Cités danse connexions #1, du bon et du moins bon [Suresnes cités danse]
Soirée Cités danse connexions #1, dans le cadre du festival Suresnes cités danse, au Théâtre jean Vilar. 4Sounds de Delphine Caron, Lastminutes.org de Sonia Duchesne et Double Je(u) de Farid Berki et Serge Aimé Coulibaly. Lundi 14 janvier 2013.
Si le festival Suresnes cités danse aime inviter les grands noms de la danse hip hop et contemporaine, deux de ses programmes sont toujours réservés à la jeune génération. Intitulés les Cités danse connexions, ce sont souvent des soirées éclectiques, dans le genre comme dans la forme, et parfois dans la qualité. L’épisode 1, qui ouvrait d’ailleurs la 21e édition du festival, répondait bien à cette définition. Il y a eu du hip hop traditionnel et plus original, des ensembles, un duo et un solo, des danseur-se-s enthousiasmant-e-s et un gros plantage.
Qui dit jeunes artistes dit forcément personnalités en mutation, et prise de risques pas toujours bien calculé. Mais il faut rien quelques ratés avant d’arriver à quelque chose de réussi. Sonia Duchesne a un certain courage pour se lancer seule en scène, avec sa pièce, chorégraphiée par elle-même, Lastminutes.org. Le sujet était lourd, imaginer la dernière nuit avant sa mort, et la musique écrasante, le magnifique quatuor à cordes La Jeune Fille et la Mort de Schubert. Mais si une belle musique peut aider à rendre son geste plus grand et plus émouvant, elle ne suffit pas toujours à se laisser emporter. Elle peut même agrandir le fossé avec une chorégraphie ratée, et accentuer encore plus sa pauvreté. Lastminutes.org n’a aucun intérêt chorégraphique, la danse est d’ailleurs très peu présente, l’on est presque dans le mime. Les quelques gestes sont vus et revus, sans grand réflexion sur l’équilibre et le rapport au sol. L’émotion est absente, les gestes semblent dénués de sens. La chorégraphe a vu trop grand, trop dur, et c’est tombé à plat.
4Sounds de Delphine Caron, qui ouvrait le bal, était heureusement d’un tout autre intérêt. Il ne fallait pas chercher la nouveauté chorégraphique dans ce quintette, formidablement dansé par la chorégraphe et Sonia Bel Hadj, Franck Luce, Pascal Luce et Alex Tuy Rotha. C’était juste du plaisir de danser, avec beaucoup d’entrain, de virtuosité et de peps qui donnaient à l’ensemble une énergie séduisante. Les effets de lumière pour créer la surprise ne sont pas forcément nouveaux, mais ils fonctionnent. Les danseurs et danseuses font une démonstrations de hip hop, s’amusant visiblement à montrer ce qu’ils savent faire et heureux de danser ensemble.
Les duos sont particulièrement intéressants, où les corps semblent s’imbriquer sans presque jamais se toucher. C’est un petit jeu du chat et de la souris, sur scène et avec le public. Et contrairement aux apparences, ce n’est pas le grand baraqué qui mène la danse, mais une petite gonzesse surdynamitée et rayonnante (alerte talent !). 4Sounds est au final une pure démonstration technique, mais diablement agréable.
La troisième pièce de la soirée, Double Je(u), était sans conteste la plus intéressante. Le hip hop n’est plus un style nouveau. Ce qui est intéressant maintenant, c’est de voir ses pas, sa forme, être transposés pour l’éloigner des clichés, et lui ouvrir d’autres horizons. C’est exactement ce que font Farid Berki et Serge Aimé Coulibaly. Le hip hop sert ici un duo abstrait et poétique, non sans humour et fantaisie. Cela peut être autour d’un ruban, d’une phrase, d’un jeu. Les deux danseurs sont parfois jumeaux, parfois miroir, parfois totalement distincts. C’est un univers un peu bizarre où il est parfois difficile d’entrer, de suivre ou d’y rester, c’est un peu décousu aussi. Mais l’inventivité de la pièce, les gestes d’une grande malléabilité, la qualité de la danse et l’impression de découvrir le hip hop sous un nouveau jour interpellent indéniablement.
Suresnes cités danse, jusqu’au 3 février au au Théâtre Jean Vilar.