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La sortie ciné de la semaine : Toi, moi, les autres, d’Audrey Estrougo

Après Black Swan sorti il y a quelques semaines, la danse envahit de nouveau les salles obscures. Mais dans une tonalité beaucoup plus festive, et dans une ambiance résolument comédie musicale, avec le deuxième film d’Audrey Estrougo, Toi, moi, les autres, porté par Leïla Bekhti, Benjamin Siksou (hiiiii) et Cécile Cassel.

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Un film français qui se lance dans la comédie musicale, j’avoue que sur la papier, cela fait un peu peur. Je veux dire, une vraie comédie musicale, où l’on se met à chanter et danser en pleins milieux de l’action sans que le moins du monde cela ne devienne ridicule. Ce n’est clairement pas dans notre culture cinématographique, et cela reste un art difficile.

Ce n’est en plus pas le monde d’Audrey Estrougo. Et pourtant, c’est dernière s’en sort étonnamment bien. D’un point de vue purement comédie musicale, Toi, moi, les autres est une véritable réussite. Il y a une histoire romantique, deux personnes (Gabriel et Leïla) qui s’aiment mais que tout opposent, une jeune fille qui crèvent l’écran (Leïla Bekhti), un jeune première qui crève encore plus l’écran (Benjamin Siksou), un drame social (les sans-papiers) et des chansons du répertoire français drôlement bien amenées, qui arrivent tout naturellement dans l’histoire, donnent le sourire au lèvre et l’envie de taper du pied en mesure.

La bande-son va ainsi de Joe Dassin à -M-, de Daniel Balavoine à Téléphone en passant par Jacques Brel. Toutes sont vraiment bien arrangées, d’une façon très moderne sans les dénaturer. Pour un flirt avec toi ouvre ainsi le film d’une jolie façon, avec beaucoup d’humour. Et si tu n’existais pas se met à la sauce bollywoodienne, Un autre monde prend un tout autre sens lorsqu’il est chanté par un groupe de sans-papiers, ou Sauver l’amour par un petit garçon de 12 ans. Je garde un vrai coup de cœur pour La bonne étoile, chantée sur les toits de Paris par notre couple de jeunes stars, un vrai moment de grâce.

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Les chorégraphie se sont pas mal non plus, mêlant le jazz et le hip hop, le tout avec beaucoup d’humour et de trouvailles visuelles originales. Là encore, la danse se fond parfaitement dans l’histoire sans que cela choque un seul instant, comme lors de l’attente du diplôme de Leïla ou de la vérification de papiers par les policiers.

Niveau casting, Benjamin Siksou illumine le film à chaque seconde où il chante. C’était un peu (beaucoup) mon chouchou lors de la Nouvelle Star 5, j’avais même adhéré au groupe Facebook “J’aime Benjamin de la Nouvelle Star et je compte prochainement l’épouser”. D’autres avaient bien rejoint le groupe “Je donne un rein contre une nuit avec Cédric”, donc rien à dire. Leïla Bekhti est parfaitement à l’aise, et a même un joli brin de voix. Les deux ont beaucoup bossé la danse, s’adonnant même à quelques portés qui n’ont rien de ridicules. La petite troupe qui les entoure a une énergie communicative vraiment appréciable, les choré de groupe sont un vrai régal.

Bref, d’un point de vue comédie musicale, Toi, moi, les autres est indéniablement une réussite.

Mais, et il y a un gros mais. Beaucoup de défauts en fait.

Audrey Estrougo a voulu s’attaquer avec ce film à un sujet complexe, difficile : la situation actuelle des sans-papiers en France. Et elle y est allée à fond dans le cliché et le pathos. Ici, être le fils d’un préfet est une faute grave, et un flic est forcément un grand méchant sans cœur, qui agresse n’importe quel arabe et arrive à 150 pour arrêter une mère de famille. Tina, la jeune héroïne menacée d’une reconduite à la frontière, pleure à 95 % de son temps à la caméra. Et comme j’ai tendance à le dire, trop de larmes tue la larme. Le film d’Audrey Estrougo, qui se voulait dénonciateur, devient un portrait archi-manichéen qui ennuie le public face à tant de faiblesses scénaristiques. Les trois minutes d’images d’archive de l’église Saint-Bernard, diffusées à la fin, sont en tout cas beaucoup plus évocatrices, efficaces et dénonciatrices que l’heure 1/2 de pathos servi juste avant.

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Certains acteurs ont en plus un peu de mal à se servir d’un scénario moyen. Benjamin Siksou est bien meilleur chanteur que comédien. Je n’ai pas cru à son couple avec Cécile Cassel, tous deux beaucoup trop post-adolescent-e-s pour que l’on croit à leur mariage proche, et accumulant les clichés de la bourgeoisie XVIe. Seules deux s’en sortent vraiment bien : Leïla Bekhti, lumineuse (si elle n’a pas le César de la révélation, je n’y comprends plus rien), et Chantal Lauby, surprenant en maman riche alcoolique.

Le résultat reste une déception. Audrey Estrougo a su formidablement bien se sortir du piège de la comédie musicale, jouant avec ses codes, la modernisant et la mettant au goût du jour. Mais elle est tombée en plein dans celui de ce douloureux sujet des sans-papiers, ne servant absolument pas la cause à force de vouloir trop en faire.

© Mars Distribution

Commentaires (3)

  • Helen

    Du coup, tu conseilles d’aller le voir ou pas? 🙂

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  • Je vois pas du tout de qui tu parles au sixième paragraphe… 😀
    Et je ne sais pas si tu te souviens, j’avais itwé Leïla Bekhti quand on bossait pour Coco. Elle est charmant, pour elle et pour le concept, le film me tentait bien. Mais le Siksou, moins déjà 🙂

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  • @ Helen : et bien c’est bien le problème 😉 je dirais oui pour ceux et celles qui aiment bien les comédies musicales (plutôt que les ballets), sans s’attendre à une révolution.

    @ Coralie Marie : Ahhhh, le sixième paragraphe, toute une époque 😆 Et il est très bien le Siksou, il fait moins gamin qu’à la NS (je le défends jusqu’au bout 😉

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