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Spectacle 2015 de l’École de Danse de l’Opéra de Paris

Le très français de Léo Staats, la poésie de Jacques Garnier, l’humour de Maurice Béjart et la musicalité de Béatrice Massin et Nicolas Paul. C’est sur ce quatuor que s’est basé le spectacle 2015 de l’École de Danse de l’Opéra de Paris. Spectacle très réussi autour de quatre ballets joliment remontés, même si les filles avaient globalement plus de possibilités de s’exprimer que les garçons.

Soir de fête

Soir de fête

D’ores et déjà de Béatrice Massin et Nicolas Paul a été créé pour le tricentenaire de l’École de Danse. C’est donc un hommage à la danse française, avec une évocation du baroque plongé dans notre époque. C’est aussi l’histoire d’une vingtaine d’adolescents passant à l’âge adulte. Certains y sont tout près, d’autres y regardent d’un oeil plus lointain. Pas de nostalgie toutefois. D’ores et déjà est un ballet où la danse y est profondément heureuse, racontant aussi la construction de jeunes interprètes qui découvrent la scène et dévoilent leur personnalité artistique.

Le haut du corps est baroque et classique, rappelant d’où sont formés ces adolescents, déjà remplis d’allure. Les pas sont contemporains, néo-classiques, parfois virtuoses. Le tout est profondément musical, à l’image du si beau travail de Béatrice Massin (les parties dans le silence paraissent d’ailleurs comme un peu inutiles). D’ores et déjà est une histoire d’écoute des autres, d’écoute de la musique. Pour les élèves, il s’agit à la fois de se comporter comme un corps de ballet (savoir bouger exactement ensemble même lorsqu’il n’y a plus de musique) sans en oublier leur personnalité.

D'ores et déjà

D’ores et déjà

Il y a peu de solos dans D’ores et déjà. Pourtant, chacun des 18 danseurs arrivent à marquer la scène. Par un regard, par un envol. Gaëtan Vermeulen se place ainsi en leader du groupe, en impulseur, se faisant finalement plus remarquer dans ce rôle que lors de son solo silencieux. Dommage toutefois que la chorégraphie ne fasse pas, par moments, plus appel au brio des danseurs. Un spectacle de l’École de Danse sert aussi à ça : montrer sa personnalité, mais aussi éprouver sa technique en scène. Même si la plupart des interprètes sont en première division, ce ballet s’adresse peut-être finalement à des plus jeunes, qui découvrent vraiment la scène, comme cet adorable et juvénile trio par les plus petits des danseurs.

Avec Variations Don Giovanni de Maurice Béjart, place aux filles. La musique est entre classique et romantique (le célèbre duo de séduction Là ci darem la mano de l’opéra de Mozart Don Giovanni, remanié en diverses variations par Chopin, un résultat plutôt déjanté). Une vingtaine de filles attendent le début d’une répétition. Pour passer l’ennui, rien de mieux que d’essayer de séduire un Don Juan imaginaire. Le beau gosse du cours, un spectateur mystérieux, ou tout simplement le public et la scène ? Pour les danseuses, c’est en tout cas l’occasion de belles variations techniques et drôles, où le panache se mêle à un certain humour.

Variations Don Giovanni

Variations Don Giovanni

Déjà bien plus jeune femme que timide adolescente, Naïs Duboscq assume avec piquant et une belle danse le rôle de cheffe de troupe, technique brillante et glamour assumé. Nine Seropian fait preuve d’une forte personnalité, peut-être la plus tranchée du groupe, quand Perle Vilette se glisse avec délice dans une variation précise et bien menée. Ces noms m’ont sauté aux yeux tout subjectivement, mais chacune des interprètes a assumé avec brio et bonheur sa présence en scène. Il est d’ailleurs toujours impressionnant de voir des jeunes filles d’à peine 15 ans avoir une si belle assurance en scène, et une technique déjà rodée au stress de la démonstration.

Aunis de Jacques Garnier apparaît comme une pause de poésie. Le chorégraphe s’est rappelé ses souvenirs d’enfance pour ce trio faisant appel à des danses traditionnelles, accompagné en scène de deux accordéonistes. Les trois interprètes du soir se glissent avec beaucoup d’enthousiasme dans cet hymne à la jeunesse, même s’ils semblent garder une légère retenue dans leur danse. Seul Chun Wing Lam semble parfois se départir de sa timidité, pour sortir d’un cadre purement scolaire. Il est aussi plus difficile de voir ce ballet par des élèves après l’avoir découvert par d’immenses Étoiles. Ce qui n’a pas empêché ce trio d’être très chaleureusement applaudi, Aunis fait toujours son petit effet.

Aunis

Aunis

Soir de fête de Léo Staats a conclu d’une très belle façon la soirée. Ballet on ne peut plus école française sur la musique de La Source, il met en avant un style, une façon de danser et des enchaînements propres à l’École de Danse (Jean-Guillaume Bart semble d’ailleurs y avoir pioché quelques assemblages de pas pour sa Source). Pas de trame, Soir de fête est un prétexte pour un enchaînement d’ensembles, pas de deux et variations. Un jeu qui peut vite être poussiéreux s’il est dansé sans âme, comme devenir un petit régal s’il est interprété avec esprit. Ce fut la deuxième version qui fut présentée, faisant regretter que la compagnie dédaigne un peu ce genre de répertoire.

Celia Drouy interprète avec beaucoup de grâce le rôle principal. Technicienne brillante dans la lignée de l’École française, précise sans jamais en faire trop, la ballerine proposait déjà un joli travail du bas de jambe et des épaulements délicats, montrant son goût pour la précision. Avec en plus ce je-ne-sais-quoi qui attire la lumière, voilà une jeune danseuse à suivre de près. Son partenaire Dorian Browne s’est sorti honorablement de sa tâche, avec même un certain panache dans sa variation, même si (comme lui comme pour elle) il était parfois un peu trop visible que l’adage n’est pas le point fort de l’École française.

Soir de fête

Soir de fête

Même en second rôle, Gaëtan Vermeulen a également montré de belles qualités de leader, semblant être le point central des mouvements d’ensemble. Parmi les belles demi-solistes se dégageaient Ariane Servagent, dont l’allure et l’élégance naturelle se démarquaient aussi dans Don Giovanni, ou Perle Vilette et sa danse tout en finesse. Mais là encore, tous les interprètes furent brillants, sachant aussi bien faire corps de ballet que devenir solistes lors de courtes variations. Une belle façon de conclure une (presque) année de travail pour ces grands élèves, avant le Concours d’entrée en juillet prochain.

 

Spectacle de l’École de Danse de l’Opéra de Paris, au Palais Garnier. Vendredi 3 avril 2015.

D’ores et déjà de Béatrice Massin et Nicolas Paul, avec Gaëtan Vermeulen, Simon Catonnet, Simone Dalé, Thomas Docquir, Lien Geslin-Vinck, Jérémie Neveu, Florimond Poisson, Florian Astraudo, Alexandre Boccara, Samuel Bray, Léo de Busserolles, Giorgio Fourès, Joshua Tria, Zino Merckx, Guillaume Diop, Aurélien Gay, Anicet Marandel, Loup Marcault-Derouard.

Variations Don Giovanni de Maurice Béjart, avec Naïs Duboscq, Ariane Servagent, Manon Boulac, Léa Pougheon, Adèle Belem, Camille Bon, Julie Magnon-Verdier, Perle Vilette, Nine Seropian, Margaux Gaudy-Talazac, Bleuenn Battistoni, Lucy Elliot, Philippine Flahault, Charlotte Meier, Emilia Sambor, Anouck Vallez, Marguerita Venturi, Camille Dos Santos, Carola Puddu, Eva Dejean, Anna Pasternak, Luna Peigné, Mona-Lisa Rigal, Julia Lipari et Yoann Jolly.

Aunis de Jacques Garnier, avec Chun Wing Lam, Francesco Mura et et Andrea Sarri.

Soir de fête de Léo Staats, avec Celia Drouy, Dorian Browne, Manon Cazalis, Julie Magnon-Verdier, Philippine Flahault, Charlotte Meier, Ariane Servagent, Perle Vilette, Jérémie Neveu, Andrea Sarri, Gaëtan Vermeulen, Bleuenn Battistoni, Lucy Elliot, Margaux Gaudy-Talazac, Victoire Anquetil, Kelly Riffaud-Laneurit, Anouck Vallez, Camille Dos Santos, Carola Puddu, Mona-Lisa Rigal, Chloé Segui et Julia Lipari.

 

Commentaires (4)

  • Marie-Charlotte

    Gaetan à toujours eu de belles qualités. Croisons les doigts pour lui pour le concours d’entrée!

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  • Anne

    Je pense que vous n’avez pas bien compris l’histoire de Don Giovanni…

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  • Sun

    Merci pour cet article!
    Quelqu’un a t’il vu la deuxième distribution?

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