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Danser Mozart au XXIe siècle – Le Ballet du Rhin se délocalise sur Arte Concert

Le Ballet du Rhin devait présenter son nouveau programme Danser Mozart au XXIe siècle à la mi-décembre. Mais le report de l’ouverture des salles de théâtres a  mis un terme aux espoirs de retrouver rapidement le public. Il faut donc imaginer de nouvelles manières de faire vivre la danse et le spectacle. Dans un mouvement quasi synchronisé, l’annonce de l’annulation de la réouverture a coïncidé avec la proposition de la chaîne culturelle franco-allemande ARTE de filmer et diffuser le spectacle, le 22 décembre puis en replay pendant six mois. Si rien ne remplacera jamais le contact direct avec le public, les circonstances sanitaires ont conduit les artistes à diversifier les modes de diffusion pour atteindre le public. Danser Mozart au XXIe siècle, double programme chorégraphié par deux danseurs de la troupe, Rubén Julliard (pour la pièce Amadé) et Marwik Schmitt (pour Gangflow), pour lequel les artistes du Ballet du Rhin ont répété tout le mois de novembre, trouve donc sa destination. Et à défaut de rencontrer le public en direct, le spectacle touchera une audience plus large grâce à la retransmission télévisée. DALP a pu assister aux dernières répétions dans la Salle Europe de Colmar.

Amadé de Rubén Julliard – Ballet du Rhin

Le Ballet du Rhin fut la première compagnie en France à retrouver le public dès le mois de septembre. Il fut aussi le premier à expérimenter les difficultés et les empêchements dus à l’épidémie. Les dernières représentations de Chaplin avaient en effet dues être annulées quand des artistes ont été détectés positifs à la Covid19. Puis le programme Spectres d’Europe fut amputé de plusieurs représentations après l’annonce du deuxième confinement. Danser Mozart au XXIe siècle allait-il subir le même sort ? Pas tout à fait puisque, malgré des théâtres toujours fermés, ARTE a décidé d’en réaliser une captation. “Je suis ravi que l’on puisse passer sur ARTE qui est une énorme plateforme“, confie Rubén Julliard, l’un des deux danseurs-chorégraphes de cette soirée. “Il y a du pour et du contre, c’est vrai que l’on a du mal à faire passer toutes les émotions à travers un écran. Mais l’art doit évoluer avec son époque et c’est un outil que l’on doit utiliser. Même si l’épidémie du Covid s’arrête,  c’est quelque chose qui va rester. Je trouve que c’est intéressant de travailler avec la vidéo.“.

Si rien ne remplacera jamais le contact direct avec le public, “il faut reconnaître que l’on est entré dans l’ère du numérique“, surenchérit Marwik Schmitt, le second chorégraphe de cette soirée. “Mais il faut aussi être vigilant quant à la plateforme que l’on choisit pour préserver une exigence et une qualité. C’est aussi une chance car cela permet une très large diffusion qui ne serait pas possible dans les conditions normales du spectacle. Je pense aussi que c’est une porte d’entrée qui permettra d’aller vers d’autres publics. Mais il ne faut pas perdre de vue que cela reste du spectacle vivant et les gens se donneront peut-être ainsi l’opportunité d’aller dans un théâtre.”

Gangflow de Marwik Schmitt – Ballet du Rhin

Danser Mozart au XXIe siècle occupe une place particulière dans la programmation de Bruno Bouché. Depuis son arrivée à la tête du Ballet du Rhin, le chorégraphe et ancien danseur de l’Opéra de Paris a initié cette série où les chorégraphes sont invités à s’interroger sur la manière dont un compositeur résonne aujourd’hui. Après Bach et Mahler, c’est Mozart qui est proposé à la sagacité de Rubén Julliard et Marwik Schmitt, tous deux danseurs dans la compagnie.

Et cela n’allait pas soi. “Il a fallu passer par une phase où il s’agissait de rendre ce génie humain car quelque part, on en a fait un dieu et il faut donc désacraliser Mozart. Ce qui ne peut se faire que par la recherche historique pour le rendre proche de nous”, explique Marwik Schmitt. Pour Rubén Julliard, ce fut un challenge : “Mozart n’est pas un compositeur vers qui  je serais allé naturellement si j’avais eu carte blanche. Mais c’était un défi dont il fallait s’emparer. Je suis allé chercher dans toutes ses oeuvres. En fait j’ai d’abord écrit ma pièce avant de mettre la musique dessus. Finalement, dans ce florilège, j’ai choisi d’inclure le deuxième du 21e concerto pour piano, qui est la musique de Petite Mort de Jiří Kylián. Mais je l’ai  utilisé très différemment”

Amadé de Ruben Julliard – Ballet du Rhin

Les deux pièces s’enchainent sans pause. Rubén Julliard s’est laissé tenter par une pièce narrative mettant en scène les soeurs Weber, les quatre filles du musicien Fridolin Weber, et parmi elles Constance qui devint l’épouse  chérie du compositeur. D’inspiration néo-classique, le chorégraphe ose les pointes pour les quatre danseuses et offre un ballet onirique et charmant. Marwik Schmitt lui fait écho dans un propos plus métaphysique faisant résonner le célébrissime Requiem, artefact absolu de l’inachèvement dans l’art. Dans la salle, quelques danseurs et danseuses de la compagnie ont pris place et font une ovation à leurs camarades. “C’est tellement bien de voir un spectacle dans un théâtre“, s’exclame ravie une danseuse de la compagnie.

Comment ne pas souscrire ? Contre vents et marées, la compagnie alsacienne continue de faire vivre l’art de la danse. Et si les salles sont closes, les répétitions continuent avec en ligne de mire la prochaine création signée Bruno Bouché qui s’empare du chef-d’oeuvre cinématographique de l’allemand Wim Wenders Les Ailes du Désir. Nul ne sait aujourd’hui dans quelles conditions aura lieu la première programmée à l’Opéra de Strasbourg le 13 janvier prochain. On brûle de voir sur scène et avec le public ce temps fort de la saison. Mais si d’aventure, nous en étions privés, du moins peut-on espérer en voir une captation. C’est une consolation.

Gangflow de Marwik Schmitt – Ballet du Rhin

Danser Mozart au XXIe siècleAmadé de Rubén Julliard avec Monica Barbotte, Christina Cecchini, Paloma Lassere, Pierre-Émile Lemieux-Venne et Rio Minami ; Ganflow de Marwik Schmittt avec Noémie Coin, Cauë Frias, Brett Fukuda et Paloma Lasserre.

Programme retransmis sur ARTE Concert le 22 décembre 2020 à 19 heures, puis en replay pendant 6 mois. Reprise à Mulhouse les 13 et 16 février et à Strasbourg les 8, 8 et 10 avril.

Répétition du 16 décembre 2020 à La Salle Europe de Colmar.

 



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