Orphée et Eurydice : qui voir danser sur scène ?
Orphée et Eurydice, le ballet-opéra de Pina Bausch, est de retour sur la scène du Palais Garnier, du 3 au 21 mai. Cette oeuvre très forte de la chorégraphe allemande mélange la danse et le chant, chaque personnage étant interprété à la fois par un-e danseur-se et un-e chanteur-se.
Pour la danse, deux couples se partageront les distributions, connaissant déjà très bien le ballet. A vrai dire, il n’y a pas tellement de choix à faire pour cette série. Dans les deux cas, les interprètes féminines sont formidables – même si très différentes – quand les danseurs ne sont pas forcément les plus adéquats. Il reste dommage que de nouvelles distributions n’aient pas fait leur apparition depuis la très récente surprise. Orphée et Eurydice propose trois personnages passionnants, et si Marie-Agnès Gillot et Alice Renavand sont superbes dans ce répertoire, d’autres auraient pu aussi apporter quelque chose.
Marie-Agnès Gillot (Eurydice), Stéphane Bullion (Orphée) et Muriel Zusperreguy (Amour) : les 3, 4, 8, 12, 15, 17 et 20 mai.
Marie-Agnès Gillot est la grande interprètes de Pina Bausch de la compagnie. Avec ce ballet, il serait facile d’aller dans la facilité : l’oeuvre est très facile d’accès, naturellement dramatique, extrêmement bien mis en scène. Mais Marie-Agnès Gillot va toujours plus loin, proposant un personnage abouti d’une grande densité. Ce sera aussi son retour en scène après quelques mois d’absence, il sera intéressant de voir comment son personnage a évolué. Stéphane Bullion n’était par contre pas des plus convaincants lors de la dernière reprise, allant plus à la beauté du geste qu’à la profondeur, presque trop-propre-sur-soi pour un Orphée crédible.
Alice Renavand (Eurydice), Florian Magnenet (Orphée) et Charlotte Ranson (Amour) : les 5, 9, 10 et 13 mai. Avec Nicolas Paul (Orphée) les 16, 19 et 21 mai. Avec Letizia Galloni (Amour) : les 16 et 19 mai.
Pina Bausch a une grande importance dans la carrière d’Alice Renavand, ce que la danseuse rend bien à la chorégraphe. Toute en sensibilité, son interprétation d’Eurydice émeut profondément. Dommage, là encore, que son partenaire ne soit pas forcément des plus à l’aise dans ce genre de répertoire, n’allant pas au fond du personnage. À noter dans le court rôle d’Amour, Charlotte Ranson qui y est lumineuse, et les débuts de Letizia Galloni qui devrait suivre la même voie.
Et vous, quelle distribution allez-vous voir ? Laquelle vous tente le plus ?
anne-claire
Il y a quand même de l’inédit: la prise de rôle de Florian Magnenet. C’est assez curieux d’ailleurs de le retrouver dans ce genre de répertoire, je l’aurais plus vu sur le Balanchine que sur Orphée.
Pour ma part, ce sera MAG / Stéphane Bullion.
Joelle
Je vais commencer par MAG/S. Bullion et si la greffe prend, il y aura une deuxième séance avec A. Renavand, N. Paul et L. Galloni !
Mathilde
Orphée et Eurydice, le ballet qui m’a tellement émue que j’en ai pleuré du début à la fin! C’était avec Marie-Agnès Gillot en 2008 🙂 Je regrette de ne pas pouvoir le revoir cette année!
a.
Alice Renavand, Florian Magnenet et Charlotte Ranson. Très heureuse de voir les deux danseuses, bcp plus perplexe pour le danseur que je n’imagine pas un instant dans ce rôle… J’essaie de ne pas préjuger… Laissons lui sa chance…
Delphine
J’étais à la représentation d’hier soir.
Quel dommage de rallumer ainsi la lumière entre chaque tableau !! Je ne comprends pas du tout ce choix, cela a pour moi beaucoup nui à la force du spectacle. Je trouve aussi dommage qu’il n’y ait eu aucun surtitrage… L’oeuvre se présente comme un opéra-ballet, or ici à moins de comprendre l’allemand (et encore j’imagine que cela ne suffit pas, on surtitre bien les opéras français), le texte du livret joue un rôle uniquement musical, je trouve ça dommage.
Marie-Agnès Gillot est formidable, le “corps de ballet” aussi, Stéphane Bullion n’était pas assez habité par son personnage à mes yeux.
agnès
Quelques impressions sur la représentation du 8 mai: j’adore cet opéra de Gluck, et ce que Pina Bausch en a fait, et j’essaie de ne jamais rater cette oeuvre sublime. Cette fois, côté danse, j’en suis sortie très partagée: merveilleux mouvements d’ensemble, qui coupent le souffle (tableau des ombres heureuses à pleurer de beauté), mais sur “Violence” j’ai vraiment trouvé que ça manquait d’énergie et d’engagement, malgré l’intensité des Cerbère Cordier et Houette. Et si MAG est au-delà des mots, magique, bouleversante, il n’en est pas de même, loin s’en faut, pour Bullion…. A mes yeux l’Orphée de Pina Bausch n’est pas là pour se regarder danser et faire de jolies choses: sa partition est âpre, hésitante, torturée: il est dans le doute et l’épouvante, et quelque chose en lui sait très bien qu’il ne peut qu’échouer; à aucun moment je n’ai ressenti cela chez Bullion, et je me suis surprise souvent à regarder davantage son double chantant ,Maria Ricarda Wesseling (épatante!) Des 4 Orphée que j’ai vus, c’est vraiment le plus terne et le moins expressif…. A sa décharge c’est certainement un rôle très difficile, dans lequel on ne peut pas espérer “compenser” par la ligne, l’esthétique, le bien fait ou la virtuosité…. et même José Martinez que j’adore y était un peu gêné aux entournures (en tout cas le soir où je l’avais vu). J’avais bien aimé Nicolas Paul, justement parce qu’il n’était pas sûr de lui, et que sa maladresse (toute relative!) rejoignait en profondeur le personnage…. Finalement, le seul Orphée qui ait tout compris, pour moi, c’est Yann Bridard: brut de décoffrage, vulnérable, habité, il avait tout et me captivait de bout en bout: quel bonheur que ce soit lui dans le DVD!
Je m’interroge tout de même sur le choix des interprètes: MAG est incontournable , Renavand remarquable, mais pourquoi ne pas avoir tenté une troisième Eurydice? Et pourquoi Magnenet, a priori si lisse (mais qui après tout, comme vous l’écrivez, surprendra peut-être) et pas Belingard, par exemple, qui a la sensibilité et la “sauvagerie” qu’il faut pour ce rôle? Et d’ailleurs que devient ce beau danseur?…. Je rêverais aussi, vu ce qu’il montre chez Pina Bausch, de voir Cordier en Orphée… Ou Yann Saiz…. ou Hervé Moreau, je suis sûre qu’il serait très surprenant là-dedans….
Bravo pour votre très remarquable blog.
Bien à vous,
Agnès
a.
Je retire tout ce que j’ai dit ici sur Florian Magnenet !!! son Orphée fut réussi ! On voyait la tension dramatique, à chaque tableau plus intense, dans la courbure de son dos, l’abattement de ses épaules. Je suis stupéfaite de le voir comme ça! Vraiment ! Même lui, lors des saluts, avait l’air vidé et étonné de ce qui lui arrivait… Très beau “spectacle”, si on peut appeler une telle œuvre ainsi.
Amélie
@ Anne-Claire : C’est drôle, j’étais persuadée qu’il l’avait déja dansé. Un choix qui ne semble pas évident en effet.
@ Joëlle et Mathilde : J’avoue que la série 2014 m’a un peu déçue par rapport à mes souvenirs.
@ a. : Merci de vos impressions ! Un danseur est en constante évolution, et c’est vrai qu’il a gagné une certaine maturité. Son Lenski il y a quelques mois m’avait aussi étonné.
@ Delphine : J’avais aussi souffert du manque de sous-titrage la première fois. La danse est vraiment lié à la musique et ne pas comprendre les paroles nuit à la compréhension globale de l’oeuvre.
@ Agnès : Merci de vos impressions ! Que je partage dans son ensemble. De nouvelles distributions auraient peut-être permis plus de force.