la danse est venue. Et puis j’avais ce DVD de Tetsuya Kumakawa, un grand danseur japonais Principal au Royal Ballet de Londres, que je regardais tout le temps. J’ai voulu faire comme lui, faire les mêmes sauts que lui… Mais les débuts n’ont pas été pas simples. C’est toujours dur pour un petit garçon, qui est constamment jugé parce que la danse classique ne serait que pour les filles.

 

Quand est-ce que les choses ont commencé à devenir plus sérieuses ?

J’ai commencé à faire des concours de danse au Japon, autour de 10 ans. Deux ans plus tard, j’ai gagné un premier prix d’une des plus grosses compétitions du Japon. J’ai alors commencé à prendre la danse au sérieux, à me dire que je pouvais en faire ma vie. Quand j’ai eu 15 ans, j’ai reçu une bourse d’étude pour l’école de danse John Cranko, à Stuttgart, en Allemagne. J’ai dû faire de la danse ma vie, quitter ma famille et partir en Europe. Sur le coup, cela n’a pas été difficile : quand on a 15 ans, on veut réaliser son rêve et on se concentre sur cet objectif. Finalement, c’est plus difficile aujourd’hui d’être loin de ma famille. À l’école John Cranko, c’était très intense. On apprenait la méthode Vaganova, j’avais un professeur de danse russe qui était très dur. Mais il m’a vraiment rendu fort. J’avais aussi pas mal d’amis japonais dans cette école, on se soutenait, j’y ai de bons souvenirs.

 

À la fin de votre scolarité, vous êtes allé au Ballet du Rhin pendant deux ans. Quels souvenirs gardez-vous de ces années ?

J’ai eu l’opportunité d’y aller à la fin de mes études. On faisait beaucoup de danse contemporaine, des créations. J’y ai beaucoup appris. Ce furent deux bonnes années, mais c’était un peu trop contemporain pour moi, j’ai toujours voulu danser les ballets classiques. J’ai donc décidé d’auditionner pour le Ballet de l’Opéra de Bordeaux.

 

Vous arrivez à Bordeaux en septembre 2019, vous êtes nommé Étoile en 2023. Entre-temps, il y a eu les années Covid. Comment se sont déroulées ces quatre premières années si particulières ?

Quand je suis arrivé dans la compagnie, Éric Quilleré m’a donné beaucoup d’opportunités. Mais après quelques mois, le Covid est arrivé et tout a fermé. Ça a été très difficile mentalement. Il n’y avait pas de public mais il fallait continuer. On a travaillé La Sylphide pendant longtemps, pour un live-stream qui a finalement été annulé à la dernière minute. C’était très triste, j’avais très envie de danser pour ma famille, qui me regardait depuis le Japon. Puis les théâtres ont rouvert… Vous savez, c’est toujours stressant de monter en scène, ce n’est jamais facile. Mais quand vous finissez le spectacle, vous vous sentez vraiment bien, votre passion vous anime. En mai 2023, j’ai été nommé Danseur Étoile. C’était très surprenant. J’étais à la fois heureux, très fier, mais j’ai aussi ressenti beaucoup de pression. Je n’avais jamais eu autant de responsabilités.

 

Ces quatre ans ont aussi été émaillés de blessures chez vous. Comment les avez-vous surmontées ?

Avec beaucoup de kinés ! J’ai eu d’abord une opération. Quand je suis revenu, je me suis à nouveau blessé, au même pied. Ce fut le moment le plus difficile pour moi : je m’arrête longtemps, je travaille beaucoup pour revenir puis je me blesse à nouveau. Ça a été très dur. Mais beaucoup de gens autour de moi m’ont soutenu, ma médecin, ma petite amie. C’est ce qui m’a aidé à revenir. J’ai finalement repris dans Don Quichotte. J’étais à la fois stressé, car c’est un rôle difficile, et heureux de revenir. J’étais fier de moi. Aujourd’hui, je suis serein techniquement.

 

Riku Ota avec Diane Le Floc’h dans Don Quichotte de José Martinez

 

Qu’avez-vous envie de danser aujourd’hui ?

J’ai envie de tout danser ! Giselle était l’un de mes ballets préférés, je l’ai dansé il y a quelques mois. J’aime ces ballets dramatiques. Je veux aussi danser des œuvres plus contemporaines. J’ai beaucoup aimé danser Woke Up Blind de Marco Goecke, des pièces de Sol León & Paul Lightfoot. Je veux être un danseur qui peut faire tout ce qu’il veut, dans plein de styles différents.

 

Et comment vous sentez-vous à Bordeaux ?

Je viens d’une petite ville au Japon, donc je n’aime pas beaucoup les grandes villes. Bordeaux me convient, j’aime beaucoup la vieille ville… Et j’aime bien le vin et les canelés (rires).

 

Riku Ota est à voir dans la soirée Golden Hour du Ballet de l’Opéra de Bordeaux au Grand-Théâtre jusqu’au 17 mars, puis au Théâtre Olympia d’Arcachon le 11 avril

 

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