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Conférence dansée autour de George Balanchine – CRR de Paris

Le CRR de Paris a organisé cette semaine une conférence dansée autour de George Balanchine.

George-Balanchine

Claude Sorin a ainsi retracé la carrière du chorégraphe américain, expliqué son style et ses particularités, illustrant régulièrement son propos par des extraits de ballets, interprétés par les classes de danse du CRR de Paris. L’occasion de réviser la biographie du chorégraphe avant la reprise du Palais de Cristal en mai à Bastille, mais aussi de découvrir un peu mieux ces classes de danse. Beaucoup d’élèves de l’École de Danse de l’Opéra et du CNSMDP viennent en effet de ce Conservatoire de Région, qui propose une scolarité à mi-temps d’un bon niveau.

« Dieu crée, moi j’assemble« , disait George Balanchine. « La danse ne devrait rien illustrer. Le plus important est le mouvement. Voyez la musique et écoutez la danse« . La conférencière rappelle d’abord les grands axes de travail principaux du chorégraphe, et surtout son rapport très fort à la musique. Ses principaux ballets sont abstraits, construits à partir de la musique. À chacun de se raconter sa propre histoire sur ce qu’il voit.

George Balanchine a également mis très en avant la Ballerine, qu’il considère comme sa muse. Suzanne Farrell compte parmi ses grandes interprètes. Il a créé plusieurs ballets pour elle, dont Tzigane (1975). Il n’y a pas d’intrigue. L’élément du personnage, la tzigane, est apporté par le choix de la musique de Ravel.

Une jeune fille du CRR se lance sur scène dans la variation de la tzigane. On y retrouve de nombreux éléments chorégraphiques propres à Balanchine : le pointé en-dedans, le jeu sur le pied qui pointe et flexe, la mobilité du bassin…

Tzigane, dansé par Suzanne Farrell et Peter Martins :

 

Un peu d’histoire

George Balanchine a fait des études de piano. Il hésite d’ailleurs entre la carrière de musicien et celle de danseur. S’il choisit la danse et la chorégraphie, sa grande sensibilité musicale lui permettra de discuter d’égal à égal avec de grands compositeurs de son époque. George Balanchine fait ses premiers pas de danseur dans La Belle au bois dormant, alors qu’il est encore élève. La musique le marque, il en gardera une profonde admiration pour Tchaïkovsky et utilisera régulièrement ses musiques pour ses ballets.

Au début du XXe siècle, les danseurs du Kirov, dont Balanchine fait partie, cherchent à s’émanciper de Marius Petipa. Isadora Duncan est passée par là, avec sa grande liberté du corps. George Balanchine fonde alors un jeune ballet, dont les représentations mêlent ses premières créations et des extraits de pièces de Fokine ou Petipa. Mais la troupe est dissoute par les autorités. George Balanchine est alors engagé dans les Ballets Russes de Diaghilev. Puis il travaille à Londres, à Paris, avant de s’installer à New York en 1933. Il fondera le New York City Ballet en 1948.

Créé en 1967, Joyaux est la synthèse des différents endroits où il a pu travailler. Chaque partie, portant le nom d’une pierre précieuse, illustre une technique particulière. Emeraudes pour l’école française, Rubis pour l’école américaine et Diamants pour l’école russe. Ce dernier extrait est un véritable hommage à Marius Petipa, avec de nombreuses citations des actes blancs du chorégraphe.

Une vingtaine d’élèves de deuxième cycle entrent en scène pour présenter un extrait de Diamants. Le niveau est assez hétéroclite, entre des jeunes filles visant clairement une voie professionnelle et d’autres plus dans une vision amateure. Les ensembles sont toutefois très en place, dansés avec cohérence et précision.

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Igor Stravinsky

La collaboration entre George Balanchine et Igor Stravinsky fut prolifique, débutant avec les Ballets russes et durant presque 50 ans, jusqu’à la mort du compositeur.

Apollon (1928) reste l’un des exemples emblématiques de ce duo, où la danse se fond véritablement avec la musique. George Balanchine réduit sa chorégraphie à son essence, avec un grand travail sur l’espace. Il étudie beaucoup la partition, se disant être un « compositeur de ballet« .

Agon (1957) est une autre de leur collaboration. George Balanchine a l’idée d’une compétition dansée, où les danseurs et danseuses rivalisent d’intelligence et de virtuosité. On y retrouve les traceurs du chorégraphe comme les poignets cassés. La chorégraphie reflète toutes les variétés rythmiques de la musique, avec quelques clins d’oeil aux danses de cour, qui s’entendent aussi dans la musique.

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Casse-Noisette

Au-delà de ses créations, George Balanchine veut également faire découvrir la tradition des ballets classiques aux États-Unis. Il crée alors en 1954 un Casse-Noisette, en restant fidèle à la partition. Cette version est repris tous les ans à Noël par le New York City Ballet.

Les élèves montrent alors un pas de cinq de la danse des Mirlitons.

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L’Opéra de Paris

George Balanchine est invité à créer Les Créatures de Prométhée pour le Ballet de l’Opéra de Paris. Mais malade, il ne peut assurer les répétitions. C’est finalement Serge Lifar qui s’occupera de ce ballet, prenant par la suite la direction de la compagnie.

George Balanchine revient à Paris un peu plus tard, pour créer en 1947 Le Palais de Cristal, sur une musique de Georges Bizet. Ce ballet veut mettre en valeur la hiérarchie du corps de ballet, propre à la compagnie parisienne.

Quelques élèves du cycle spécialisé, plus âgées que les précédentes, dansent un extrait, où cette hiérarchie est en effet palpable : un corps de ballet d’une dizaine de filles, deux demi-solistes et une Étoile. Le niveau est beaucoup plus homogène, les élèves font preuve d’une solide technique, toujours très ensemble. Les ballets ont été remontés avec visiblement un grand sens du détail.

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Les ballets abstraits

« La musique n’est pas seulement de la mélodie, mais du temps, de l’harmonie. Les ballets sont sans livret mais très concrets : on peut presque toucher les danseurs et danseuses ». Il n’y a pas d’histoire, mais George Balanchine refuse de terme d’abstraction. Ce style a surpris dès son arrivée à New York.

 

L’influence de Broadway

Arrivé à New York, George Balanchine s’intéresse aux spectacles de Broadway, où il découvre notamment les danseurs afro-américains. En 1936, il crée la chorégraphie de la comédie musicale On Your Toes. Il ouvre avec ce spectacle la voie aux musicals modernes. La danse n’est plus là comme un simple divertissement, elle sert aussi à raconter l’histoire. Puis il crée Cabin in the Sky en 1940. Sa chorégraphie est marquée par les dissociations, l’influence de la danse africaine et de la post-modern dance. Jerome Robbins continuera ce travail dans la comédie musicale, pour arriver en 1957 à West Side Story, spectacle emblématique de Broadway.

Chez Balanchine, cette évolution se marque aussi dans ses ballets, aux grandes qualités rythmiques et percussives. Les accents changent.

Les élèves illustrent cette partie avec un extrait des Quatre tempéraments, Flegmatique et une belle variation de Colérique.

 

L’école américaine

George Balanchine arrive à New York en 1933, poussé par le grand mécène des arts Lincoln Kirstein, qui souhaite monter avec lui une compagnie. Mais le chorégraphe souhaite tout d’abord monter une école de danse. La School of American Ballet voit le jour un an plus tard, en 1934. Dans ses cours, le chorégraphe fait énormément travailler la musicalité et le rythme, avec des phrases sur 5 ou 7 temps. Il insiste beaucoup sur l’énergie du mouvement qui doit être plus profonde, sur la projection, la mobilité du bassin qui peut se décaler, le poids du corps un peu plus vers l’avant… Petit à petit, une nouvelle technique se construit.

George Balanchine crée son premier ballet pour l’école seulement six mois après son ouverture : ce sera Sérénade. Il s’inspire en fait des cours qu’il donne. Pour la première leçon, une quinzaine de filles sont présentes, il leur fait faire des exercices de ports de bras (le début de Sérénade). Pendant un cours, une fille arrive en retard. Un autre, une fille tombe, etc… Le ballet s’est construit comme ça.

Beaucoup ont voulu y trouver une histoire par la suite, mais le chorégraphe l’assure : inutile de chercher. « Il n’y a pas d’histoire cachée. Ce sont juste des danseuses, de la danse dans la lumière de la lune« .

Les grandes élèves du CRR dansent pour terminer un large extrait de Sérénade. Une jolie soliste se démarque, mais toutes font preuve d’un grand ensemble et de musicalité. Tous ces ballets ont été remontés pour le Conservatoire par Olivier Chanut, Ariane Delarbre et Yannick Stéphant, avec la participation de Christa Charmolu.

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Commentaires (3)

  • Delphine

    J’ai assisté à cette conference dansée. Je venais pour la première fois au CRR et je ne savais pas trop à quoi m’attendre. Les démonstrations étaient enjouées et rendaient vivantes les explications. Je reviendrai avec plaisir voir le travail de ces élèves talentueuses.

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  • ni on

    J’ai été emporté par le long extrait de Sérénade.

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