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Gala Hommage à Manuel Legris

Cinq ans après ses adieux au Palais Garnier, Manuel Legris était de retour sur une scène parisienne. Au Palais des Congrès plus précisément, le cauchemar de tout-e amateur-rice de danse qui se respecte (trop-grand-horrible-sono). Pourtant, tout le monde a fait le déplacement sans l’ombre d’un doute pour le Gala Hommage à Manuel Legris, orchestré par lui-même.

Le danseur a fait appel à ses ami-e-s Étoiles internationales, son ancienne partenaire Aurélie Dupont ou quelques-uns des meilleurs artistes de la compagnie qu’il dirige aujourd’hui, le Ballet de Vienne. En a résulté un spectacle d’un haut niveau, pas toujours bien équilibré mais porté par une production travaillée. Dommage qu’ait manqué le grand moment d’émotion inoubliable, pour véritablement marquer cette soirée. Mais ce gala  a tout de même offert de sympathiques instants de danse.

Gala Manuel Legris - Final

Gala Manuel Legris – Final

 

Les moments enthousiasmants de virtuosité

Oh tiens, il est venu de Mathias Heymann, quelle surprise. L’Étoile de Paris était venu avec la Sujet Charline Giezendanner pour Donizetti Pas de deux, chorégraphié par Manuel Legris. Soit un pas de deux qui s’amuse à accumuler toutes les difficultés techniques juste pour le plaisir. Mais à ce jeu-là, Mathias Heymann (même un peu fatigué) est décidément le meilleur. Ça sautait et virevoltait dans tous les sens, c’était enivrant. Charline GIiezendanner a très bien tenu son rôle, piquante, fraîche et virtuose.

Mathias Heymann est revenu pour le long solo de Désiré, extrait de La Belle au bois dormant. Un choix assez étrange pour un gala, ce passage n’est pas évident dans ce style de spectacle (10 minutes en scène, sans décor et Fée Lilas). Le danseur a toutefois montré une certaine poésie et musicalité dans ce long solo.

Autre grand moment, le pas de deux de Don Quichotte par Thiagos Soares et Marianela Núñez. Lui assure ce qu’il faut avec panache, mais ne nous y trompons pas : la star, c’est elle. Et quelle superbe Kitri ! Du style, du jeu, de la virtuosité, de la flamboyance, une si vive joie de danser et des fouettés à n’en plus finir… Une véritable star !

Le moment Applaudissements

Juste avant le début du pas de deux du Parc, Manuel Legris n’a pas encore bougé le petit doigt, mais le public le salue déjà. Pas de doute, c’est bien pour lui que l’on est venu. Cet extrait marche à tous les coups, c’est beau, la musique subjugue, il n’y a pas trop à forcer pour se laisser aller. Mais Aurélie Dupont semblait un peu en pilotage automatique. Dommage, car ce couple fonctionne toujours aussi bien.

 

Les moments qui donnaient envie d’en voir un peu plus

Pas facile d’ouvrir un gala, surtout avec l’adage blanc du Lac des Cygnes. Comment donner vie à cette histoire sans le mystérieux décor humain des 32 cygnes et toute l’histoire qui précède ? Olga Esina n’a pas fait de miracle, mais sa délicatesse, ses longs bras expressifs et sa technique musicale ont à l’évidence montré qu’elle était une grande interprète du rôle. Son partenaire Kiril Kourlaev faisait un peu figure de porteur dans ce pas de deux. Mais le danseur s’est rattrapé dans un extrait d’Anna Karenine de Boris Eifmann. Explosif et charismatique, il a montré toutes ses qualités dramatiques, là encore bien accompagné par  Olga Esina.

Le duo entre Manuel Legris et Aurélie Dupont sur un extrait de Sylvia de John Neumeier avait aussi de quoi intriguer. Difficile de remettre dans le contexte sans connaître le ballet, et de vraiment tout comprendre, mais il s’est passé quelque chose en scène. Un peu d’humour, une relecture différente du ballet… À quand le retour de cette version en intégralité ?

 

Le moment plus réussi qu’il n’y paraissait au départ

Après Donizetti Pas de deux, place au duo contemporain Aimless, chorégraphié par Dimo Kirilov Milev, dansé par lui-même et Tamako Akiyama. Difficile, au début, de passer après ce feu d’artifice pour un passage intimiste et introspectif. Mais la beauté de la chorégraphie, portée par de très bons interprètes, a su instaurer petit à petit une ambiance particulière et une respiration bienvenue au milieu des numéros de virtuosités. Une émotion tout en finesse qui s’est finalement terminé trop vite.

 

Les moments qui ont du mal en gala

L’année dernière, au Gala Noureev & Friends, il y avait eu ce moment magique : Tamara Rojo et Federico Bonelli dans le pas de deux de la chambre extrait de L’Histoire de Manon. Deux minutes d’intensité et d’amour à couper le souffle. Mais ce passage ne marche pas à tous les coups en gala, sorti de son contexte. Maria Eichwald et Friedemann Vogel l’ont ainsi parfaitement dansé, mais difficile d’y percevoir un tant soit peu d’émotion.

Même verdict pour l’extrait de Winter Dreams par Marianela Núñez et Thiagos Soares. Le couple a l’habitude de danser ce passage en gala, ils semblent exactement savoir quelle expression faire à quel moment. Mais il reste difficile là aussi d’entrer dans l’histoire de façon aussi abrupte. Le geste est parfait mais l’émotion absente. L’impression est renforcée par la musique, qui est au début la même que celle d’un pas de deux d’Onéguine. Les souvenirs du 28 février sont encore vivaces et la comparaison difficile pour le couple londonien.

 

Le moment “Comment peut-on faire un aussi joli costume pour elle et un aussi mauvais costume pour lui ?”

Extrait de La Fille du Pharaon de Pierre Lacotte. Mouvement d’extase quand Ekaterina Krysanova entre en scène, son tutu d’inspiration paon est l’un des plus beaux jamais vus en scène. Puis mouvement de ricanement quand son partenaire Semyon Chudin apparaît. “Il a piqué le costume de sa petite sœur“, tweet JoPrincesse. Bon résumé. Passé ce petit claquement de rétine, il faut bien dire que le couple du Bolchoï a offert un très joli moment, même s’ils ne sont pas des plus assortis. Si elle a ce piquant et cette assurance si agréable, c’est surtout Semyon Chudin qui a sorti son épingle du jeu, brillant et virtuose. Ce duo fit oublier leur précédent pas de deux, un assez décevant extrait de La Belle au bois dormant.

 

Le moment dont on aurait pu se passer

Factum de Patrick de Bana est une sorte d’improvisation sur un thème de flamenco, deux chaises et un couple. Une idée relativement banale qui peut remporter l’adhésion si elle est portée par un minimum d’originalité. Malgré les qualités des interprètes, Ketevan Papava et Patrick de Bana, ce ne fut pas le cas. Factum est un pensum du genre où défile tous les clichés du duo “Je t’aime moi non plus”, l’attitude pénible du mâle dominant finissant par faire céder sa partenaire en prime.

 

Le moment Instant groupie

Maria Eichwald et Friedemann Vogel sont revenus lors de la deuxième partie pour un passage plus contemporain, un extrait de Mono-Lisa d’Itzik Galili. Tout démarre dans un intérêt poli : musique contemporaine et extensions dans tous les sens, nous sommes dans une veine d’inspiration McGregorienne sans surprise. Et puis tout à coup, Friedemann Vogel semble avoir trop chaud et enlève son t-shirt. La chorégraphie n’en devient pas forcément plus passionnante, mais le danseur se suffit à lui-même. Surtout qu’en toute objectivité (sisi), il sait se servir de sa plastique avantageuse et donner un véritable dynamisme à cette chorégraphie un peu plate.

 

Le moment Clou du spectacle

Finir par cet extrait de La Chauve-souris, quelle bonne idée ! Pas de final ici où lui se fait couper les ailes, mais un trio drôlatique entre Monsieur-graveleux, Madame-qui-ne-sait-comment-s’habiller et la bonne dépassée. Olga Esina est sublime en femme frivole qui en fait un peu trop. Manuel Legris fait son chow, cabotine et virevolte avec un plaisir évident. À presque 50 ans, le voilà qui donne une leçon de virtuosité et de charisme en scène à la nouvelle génération. Tous les deux ont l’air de s’amuser, autant que le public et ce n’est pas peu dire. Un excellent moment pour terminer sur une note d’humour ce gala.

 

Gala Hommage à Manuel Legris au Palais des Congrès. Avec Manuel Legris, Olga Esina et Kiri Kourlaev (Ballet de l’Opéra de Vienne), Charline Giezendanner, Mathias Heymann et Aurélie Dupont (Ballet de l’Opéra de Paris), Maria Eichwald et Friedemann Vogel (Stuttgard Ballet), Ekaterina Krysanova et Semyon Chudin (Ballet du Bolchoï), Marianela Núñez et Thiago Soares (Royal Ballet de Londres), Patrick De Bana (Nafas Dance Company), Tamako Akiyama (Compañía Nacional de Danza de España) et Dimo Kirilov Milev (danseur international). Dimanche 2 mars 2014.

Commentaires (1)

  • Joelle

    C’était un superbe gala ! Je n’ai pas regretté une seule minute.
    M. Heymann a été superbe 🙂 La découverte M. Nunez m’a scotchée ! Et enfin j’ai pu voir Manuel Legris danser sur une scène et pas sur un écran de télé ou d’ordinateur, en plus avec la charmante et talentueuse O. Elsina, sans oublier A. Dupont… C’était le top !

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