TOP

[Prix de Lausanne 2022] Rencontre avec le candidat Dorian Plasse

Après Julien Fargeon, Manon Baranger et Alice Hidalgo, continuons notre découverte des candidats et candidates françaises au Prix de Lausanne 2022 avec Dorian Plasse (406). Venu de la Réunion, il a rejoint l’Académie de danse Princesse Grace il y a quatre ans, après avoir été repéré au YAGP. À 18 ans, il aimerait entrer dans un Junior Ballet. Il nous raconte ses premiers jours au Prix de Lausanne, sa préparation et son évolution en tant que danseur.

Prix de Lausanne 2022 – Dorian Plasse (406)

Quel est votre parcours ?

Je suis né à la Réunion, à Saint-Denis. J’ai commencé la danse à quatre ans, dans une école de ma ville, avec le jazz. J’ai démarré le classique vers 8 ans et j’ai fait un peu toutes les écoles de Saint-Denis ! Vers 8-9 ans, j’ai pris la danse un peu plus sérieusement. À 13 ans, j’ai passé mon premier gros concours, le YAGP à Barcelone. Et j’ai été sélectionné pour la finale à New York ! Ça a été un vrai choc. J’étais le petit garçon venu de la Réunion, qui n’était pas dans une grande école, et je me suis retrouvé dans cette grande compétition, au milieu de danseurs de plein de nationalités avec un niveau que je n’avais jamais vu avant. À Barcelone, je me disais que j’allais avoir une petite expérience de la scène, prendre des cours avec d’autres professeurs. Je ne pensais pas une seconde à autre chose. Et j’ai décroché le premier prix contemporain et le troisième prix en classique. À la remise des prix, beaucoup de directeurs sont venus me parler pour me proposer une bourse. Tout est arrivé très vite. Lors de la finale à New York, ce sentiment a été décuplé. Et ma vie a pris un autre chemin. La danse est devenue plus qu’une passion. C’est quelque chose qui me fait me sentir bien. Plus je grandis, plus je me rends compte que c’est nécessaire, elle me fait oublier le reste et me fait me sentir bien.

 

Pourquoi avoir choisi l’Académie Princesse Grace ?

J’ai fait un choix. L’Académie Princesse Grace est très réputée, c’est l’une des meilleures. Le cadre de Monaco est beau, c’est près de la France et ma tante habite pas loin.

 

Cela n’a pas été dur de quitter la Réunion et de partir à l’autre bout du monde ?

À 9-10 ans, la grande école qui fait rêver les jeunes danseurs, c’est l’École de danse de l’Opéra de Paris. Mais je ne m’imaginais pas alors quitter la Réunion. En faisant le YAGP, j’ai découvert le monde professionnel et international, et j’ai réalisé qu’il faudrait bien que je parte un jour. Les premiers moments à l’Académie furent difficiles. C’était la première fois que je quittais la Réunion. Mais je voyais ma tante le week-end, je rentrais deux fois dans l’année chez moi. Avec le temps qui passe, on s’habitue. Et on a beaucoup de choses à faire !

 

Rentrer à l’Académie Princesse Grace, ça a aussi été pour vous la découverte du monde professionnel, de l’entraînement en sport-étude. Comment cela s’est-il passé ?

Ça a changé beaucoup de choses. L’intensité du travail était vraiment différente de ce que je faisais avant. L’exigence aussi. Au final, je me suis rendu compte qu’on ne nous apprenait pas seulement à danser à l’Académie, mais aussi à bien se comporter, l’école fait notre éducation. En tant que personne, ce fut aussi un gros changement, pas uniquement pour la danse. Aujourd’hui, je suis en quatrième année, la dernière. Notre professeur est Carsten Jung, ancienne Étoile du Ballet de Hambourg qui a rejoint l’Académie cette année. Il travaille beaucoup sur la précision, il nous pousse. Avec la routine, on peut rester inconstant et sur nos acquis. Lui nous aide à toujours aller chercher plus loin.

 

Comment avez-vous vécu le confinement en 2020, alors que vous étiez en deuxième année ?

Je suis retournée à la Réunion pendant le confinement. C’était une période spéciale et compliquée. Je dansais à la maison, ce n’était pas évident sur une si longue période. Mais je me rends compte que l’Académie nous a suivi tout du long, comme si nous étions toujours là-bas. On n’a jamais été tout seul. On a fait tellement de choses pour garder au maximum ce que l’on avait que, quand nous sommes rentrés en septembre, tout est reparti.

Prix de Lausanne 2022 – Dorian Plasse (406)

Y a-t-il une pression particulière à se présenter au Prix de Lausanne quand on vient de l’Académie Princesse Grace ? Ce sont des élèves de cette école qui ont remporté la médaille d’or en 2018 (Shale Wagman), 2019 (Mackenzie Brown) et Marco Masciari (2020).

Mon directeur Luca Masala m’a proposé de participer. Rien que le fait qu’il me choisisse est très encourageant. Au tout début, on pense bien sûr aux autres élèves qui ont gagné avant. Il va falloir bien faire, comme les précédents ! Mais au final, ce n’est pas pour ça que je me suis préparé. En discutant avec Luca Masala qui m’a beaucoup coaché, j’ai compris qu’aller en finale ou gagner une médaille, ce n’est pas le plus important. Le plus important, ce sont ces six mois de préparation où j’ai dû faire un gros travail. Avant Lausanne, j’étais une personne assez réservée et timide, qui n’avait pas forcément cette rage que d’autres peuvent avoir. En grandissant, c’est quelque chose qui me manquait de plus en plus. Luca Masala voulait aussi me présenter au Prix de Lausanne pour ça : pour que je m’ouvre plus. C’est durant ces mois où j’ai beaucoup travaillé que j’ai progressé là-dessus. Je sens que j’ai bien changé, ça a été une préparation intense. Luca Masala m’a dit ainsi que c’est comme si j’avais déjà gagné. Je viens pour montrer ce que je suis, pas pour gagner une médaille.

 

Qu’allez-vous présenter comme variation ?

Luca Masala a choisi les deux variations. En classique, il a pris celle du Prince Désiré. C’est une variation très difficile mais qui me met en valeur comme les lignes ou le manège final. Il y a une certaine élégance que j’ai dû travailler aussi. C’est la variation du prince, il faut toujours garder la noblesse et l’élégance, cela doit se voir tout au long de la variation même si je rate quelque chose. C’est un vrai personnage, je dois chercher une attitude par moi-même. Pour la variation contemporaine, il a choisi Desde Otello de Goyo Montero. J’aime beaucoup les mouvements et la musique, même si elle est très dure. C’est un solo que l’on a commencé à travailler fin décembre, donc assez récemment. J’ai appris aussi à travailler par moi-même, beaucoup, en dehors des séances. Et je me suis approprié petit à petit ce solo, je peux vraiment y être bien. Je vais essayer de tout donner, surtout que je me sens parfois plus à l’aise en contemporain qu’en classique.

 

Quelles sont vos qualités pour vous démarquer ?

Ma confiance en moi s’est beaucoup améliorée pendant cette préparation. En cours de danse, j’ai une présence plus forte, qui peut me servir dans ce genre de compétition. Je suis aussi quelqu’un de très sensible, cela peut toucher certaines personnes.

 

Quelles sont vos ambitions au Prix de Lausanne ?

C’est une énorme compétition, le monde de la danse la regarde. J’espère que cela pourra déboucher sur des propositions dans des compagnies. C’est aussi l’occasion de travailler avec des professionnels, d’avoir une expérience de scène.

 

Vers quoi se porteraient vos choix de compagnies ?

Il faut parfois un peu détacher les rêves que l’on avait il y a quelques années et la réalité d’aujourd’hui. J’ai 18 ans, je suis encore jeune et je n’ai fait que quatre en sport-étude. Peut-être que démarrer en Junior compagnie serait mieux, pour danser plus. Je pense ainsi à l’ABT Studio Company, qui me plaît beaucoup, ou la compagnie junior de Zurich. Pour les compagnies, je pense bien sûr à l’English National Ballet ou le Royal Ballet, ce sont des rêves ! Quant aux rôles, j’ai une personnalité lyrique et douce, je pense donc à des personnages de prince, à Roméo… Mais j’espère pouvoir toucher à tout dans ma carrière.

Prix de Lausanne 2022 – Dorian Plasse (406)

Comment se sont passés vos premiers jours au Prix de Lausanne ? (ndlr : l’interview a été réalisée mardi 1er février au soir).

Le premier jour, le dimanche, fut la visite des lieux, la rencontre avec les candidats. C’était étrange de dire que l’on est là, après avoir tellement suivi les précédentes éditions. Le premier cours s’est très bien passé, j’ai pris du plaisir, cela m’a donné de l’énergie. Lundi, le jury a commencé à regarder, il y avait donc toujours ce petit stress. Mais j’ai été bien préparé à ça à l’Académie. J’ai fait comme si j’étais à un cours de danse normal, j’ai pris du plaisir. En contemporain aussi. Je profite vraiment des cours. Yannick Boquin, qui donne les cours de danse classique, était déjà venu à l’Académie, c’était donc quelque chose d’un peu familier, même si je n’ai pas beaucoup travaillé avec lui. Il fallait bien se concentrer. Pour le contemporain, Armando Braswell nous a fait travailler l’improvisation, que l’on fait aussi à l’Académie.

 

Quel est votre état d’esprit en quelques mots ?

Je suis très motivé ! J’ai un grand enthousiasme pour la suite et prêt à affronter la fatigue. Ce n’est pas encore fini, j’ai hâte de continuer à apprendre.




Poster un commentaire