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Sofia Essaïdi : « Velma dans ‘Chicago’, c’est le rôle de ma vie »

L’arrivée de la comédie musicale Chicago au Théâtre Mogador à Paris est l’un des événements de la saison. Ce grand classique de Broadway est présenté en français, mais dans sa version originale de 1996. Meurtre, corruption, glamour, mais aussi chorégraphies de haut vol et chansons indémodables, Chicago a tous les atouts d’un grand musical. Pour cette reprise française, DALP est allé rencontrer pendant les répétitions Sofia Essaïdi, qui tient le rôle de Velma Kelly. Cette véritable performeuse, aussi à l’aise pour chanter, jouer et danser, nous raconte sa préparation pour ce rôle et cette comédie musicale. 

Chicago – Sofia Essaïdi

 

Que représente Chicago pour vous ? 

Chicago, c’est un mythe, et c’est un rêve de gamine pour moi. Je l’ai vu quand il a été monté à Paris, puis à Broadway il y a une dizaine d’années, j’ai eu la chance de le revoir récemment à Londres. Chicago, c’est mon spectacle préféré, mais c’est aussi mon disque préféré, que j’écoute énormément depuis dix ans. C’est donc une énorme pression, mais c’est une pression que je me mets toute seule. 

 

Jouer dans Chicago, c’était forcément jouer le personnage de Velma pour vous ? 

Oui, c’était ce rôle-là. Dès que j’ai découvert Chicago, c’est le personnage de Velma qui m’a attirée. Pour sa danse, pour ses numéros incroyables dont l’ouverture All that Jazz (ndlr : qui devient en français Faut qu’ça jazz). Quand on aime la danse et le spectacle, ce numéro est mythique ! C’est aussi pour cela que je mesure la chance que j’aie aujourd’hui. Parce que c’est Chicago, et parce que c’est Velma. 

 

Dans quel état d’esprit avez-vous passé le casting ?

J’avais une grosse pression parce que je sortais d’un tournage de trois mois assez intense et très physique pour une série à venir sur France 2. C’était fin décembre et j’étais dans un état lamentable, alors que Velma, c’est sur scène le rôle de ma vie. Il fallait non seulement convaincre l’équipe française, mais aussi l’équipe américaine qui supervise le spectacle. Je me suis donné à fond, j’ai travaillé comme une folle pour l’avoir et je l’ai eu. 

Chicago – Sofia Essaïdi

Comment avez-vous préparé ce rôle ?

Je connaissais déjà toutes les chansons par coeur, mais en anglais, ce qui n’est pas si facile quand il faut se mettre aux paroles en français. Avant les répétitions, j’ai farfouillé sur Internet pour trouver des extraits, il n’existe pas de DVD du spectacle. Je voulais avoir les chorégraphies en tête, en tout cas les plus importantes, je ne voulais pas arriver et devoir tout apprendre. J’ai ainsi passé des heures sur le net dans ma petite chambre à regarder tout ça. Une fois en répétition, ce n’est pas pareil. Cette version du spectacle a été créé en 1996. Depuis 20 ans, elle a forcément subi des modifications en fonction des interprètes, du casting. Pour la version française, nous revenons à la base, à la version originale. C’est une chance pour nous. 

 

Ann Reinking est la chorégraphe de cette production. Elle a mis en place des chorégraphies dans le style de Bob Fosse, le chorégraphe original de Chicago. C’est quoi le « style Bob Fosse » ? 

C’est sexy, et en même temps très élégant, très chic. C’est une danse très précise, qui est énormément dans le détail. Il y a beaucoup de ports de tête, de ports de bras, d’épaules, de torsions, de regards sur le côté… C’est une danse précieuse et c’est tout ce que j’aime. En tant qu’artiste, c’est assez dingue ce que l’on arrive à ressentir quand on se glisse dans les chorégraphies de Bob Fosse. On est ailleurs, on se la raconte un peu !

La danse de Bob Fosse, c’est sexy, et en même temps très élégant, très chic. 

Quelles sont vos chorégraphies préférées de Chicago

C’est impossible de choisir ! Toutes mes chorégraphies sont mes préférées ! Même celles que je ne fais pas, ce qui est extraordinaire. Mais Faut qu’ça jazz, elle a vraiment quelque chose de spécial. C’est le début du spectacle. On ne raconte pas grand-chose parce qu’on a plein de secrets dans notre tête et on ne veut pas en dire beaucoup au public, tout en l’invitant à entrer dans le monde de Chicago. C’est assez troublant. J’aime beaucoup aussi Je ne peux pas le faire seule et Velma, va à la barre, qui sont des chorégraphies très difficiles. Dans la première, je chante et danse tout le numéro, c’est très impressionnant à faire pour moi, c’est un grand défi. Dans la deuxième, il y a plein de pas à droite et à gauche à mettre en tête, beaucoup de choses à apprendre. 

 

Velma est un rôle compliqué, avec beaucoup de danse. Comment se prépare-t-on physiquement ? 

Comme une sportive de haut niveau. J’ai repris la danse classique avec Nicole Chirpaz à l’AID. J’ai fait du sport régulièrement et fait attention à mon alimentation pendant les répétitions. Le rythme est très intense, on répétait six jours sur sept toute la journée. Il faut manger beaucoup de pâtes et de riz et faire quatre à cinq repas par jour pour tenir. Et puis il faut une hygiène de vie irréprochable, se coucher tôt, préserver sa voix au maximum parce qu’on est tout le temps à fond, ce qui ne me fait pas peur car je suis très sérieuse quand je travaille. Nous avons eu cinq semaines de répétition, six jours sur sept. Pour moi, c’est peu, on a souvent deux mois de répétition en France, mais c’est un rythme assez courant à Broadway. Chicago n’est pas une création mais une reprise de spectacle. Il n’y a donc pas de recherche, mais de l’apprentissage : apprendre les pas et répéter, répéter, répéter. On passe son temps à refaire et refaire, c’est ce qui est très fatigant. On a dû digérer en peu de temps énormément d’informations autant corporelles avec la danse que les paroles et le texte des scènes. C’est beaucoup de travail et j’espère que le public le verra.

Chicago – Sofia Essaïdi

Chant, danse, comédie… Chicago, c’est la vraie comédie musicale. Comment ces trois façons de s’exprimer se mélangent ? 

Dans Chicago, tout est toujours incarné, on n’est jamais sur scène pour chanter une chanson. Même quand on chante sans danser, ce qui est rare, on incarne toujours énormément son personnage. Je me sens très actrice dans Chicago, alors que je danse énormément et que je chante beaucoup. Ces dernières années dans ma carrière, j’ai beaucoup joué, j’ai pris beaucoup de cours de comédie. J’ai donc mis du jeu partout dans mon travail sur Chicago, et c’est comme ça que l’équipe voulait que l’on travaille. Maintenant, il y a un travail du jeu particulier dans Chicago, parce que l’on n’est pas dans la réalité : on est dans quelque chose de plus grand. Au début, j’avais l’impression de déclamer mon texte et de ne pas être naturelle. C’est là qu’a été mon travail le plus difficile : trouver une vérité dans quelque chose qui n’est pas complètement réaliste. J’avais un peu laissé la musique de côté ces dernières années, Chicago me reconnecte ainsi avec mon corps, la danse, la musique. Avoir les trois qui se mêlent, c’est ce qui me rend parfaitement heureuse. 

Mon personnage de Velma est « bigger than Life » !

 

 

Velma a été incarnée par beaucoup d’interprètes. Comment y apporte-t-on sa touche personnelle ? 

Je mets toujours énormément de moi dans chaque rôle que je joue parce que c’est le seul moyen pour moi d’avoir une vérité. Ce que j’apporte à Velma, c’est peut-être mon énergie. Comme dit Ann Reinking, Velma est « bigger than Life » ! Tout est énorme chez elle ! Elle a une énergie hors-normes, elle a beaucoup de tempérament, elle parle très fort, elle est tout le temps là. C’est assez jouissif à jouer même si très fatigant. C’est là que s’est fait mon travail. Je dois toujours avoir de l’énergie. Et quand je n’en ai pas… il faut que j’en aie ! Mais dans la vie, je suis quelqu’un qui a beaucoup d’énergie. Il faut de toute façon toujours amener  quelque chose de soi, sinon on invente, on fabrique et ce n’est pas intéressant. Maintenant, cela reste un processus difficile à expliquer parce que c’est un travail de longue haleine, de tous les jours. C’est en fait peut-être plus au public de répondre à cette question. J’espère qu’il verra ce que j’apporte de particulier en scène ! 

 

Chicago de Bob Fosse, Fred Ebb et John Kander est à voir au Théâtre Mogador durant toute la saison 2018-2019.

 

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