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Saison 2024-2025 – Le Ballet de l’Opéra de Paris

Le Ballet de l’Opéra de Paris a dévoilé en mars sa saison 2024-2025. Une programmation concoctée en grande partie par José Martinez, mais qui a tout de même dû composer avec de grosses productions déjà sur les rails. Pour une première, on sent que le Directeur de la Danse a voulu rester prudent : la saison n’est pas d’une folle surprise. Néanmoins, l’ensemble est équilibré, avec un bon dosage entre grands ballets classiques, soirées plus contemporaines et quelques grands noms incontournables, certes que l’on voit partout, mais toujours efficaces. Passage en revue de cette saison 2024-2025 du Ballet de l’Opéra de Paris. 

 

Défilé 2024 du Ballet de l’Opéra de Paris

 

La saison 2024-2025 en quelques mots

Après plus d’un an et demi en poste, José Martinez signe enfin sa première saison pour le Ballet de l’Opéra de Paris… Ou presque. Les saisons se faisant très en amont, les reprises de Mayerling, La Belle au bois dormant et Onéguine étaient déjà prévues, soit trois grosses productions. Pour les créations, un travail avec Hofesh Shechter était engagé pour une création, qu’il n’aurait pas été évident d’arrêter. Sa marge de manœuvre n’était donc pas si importante que cela. Il faudra donc attendre encore un peu pour découvrir une véritable programmation “Made in José Martinez”, et permettant de mieux cerner ses envies artistiques. L’on a toutefois une saison équilibrée, entre trois grands ballets vraiment académiques – et signe que les temps changent, seul un est signé de Rudolf Noureev – deux ballets néo-classiques narratifs, deux soirées contemporaines représentatives de la Maison, une création ou un blockbuster. On peut cependant regretter un manque de surprises, avec notamment la présence de Sharon Eyal et Hofesh Shechter, omniprésents en France depuis plusieurs saisons, et on n’est pas loin de l’overdose. Ainsi qu’une absence de réflexion sur la parité femme-homme dans la programmation, et comment l’atteindre. Là encore, les marges de manœuvre n’étaient pas forcément immenses. Mais choisir Alexander Ekman plutôt que Crystal Pite, faire venir Johan Inger plutôt qu’une chorégraphe ont tout de même été des choix. Il aurait été possible (et souhaitable) de faire mieux. D’autant que de plus en plus de grandes compagnies prennent enfin ce sujet au sérieux, l’Opéra de Paris commence donc à accuser un certain retard.

Durant cette saison 2024-2025, huit répétitions des programmes de ballets sont prévues. Les retransmissions au cinéma se feront désormais par Pathé Live, la programmation est à venir. Concernant les tournées, des projets sont en cours pour faire partir le Ballet au Japon et en Italie, mais rien n’est encore finalisé, et il n’y aura pas de dates en région cette saison.

Pour les tarifs, les catégories restent stables au Palais Garnier comme à l’Opéra Bastille. Mais l’inflation se fait doucement, mais sûrement sentir à Bastille, avec quelques euros de plus pour les catégories 6, 7 et 8 (celles prisées du public plus populaire). De façon générale, on ne peut que déplorer une salle de Bastille devenue bien plus difficilement praticable depuis trois saisons, avec un parterre quasiment inaccessible à moins de 100 euros.

 

Soirée William Forsythe / Johan Inger

Du 4 octobre au 3 novembre 2024, avant-première jeune le 30 septembre, Gala AROP le 1er octobre, quinze représentations au Palais Garnier. Musiques enregistrées.

Pour le retour de William Forsythe à l’Opéra de Paris, José Martinez rêvait de Impressing the Czar. Ce sera finalement des retrouvailles en douceur, avec la reprise de Blake Works I. C’est pour la compagnie parisienne que le chorégraphe avait monté cette pièce en 2016. Une œuvre faite pour la nouvelle génération, pas forcément mémorable mais toujours intelligente, et qui ancrait profondément la création dans la richesse du langage académique. Depuis, ces Blake Works sont donnés un peu partout dans le monde, ce qui donne à cette reprise, pourtant pas vue depuis cinq ans, un goût de lassitude. La soirée prend néanmoins une autre tournure avec l’entrée au répertoire de Rearray, duo créé par William Forsythe pour Sylvie Guillem et Nicolas Le Riche en 2011. Qui sera dansé par Ludmila Pagliero et Takeru Coste, ainsi que par Sae Eun Park et Loup-Marcault Derouard. Un très beau cadeau pour ces interprètes. La soirée est complétée par l’entrée au répertoire de Impasse de Johan Inger, qui fait ainsi ses premiers pas dans la compagnie parisienne. José Martinez connaît bien son travail : c’est lui qui lui avait commandé sa Carmen, une magnifique et si moderne relecture, pour la Compagnie Nationale de Danse d’Espagne qu’il dirigeait alors. Johan Inger travaille régulièrement avec les compagnies classiques, il sait apporter aux artistes de Ballet un juste contrepoint sans les emmener dans une technique trop lointaine. Une soirée sans bavure pour démarrer la saison, sans franche surprise, mais bien calibrée.

Le Gala de l’AROP d’ouverture de saison comprend le même programme, avec le Défilé en plus. Défilé qui ne sera pas réservé à cet événement, puisqu’il aura aussi lieu les 4, 9 et 10 octobre, à un tarif classique. C’est donc le retour du Défilé pour le public d’habitués, et ce sur trois dates (tout le monde devrait donc trouver son bonheur pour les places) : une bonne nouvelle.

 

Blake Works I de William Forsythe

 

Mayerling de Kenneth MacMillan

Du 29 octobre au 16 novembre 2024, quinze représentations au Palais Garnier (représentation du 12 novembre privatisée). Orchestre de l’Opéra national de Paris, direction musicale Martin Yates.

Oeuvre puissante de Kenneth MacMillan autour de la mort du Prince Rodolphe et de sa maîtresse Mary Vetsera, Mayerling est une pièce phare du répertoire du Royal Ballet de Londres. Que vient-elle faire à Paris ? Aurélie Dupont avait absolument tenu à la faire entrer au répertoire, ce qui fut fait en 2022. Une nouveauté qui coûta cher : outre les droits d’auteur, c’est toute une production qui a été créée. Une reprise était donc attendue pour un minimum de retours sur investissement. Réjouissons-nous pour autant de cette reprise ? Par franchement. Le ballet a ses faiblesses. Et s’il appartient à l’histoire du Royal Ballet, on ne voit pas très bien ce qu’il vient faire à Paris au XXIe siècle. La compagnie avait eu d’ailleurs du mal à s’en saisir, que ce soit dans le jeu ou physiquement – que de casses cela avait provoqués. Mais il y a eu Mathieu Ganio. Il y a deux ans, le Danseur Étoile s’était saisi du personnage de Rodolphe avec une puissance dramatique à couper le souffle. Il en a fait le rôle de sa vie. À revoir pour lui.

 

Paquita de Pierre Lacotte

Du 5 décembre 2024 au 5 janvier 2025, 23 représentations à l’Opéra Bastille. Orchestre de l’Opéra national de Paris, direction musicale Mikhail Agrest.

Bientôt dix ans que la compagnie n’avait pas dansé Paquita de Pierre Lacotte ! Il était temps de reprendre ce petit bijou, si représentatif de l’école française et du Ballet de l’Opéra de Paris : voilà pour le coup une œuvre que l’on ne voit pas partout. Le décès du chorégraphe l’année dernière a poussé à cette reprise, même si l’on espère qu’il ne faudra pas dix prochaines années pour la retrouver. Paquita est le grand ballet classique de divertissement comme on l’aime : virtuose et brillant, une histoire mince comme un fil mais qui suffit à un certain enjeu dramatique, une happy end, des personnages hauts en couleur et une production somptueuse. Paquita et Lucien d’Hervilly sont de magnifiques rôles d’Étoiles, Inigo apporte le ressort comique de caractère, il y a plusieurs opportunités pour les jeunes solistes de briller, comme le pas de trois emblématique, et le corps de ballet n’est pas en reste. Seul hic : le choix de l’Opéra Bastille. Malgré sa grandeur, Paquita a un petit côté ballet de poche, qui convient si bien au Palais Garnier et qui risque de se perdre dans la grandeur froide de Bastille.

 

Paquita de Pierre Lacotte – Ballet de l’Opéra de Paris

 

Play d’Alexander Ekman

Du 7 décembre 2024 au 4 janvier 2025, 23 représentations au Palais Garnier (la première est une soirée privée). Musique Live de Mikael Karlsson, avec la chanteuse Calesta “Callie” Day.

“Bien, c’est la crise, il va falloir remplir les caisses”. Troisième reprise en sept ans pour Play d’Alexander Ekman, c’est beaucoup trop. Pourtant, on attendait beaucoup de cette collaboration en 2017, tant le chorégraphe a le talent pour créer des univers singuliers. Las. Il a surtout mis son ego sur la table, oubliant complètement les danseurs et danseuses formidables qu’il avait sous la main et a pensé qu’une scénographie démesurée suffirait pour une proposition artistique qui se tient. Et que lancer des balles vertes géantes au Palais Garnier ferait bien le buzz et serait amplement suffisant. Remplir les salles et proposer des œuvres très grand public n’est absolument pas un problème. Mais autant choisir quelque chose de qualité. Et sur ce point, les dernières créations de Crystal Pite, par exemple, sont tout de même bien plus intéressantes. Bref, passez votre chemin.

 

Démonstrations de l’École de Danse

Du 15 au 22 décembre 2024, six représentations au Palais Garnier.

C’est une tradition de Noël : chaque mois de décembre depuis plus de 40 ans, les élèves de l’École de Danse de l’Opéra de Paris, sous la direction d’Élisabeth Platel, présentent leurs Démonstrations. Soit une journée entière à présenter un aperçu, plus ou moins chorégraphié, du quotidien du cours de danse. Chaque division présente quelques exercices de danse classique, permettant ainsi de voir l’évolution pédagogique au fil de la scolarité. Puis place aux disciplines complémentaires, de la danse folklorique à la danse contemporaine, en passant par l’expression musicale ou le travail d’adage. Une formule immuable qui rencontre toujours un franc succès.

 

Onéguine de John Cranko

Du 8 février au 4 mars 2025, avant-première jeune le 6 février, dix-neuf représentations au Palais Garnier. Orchestre de l’Opéra national de Paris, direction musicale Vello Pähn.

Très souvent repris dans les années 2010, Onéguine de John Cranko a fait une petite pause dans le répertoire du Ballet de l’Opéra de Paris et n’a plus été présenté pendant sept ans. Une coupure bienvenue et qui annonce une reprise pleine de fraîcheur, avec beaucoup de renouvellement des distributions comme des artistes qui ont pu mûrir leurs propositions artistiques. Pièce emblématique de John Cranko, Onéguine porte mal son nom, puisqu’il suit surtout les tourments de Tatiana, amoureuse d’Onéguine, rejetée, puis le retrouvant des années plus tard. Cette magistrale adaptation de l’œuvre de Pouchkine n’a pas pris une ride, 60 ans après sa création. Elle est toujours aussi prenante, dramatiquement si bien construite, proposant quatre magnifiques rôles de solistes et un corps de ballet bien présent. Bref, l’on se réjouit déjà de retrouver ce ballet qui nous a laissé tant de souvenirs marquants. Et rendez-vous le 1er mars, où Mathieu Ganio fera ses adieux dans le rôle-titre.

 

Onéguine de John Cranko – Ballet de l’Opéra de Paris – Mathieu Ganio et Lumdila Pagliero

 

La Belle au bois dormant de Rudolf Noureev d’après Marius Petipa

Du 8 mars au 23 avril et du 27 juin au 14 juillet 2025, trente représentations à l’Opéra Bastille. Orchestre de l’Opéra national de Paris, direction musicale Vello Pähn (mars-avril) et Sora Elisabeth Lee (juin-juillet).

Les productions de Rudolf Noureev, quand on ne les a pas vues depuis longtemps, on appréhende un peu leur retour. Après plus de dix ans d’absence, comment a vieilli cette Belle au bois dormant ? Depuis 2013, plusieurs autres versions ont vu le jour, souvent soucieuses de revenir aux sources du ballet, et donc de s’alléger, de gagner en clarté. La production de Rudolf Noureev va-t-elle bien supporter la comparaison ? C’est en tout cas un retour bienvenu : il est difficilement pensable qu’une compagnie de ballet se passe de La Belle au bois dormant pendant autant de temps. Et une nouvelle génération d’Aurore est prête à relever le défi de ce rôle emblématique, ce dont on se réjouit. Cette Belle au bois dormant est donnée en deux séries : cela permet de présenter autant de dates (donc beaucoup d’opportunités pour le public) et d’alléger la fatigue des artistes, très intenses sur ce genre de ballet. Un retour attendu.

 

Soirée Sharon Eyal / Mats Ek

Du 27 mars au 18 avril 2025, avant-première jeune le 25 mars, dix-sept représentations au Palais Garnier. Musique enregistrée (Sharon Eyal), Musique et et par le Fleshquartet (Mats Ek).

Faire revenir Appartement de Mats Ek est un choix du cœur de José Martinez, lui qui l’a tellement dansé. De fait, cette pièce n’a pas été donnée depuis 2012, et elle manque ! Sa puissance, sa force dramatique, son absurdité en font une œuvre essentielle du chorégraphe et du répertoire contemporain de la compagnie parisienne. Voilà une belle idée qu’une nouvelle génération d’interprètes puisse s’en saisir, tout comme un nouveau public de la découvrir. Le Fleshquartet se reconstituera pour l’occasion, pour jouer en live cette musique si prenante. Sharon Eyal propose pour sa part une création, OCD Love. Qui est plutôt une adaptation d’une œuvre qu’elle a créée en 2015 et qu’elle adapte pour les qualités techniques de la troupe, incluant donc le travail de pointe. Une rencontre prometteuse et une soirée qui s’annonce passionnante.

 

Spectacle de l’École de Danse de l’Opéra de Paris

Du 24 au 29 avril 2025, quatre représentations au Palais Garnier. Orchestre de l’Opéra national de Paris, direction musicale Maria Seletskaja.

Le programme 2025 de l’École de Danse, concocté par sa directrice Élisabeth Platel, s’articule autour de trois œuvres, bien différentes. Place d’abord à la danse académique avec un extrait de Napoli d’Auguste Bournonville (le pas de six et la tarentelle). Puis c’est le retour de Sept danses grecques de Maurice Béjart, une pièce régulièrement reprise par les élèves. C’est enfin une entrée au répertoire intéressante, celle de Continuo d’Antony Tudor, chorégraphe britannique complètement absent du répertoire de la compagnie désormais. La pièce a été créée en 1971 pour d’autres étudiant-e-s, celles et ceux de la Juilliard School. Une belle aventure pour les grandes élèves de l’École de Nanterre.

 

Sylvia de Manuel Legris

Du 8 mai au 4 juin 2025 (représentation du 16 mai privatisée), dix-neuf représentations au Palais Garnier. Orchestre de l’Opéra national de Paris, direction musicale Kevin Rhodes.

Voilà la grande nouveauté de la saison ! L’entrée au répertoire de Sylvia de Manuel Legris. Immense danseur de la Maison des années 1980 à 2009, il a souvent été vu comme le Directeur de la Danse potentiel. Les aléas ont fait que le poste lui a toujours échappé. C’est tout de même un joli retour pour cette personnalité emblématique, qui signe là une belle version traditionnelle de Sylvia, dans le souci de l’école française de danse. D’autant que Sylvia a une histoire particulière : c’est le premier ballet créé au Palais Garnier en 1876, par Louis Mérante. Puis l’œuvre a disparu du répertoire, a réapparu dans la version de Lycette Darsonval, surtout par celle plus néo-classique de John Neumeier dans les années 2000. Sylvia est confrontée à un dilemme : choisir l’amour d’Aminta ou rester dans la chasteté que lui contraint son statut de Nymphe de Diane, déesse de la chasse ? Réponse en trois actes.

 

Création de Hofesh Shechter

Du 10 juin au 14 juillet 2025, avant-première jeune le 7 juin, 21 représentations au Palais Garnier.

Aurélie Dupont avait souhaité un travail au long cours avec le chorégraphe Hofesh Shechter : cela avait donc donné lieu à deux entrées au répertoire, en 2018 et 2022. Puis à cette création, déjà engagée avant que l’Étoile ne quitte son poste. Hofesh Shechter est un des grands chorégraphes d’aujourd’hui. Mais on n’est toujours pas convaincu qu’il est à sa juste place à l’Opéra de Paris. Pour le découvrir, allez donc voir sa propre troupe (qui, forcément, maîtrise infiniment mieux son langage chorégraphique), qui passe régulièrement sur Paris et en tournée en région (et pour des tarifs quatre fois moins cher). Une création qui sonne comme la dernière trace de la direction d’Aurélie Dupont.

 

Les détails de la saison, les abonnements et tarifs sont à retrouver sur le site de l’Opéra de Paris.

 

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Commentaires (2)

  • Pia de Brantes

    Un plaisir toujours renouvelé de lire vos recommandations !

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  • Meliroze

    A titre personnel, je suis ravie qu’Aurélie Dupont ait fait entrer Mayerling au répertoire de l’Opéra de Paris. Cela aurait été dommage de priver les solistes masculins d’un rôle aussi beau que torturé.
    Ensuite, j’espère que des ballets comme Coppélia, la Dame aux Camélias et la Source reviendront les saisons prochaines.

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