Oscyl – Héla Fattoumi et Éric Lamoureux
Pièce pour sept danseurs et sept sculptures, Oscyl de Héla Fattoumi et Éric Lamoureux a été créée au Festival Mondial des théâtres de marionnettes de Charleville-Mézières. Présentée au Théâtre de Chaillot sur le plateau de la salle Firmin Gémier, elle propose une confrontation ludique et fertile entre des êtres de chair et des figurines à taille humaine diablement douées pour le mouvement.
Sagement alignées côté jardin, comme endormies, elles intriguent avec leurs courbes rebondies et leur silhouette quasi humaine. Même avant de les avoir vu bouger, on pressent bien que ces sculptures mystérieuses capables d’être mues vont happer tous les regards. Œuvres du plasticien Stéphane Pauvret, ces Oscyls s’inspirent du travail du sculpteur Hans Arp, proche du mouvement Dada. Quand ils s’animent sous la sollicitation des danseurs, les oscyls initient un rythme propre qui leur donne une théâtralité singulière.
À leur contact, la danse qui se déploie est élégante et précise, limite précautionneuse. Une danse où le partenaire humain développe une écoute infinie dans son rapport à cet autre, qui malgré son statut d’objet se révèle étonnamment vivant. Oscyls inanimés, avez-vous donc une âme ? se surprend-on à penser, plagiant le poète. Toute une combinaison de mouvements, de plus en plus acrobatiques par moments, nait de la confrontation entre les deux.
Toute une gamme de sentiments se déploie aussi dans la manière de chaque danseur et danseuse d’aborder cet être traversé d’oscillations, cet étranger inaccessible, ce totem à sacraliser. Des sentiments qui donnent chair à cette danse très abstraite, parfois froide. Comme l’évoque Héla Fattoumi, « l’oscyl, partenaire non humain, oblige à reconfigurer, déplacer nos perceptions. » Il faut effectivement une sacrée dose d’humilité, mêlée à beaucoup de folie et de maîtrise pour se frotter à ces drôles de culbutos qui n’en font qu’à leur tête. Un défi auquel ne répond pas toujours la présence – hélas – inégale des interprètes.
Chacun.e a sa propre manière d’apprivoiser l’oscyl. Là où la pièce est réussie, c’est lorsque que la chorégraphie ne les réduit pas à des accessoires, des dance-toys désincarnés. Le caractère un peu répétitif ou trop étiré de certaines séquences renforce cette impression. L’oscyl prend toute sa dimension lorsqu’il devient un co-équipier avec lequel le rapport de force s’inverse constamment. Comme dans les rapports entre humains.
Oscyl de Héla Fattoumi et Éric Lamoureux à Chaillot – Théâtre national de la danse. Avec Sarath Amarasingam, Mathieu Coulon, Jim Couturier, Robin Lamothe, Johanna Mandonnet, Clémentine Maubon, Angela Vanoni. Jeudi 22 février 2018. En tournée en France.