Comment monter sa compagnie de danse
Pratiquer la danse toutes les semaines et se produire lors d’un spectacle de fin d’année ne suffisent pas toujours aux amateurs et amatrices de danse. Surtout si l’envie de créer des chorégraphies rejoint celle de danser plus souvent. Se pose alors la question de créer sa propre compagnie pour aller de l’avant. Car contrairement aux idées reçues, cela n’est pas réservé aux danseur.se.s diplômé.e.s et peut s’accomplir comme un loisir (ou presque !).
Comment savoir si l’on est prêt ? Quelles sont les démarches administratives à connaître ? Où trouver une salle de répétition, des costumes, un lieu où se produire devant le public ? Comment communiquer sur ses spectacles ? Cloé Duvergé, professeure de Lettres, a tout juste 30 ans. Sa compagnie de danse Je-elles… et lui! est née il y a peine un an et demi. Voici son retour d’expérience inspirant et ses meilleurs conseils pour monter à son tour une compagnie de danse.
Quel est le niveau de danse requis pour lancer sa compagnie ?
Il n’y a évidemment aucune règle en la matière mais les volontaires peuvent ressentir un problème de légitimité et de confiance en soi. Cloé Duvergé n’est pas diplômée, elle bénéficie néanmoins d’un parcours très investi en école de danse : dix années de classique, du modern’jazz à partir de 14 ans, et depuis ses 18 ans, du contemporain.
Elle raconte : “J’avais commencé à créer des chorégraphies pour le spectacle de mon école avant de monter la compagnie. Mais je n’aurais jamais eu l’audace de me lancer si l’une des danseuses du cours que je suivais (elle-même diplômée d’État en danse contemporaine) ne m’avait pas dit un jour : ‘Vas y ! Qu’attends-tu ? Monte ta compagnie !’.
En revanche, pas question d’arrêter les entrainements ! Apprendre d’autres techniques et évoluer sont des moteurs importants. Tous les danseurs de la Compagnie Je-elles… et lui! poursuivent ainsi leur formation “chacun.e de leur côté” en dehors des répétitions de la troupe.
Comment choisir ses danseurs et danseuses ? Comment définir son projet ?
Pour monter une compagnie, il apparaît crucial de s’entourer de danseurs et danseuses dont on connaît bien les forces et les faiblesses et dont les bases en danse sont communes. “J’en ai parlé aux danseur.se.s avec qui je travaillais déjà en atelier chorégraphique. J’ai choisi ceux qui avaient envie de me suivre et dont je me sentais proche. L’admiration mutuelle est essentielle“, résume Cloé Duvergé.
Reste à définir ensemble les contours du projet et tout d’abord le style de danse. “Nous sommes à la croisée des danses classique, modern’jazz et contemporaine. Nous avons même trouvé trois mots pour définir notre style : gracieux, sensuel et sensible“, reprend la danseuse.
Vient ensuite le choix délicat du nom de la compagnie qui doit résumer au mieux l’essence de la démarche. Pour exemple, voici l’explication du choix de Cloé Duvergé. “‘Je’, c’est mon envie de créer des pièces personnelles. ‘Elles’, ce sont les danseuses aux personnalités multiples qui me font confiance. ‘Lui’, c’est l’homme de la compagnie ! ‘Je-elles’ est aussi un clin d’oeil à notre professeure commune qui s’appelle Joëlle Mathieu (centre d’animation Baudricourt)“.
Administrativement, n’est-ce pas trop compliqué à mettre en place ?
Le plus simple est de choisir le statut d’association loi de 1901. Monter une association est un véritable jeu d’enfant aujourd’hui, toutes les démarches sont expliquées très clairement sur Internet. “On s’en fait toute une histoire mais c’est très simple !“, confirme Cloé Duvergé. “En trois semaines, l’association était créée. J’ai rempli et envoyé les papiers. Je suis la présidente. Mon compagnon a accepté d’être le trésorier. Une des danseuses joue le rôle de secrétaire. Nous faisons nos compte-rendus d’Assemblée tous ensemble“.
Il faut toutefois veiller à bien définir les statuts au moment de les déposer. Pour les rédiger, inutile d‘utiliser le jargon juridique que l’on trouve dans les exemples en ligne. Des mots simples et du bon sens suffisent. “Je conseille de faire un règlement intérieur, cela pose un cadre. Qui fait quoi ? Comment intégrer de nouveaux danseurs ? J’ai demandé à la Maison des Associations du 13e de tout relire pour avoir un avis extérieur“, ajoute Cloé Duvergé.
Comment s’organiser pour travailler ?
Les chorégraphies sont de véritables œuvres complètes : scénario, mouvements, costumes, musiques, distribution des rôles, placements. “Ce sont des projets qui murissent pendant plusieurs mois. Je pense mes chorégraphies comme des tableaux qui s’enchaînent“, explique Cloé Duvergé.
Et pour garder une trace, nul besoin de logiciels compliqués. Un document dans un logiciel de traitement de texte bien pensé peut faire l’affaire. Sans oublier les vidéos à s’envoyer par WeTransfer pour que chacun.e puisse répéter en autonomie.
Et pour mener à bien un projet chorégraphique à plusieurs, il y a une règle d’or : le respect précis d’un calendrier. “Je prévois beaucoup de parties libres où les danseur.se.s doivent imaginer leur partition seul.e, ou à deux. En juillet-août, tout le monde travaille chez lui sur un premier jet. En septembre-octobre, on peaufine en petits groupes chez les uns et les autres. On s’envoie en permanence les vidéos, même si on danse en pyjama seulement 30 secondes ! L’idée étant d’avancer au maximum pour assembler le tout lorsqu’on a une salle pour répéter. C’est à dire de fin novembre à fin février. La période des spectacles s’étale entre mars et juin et reprend parfois à la rentrée de septembre. Bref, il faut être très organisé“, détaille Cloé Duvergé.
Où trouver une salle de répétition et des costumes ?
Si la compagnie veut proposer un tarif d’adhésion abordable à ses danseur.se.s (100 euros par an avec l’assurance dans le cas de la Compagnie Je-elles… et lui!), il va falloir faire preuve d’initiative et de créativité ! Il faut commencer par écumer les associations, les salles de quartier, les gymnases à la recherche d’un espace à louer. “J’ai trouvé La Maison des Pratiques Artistiques Amateurs à Paris. Ils nous louent un vrai studio de danse tous les dimanches soirs (4 euros de l’heure) de 17h à 20h pendant trois mois“, raconte Cloé Duvergé.
Pour les costumes, tout dépend du style envisagé. Les magasins de prêt-à-porter regorgent de vêtements à petits prix. Sinon, on peut faire appel à une pro. “J’ai une costumière qui réalise les tenues. Mais je choisis les tissus (parfois issus de vêtements d’occasion) et dessine les modèles moi-même“, confie Cloé Duvergé.
Comment réussir à se produire sur scène ?
Le but de monter une compagnie est de se produire sur scène. Pour trouver un endroit où danser, le bouche-à-oreille fonctionne très bien, surtout avec l’aide des réseaux sociaux. Un dossier de presse qui donne les informations clés sur la compagnie (nom et formation des danseur.se.s, style de danse, coordonnées, références…) agrémenté de photos (prises par l’entourage tout simplement) représente un gage de sérieux auprès des différent.e.s interlocuteur.rice.s.
“Nous avons fait les Rencontres de danse du XIIIème puis le reste a suivi assez naturellement (six spectacles la première année)“, explique Cloé Duvergé. “On rencontre d’autres compagnies qui font d’autres scènes… On a aussi créé une page Facebook avec nos vidéos pour se constituer une petite communauté et communiquer sur nos dates de spectacles“.
Comment être sûre que l’on ne se trompe pas ?
Selon Cloé Duvergé, la passion de la danse ne suffit pas pour monter sa compagnie. “Il faut être créatif, savoir communiquer, avoir l’envie de toucher à tout, pas seulement à la danse. Je ne compte pas mes heures mais je ne regrette rien“, conclut la danseuse. À vous de jouer… et de danser.
Laetitia Basselier
Merci pour ce bel article !:) Et bonne chance à cette compagnie, dans la réalisation de ses beaux projets ! Il y a aussi plein de festivals auxquels envoyer son dossier pour se produire – à Aurillac, Chalon-sur-Saône…
Cloé Duvergé
Merci Laetitia ! Pour le moment nous nous produisons en région parisienne, mais j’espère que nous irons un jour un peu plus loin!
Marchal
Bonjour ! Et félicitations pour la réalisation de ces beaux projets !
J’ai une petite question, rémunérez vous vos danseurs ?
Bonne chance pour la suite de votre compagnie !
Cloé Duvergé
Pardon pour la réponse très tardive! Les danseurs sont tous des amateurs exerçants par ailleurs un métier sans rapport avec la danse. Personne n’est rémunéré dans l’association. Nous cotisons même pour pouvoir danser ensemble.
Cindy
Bonjour,
Je souhaite créer une troupe itinérante et j’aimerais savoir quel statut vous me conseillez. Devant rémunérer les artistes et recevoir une rémunération grâce aux cachets, je ne pense pas que le statut d’association soit approprié.
Merci pour votre attention.
celine
merci pour ce beau partage rempli de générosité et d,espoir!
Lucy
Bonjour et merci pour votre article.
Je voulais savoir comment faites vous vivre votre association financièrement ? Percevez vous des cachets suite aux différents spectacles proposés en ayant le statut d’association ? Merci par avance pour votre retour. Cordialement